27 avr 1936

De La Rocque copie Hitler, Jean Seinforin (avril 1936)

Submitted by Anonyme (non vérifié)

Nous assistons, au cours de cette dernière période, à une recrudescence d'activité des ligues factieuses, en particulier de l'armée des trusts du colonel de La Rocque dont les rassemblements se sont multipliés ; les raisons de cette activité sort dues à la crainte que leur inspirent les résultats du scrutin du 26 avril, pour lequel notre grand Parti communiste a engagé une vaste et puissante campagne.

En regard de cette activité, il nous a paru intéressant de fournir à nos camarades, au travers de cette étude quoique encore très incomplète, quelques renseignements sur la politique des Croix de feu qui est, comme écrit notre vénéré camarade Cachin : « Le gros de l'armée hitlérienne française ».

MORALE ET PROPRETÉ

De La Rocque utilise divers moyens pour gagner la masse :

1. Il s'efforce de créer une « mystique ». Dans les premiers temps il s'appuya en particulier sur les anciens combattants ; en 1934, après les scandales qui illustrèrent cette période, il parla de propreté, d'honneur, essayant d'exploiter le dégoût qu'avaient provoqué dans les masses ces scandales ;

2. Aidé par les trusts et la presse à leur dévotion, il s'efforce d'auréoler sa personne, il développe le culte du chef sublime, nanti de toutes les qualités.

En cela, il copie servilement les méthodes de Mussolini et d'Hitler, de qui le grand capitalisme a fait des « héros » pour mieux leur permettre de tromper les masses et les convaincre d'accepter leurs plans de misère, d'esclavage et de guerre.

En Allemagne, Hitler développa la « mystique » raciste, en France, de La Rocque utilise la génération du feu, la lutte contre la corruption ; il parle de morale et de propreté nationale. Le mercenaire des trusts est mal placé pour parler de nation, lui dont les ancêtres étaient dans l'armée de Coblentz et combattirent les armes à la main les conquêtes glorieuses du peuple de France en 1793.

L'on peut se demander jusqu'à quel point peut aller le cynisme quand l'on entend parler de morale et de propreté celui qui fut, au Maroc, dirigeant du 2° Bureau, et l'on sait l'opinion que professent envers ces genslà même ceux qui les emploient.

Propreté dans la bouche de l'homme au service des 200 familles, qui eut l'appui du millionnaire Coty, qui reçu, en 1932, de M. Pozzo di Borgio, richissime propriétaire foncier de l'Eure, la coquette somme de 500.000 francs, le même qui lui octroyait 80.000 francs pour lancer Le Flambeau.

Plus tard, le petitsfils des contrerévolutionnaires de Coblentz recevait d'un groupe de « républicains nationaux » 50.000 autres francs, pour ne citer que ces quelques faits.

N'oublions pas non plus que le colonel a délivré la carte Croix de feu n° 13 à de Wendel, membre des 200 familles ; de Wendel qui parle de patrie et a en même temps fait livrer, par ses mines de Moyeuvrela Grande, dans le seul mois de janvier, 547.000 tonnes de minerai à Hitler, qui nous le renverra s'il le peut, sous la forme de bombes et d'obus !

LE CHEF ET SES QUALITÉS

On trouve dans « Service Public », livre signé par le chef des troupes de la tête de mort, qu'il faut « enlever les leviers de commande aux hommes dont l'existence privée est, si peu que ce soit, sujette à caution », et il présente sa personne.

Les trusts mènent une propagande active autour de son nom. Pour ne pas être en reste, il se glorifie luimême, il essaye, tronquant des textes, de faire confirmer par ses adversaires sa propre opinion de sa personne, telle cette brochure parue ces jours derniers où il fait dire au camarade Cachin :

« La Rocque possède incontestablement des qualités personnelles considérables et d'indéniables qualités d'organisation. On doit reconnaître ses plus dangereux ennemis », estimation qui aurait, écruil, été prononcée par notre camarade dans son discours au VII, congrès de l'I.C.

Reprenant le texte exact, nous lisons : « C'est un homme, ancien noble, qui a une puissance d'organisation indéniable, car il faut reconnaître ses pires ennemis ».

Quant à sa connaissance des questions économiques ou sociales, intérieures ou extérieures, il n'est que de lire le livre « Service public » pour être convaincu de ses capacités. Pour plus de précisions, nous en étudierons les points essentiels plus loin.

Pour l'instant, nous nous contenterons de donner cette perle d'un de ses article du Flambeau, numéro du 28 mars, « La Russie des Soviets et l'Allemagne ont, l'une après l'autre, quitté la Société des Nations... Tout a été mis en oeuvre pour amadouer Moscou, pour amadouer Berlin, et les faire rentrer dans le giron du Covenant ». Comme connaissance de la politique internationale, ce monument est réellement digne de sa personne.

DÉMAGOGIE FASCISTE

Un troisième moyen utilisé par l'agent de de Wendel pour tenter de capter la confiance des masses, est, à l'exemple de tous les fascismes, la démagogie sociale. Nous connaissons déjà, par lés résultats obtenus, cette méthode de propagande en Italie et en Allemagne, le danger que présentent pour la vie des peuples les promesses mensongères des fascistes.

Sous les coups de la crise, de la misère, dégoûtées par l'éclosion desscandales successifs, par la carence ou même pire, des vieilles formations politiques, ne sachant plus à quels saints se vouer, perdant confiance, les masses et en particulier les couches moyennes recherchent une issue, risquant de se jeter dans les bras de leurs pires ennemis, les fascistes.

C'est ce que voulut à tout prix éviter notre grand Parti communiste quand il lança l'idée du Front populaire et réussit à créer ce formidable et magnifique mouvement.

De La Rocque voulut essayer de capter ces masses désabusées, mais un obstacle était devant lui, c'était l'expérience néfaste de Mussolini et d'Hitler qui avait, en partie, dessillé les yeux sur le véritable caractère de cette nouveauté, parmi le peuple de France, qui, attaché à ses libertés, n'aurait jamais accepté cette nouveauté, tristement trop célèbre du fascisme.

Les de Wendel, Mercier, Rothschild et autres véritables dirigeants des Croix de feu, voient le danger, ils chargent sous leur contrôle le colonel mercenaire de faire un livre dans lequel ils vont tâcher d'éviter cet écueil. C'était «Service Public».

La Rocque ne peut, en 1934 année où parut son livre élaborer un programme.

C'est dangereux pour son mouvement, pour les deux cents familles, il élude la question par cette explication plus cynique que franche : « Je n'en ai point publié ». « Dire quelque chose » n'engage à rien si on parle exclusivement en son nom ou au nom de groupes sans consistance.

Lorsqu'on a derrière soi une élite vivante, une force vigoureuse,ardente, organisée, « dire quelque chose » entraîne des conséquences lointaines sur lesquelles il est impossible d'exercer son contrôle, des flatteries à l'adresse de ses troupes, et puis l'aveu brutal, il a peur de s'engager, d'avancer des revendications, car, alors, il perdrait le contrôle des troupes, il serait contraint de se démasquer auprès d'elles, ou perdre le crédit des 200 familles, qui est la seule raison d'être de sa personnalité.

Mais parmi ses troupes, dans ses propres cadres, il est des entêtés qui manifestent un esprit combatif, ils cherchent l'issue, une autre situation que celle qui leur est faite par la crise.

Ces désirs, de La Rocque les appelle « la tyrannie abaissante des revendications alimentaires » et il tente de leur répondre en exploitant leur attachement au groupement. « notre collectivité ne pouvait se mêler à des escarmouches préliminaires, parfois contradictoires, de fourrageurs et de partisans. Techniquement, spirituellement, c'eût été un manque de respect.»

Contentezvous donc, travailleurs trompés par sa démagogie de nourriture « technique et spirituelle ».

Il ne peut pas avoir de programme précis, il ne peut qu'énoncer des formules vagues, qui lui permettent de ménager la chèvre et le chou et alors haro sur « les programmes (qui) sont des aboutissants », il leur oppose la mystique « il faut restaurer d'abord la moralité publique, l'autorité de l'Etat, la mystique française ». Tout comme Mussolini et Hitler, il fonce sur le marxisme qu'il qualifie « l'inhumaine pédagogie de Karl Marx ».

Inhumanité qu'il se garde bien d'exposer, et pour cause, et voilà noshommes partis dans le « brassage des classes ».

La lutte de classes est une pure invention ou, tout au moins, a cessé d'exister.

« Quant aux héritiers survivants et improductifs de fortunes amassées par leurs ascendants, quant aux étoiles filantes de la spéculation, ce sont des anachronismes », et, plus loin, « leur disparition s'opère d'ellemême : il faudra la régler ». Tiens, tiens, mais si nous ne nous abusons il nous semble avoir entendu quelque chose de rapprochant dans certaines théories du « superimpérialisme ». Réellement c'est loin d'être du nouveau Monsieur le Comte !

Et, enfin, après nous avoir accusé d'inventer de toutes pièces la lutte de classes « on perçoit dès lors à quel point est artificielle, trompeuse et pernicieuse la théorie (sic) de la lutte de classes ». Voici l'aveu de son existence. «Il y a une bataille généralisée, décousue, non seulement pour legagnepain, mais aussi pour la fortune rapide et sans limite».

Et l'on trouve ces deux raisonnements contradictoires dans 7 lignes qui se suivent.

L'on pourrait ainsi, tout au long du livre, suivre cette ligne d'affirmations et leurs réfutations s'il ne nous fallait tenir compte d'un fait nouveau, c'est la parution, ces derniers jours, d'un manifeste électoral des Croix de feu, non pas programme qui n'est qu'un « aboutissant », Casimir le veut ainsi « manifeste » les mots ont la valeur qu'on leur donne.

ANTIÉLECTORALISME

Nous lisons dans un recueil d'articles du comtecolonel Casimir François de La Rocque, édité en brochure avec comme titre, « Autour des élections », brochure distribuée gratuitement et à profusion, ces lignes prétentieuses :

« Nos arbitrages électoraux tendront à mettre la clarté dans ces débats, à éliminer les nonvaleurs, à briser les manoeuvres dolosives. »

Réellement la modestie n'est pas la principale qualité de M. Le Comte.

Sa tactique n'a pas changé depuis le jour où il apposa sa signature au bas de « Service Public », d'un côté impressionner par ses exagérations immodestes et, de l'autre, à nouveau, l'hypocrisie. Voici d'ailleurs ses propres écrits amplement significatifs : « Nos adhérents incorporés à des comités suspendront, jusqu'au lendemain du deuxième tour, toute activité Croix de feu.

Nous leurs souhaitons bonne chance : nous les retrouverons avec joie dans nos rangs lorsqu'ils auront terminé »; les Jésuites n'ont jamais fait mieux dans cet art.

Ces messieurs vont mener campagne pour les candidats des 200 familles ou pour leur propre compte, mais le groupement Croix de feu ne devra pas apparaître.

C'est ce que La Rocque veut dire quand il écrit :« L'appartenance à nos groupements ne devra pas être invoquée » et pour plus de précaution, pour ne pas qu'ils se reconnaissent et que les travailleurs ne les connaissent :

« Le port des insignes sera interdit dans l'accomplissement de leur charge auprès des candidats annoncés ou déclarés », nous ne pensons pas devoir insister, il est assez difficile de trouver des mots pour qualifier une moralité aussi basse.

Ce qu'il y a de plus curieux c'est qu'au début de cet article, dont nous venons de citer des passages « le chef », parlant de l'activité électorale, écrit :

« Nos associations, pour exercer leur contrôle et leur vigilance, se tiendront à l'abri de semblables déformations », mais il laisse libre les personnes qui forment ces associations, à n'en pas douter dans la mesure où les personnes manifesteront une activité en rapport avec la raison d'être de leurs associations, c'estàdire qu'ils devront prêter leur concours aux candidats se prononçant pour une politique qui s'accorde avec les points du fameux « manifeste électoral » que nous allons voir, c'estàdire contre les intérêts des travailleurs.

LEUR MANIFESTE ÉLECTORAL

Etudionsen d'abord la partie sociale et économique. Si, dans le livre qu'il signa, M. Le Comte traite avec désinvolture les soucis matériels des travailleurs en les qualifiant de « tyrannies abaissantes des revendications alimentaires », dans le manifeste public il a jugé plus opportun de répondre à ces soucis en premier lieu. Réponse ? Si l'on peut appeler ainsi une série de formules en chapelet qui n'engagent à rien et lui permettent toutes les dissertations.

Il en est de même pour le deuxième point ayant trait à la durée du travail, formules aussi vagues, d'où est même exclu un terme qui pourrait l'engager à faire respecter la, loi établie de la journée de 8 heures.

Le troisième paragraphe a trait aux congés payés, l'on peut déjà faire sur ce point un rapprochement entre les propositions de de La Rocque et les mesures prises par Hitler dans les entreprises.

Il y est dit que, en bénéficieront « les ouvriers et employés fidèles à leur entreprise »; malheur donc à ceux qui se rebelleraient contre les conditions trop dures qui leur seraient imposées, qui voudraient protester contre des diminutions de salaires ; s'ils partent de l'usine, ils perdront le bénéfice des congés.

Ne seront récompensés par des congés que les travailleurs qui accepteront de s'avilir au point d'accepter toutes les conditions qui leur seront fixées, prime à la servitude, à la trahison de leur classe. L'objectif est de créer au sein de la classe ouvrière une couche spéciale qui serait la masse de manoeuvre du patronat, car c'est parmi les ouvriers « fidèles » que « doivent se recruter les hommes de confiance » pourvus éventuellement du droit de remontrance, et puis l'aveu sans ambages : « Les hommes de confiance doivent être les agents désignés contre la lutte de classes ».

C'est aussi ce que prescrit la loi hitlérienne du 12 janvier 1934 : « Le chef d'entreprise est assisté d'un conseil consultatif de confiance composé de travailleurs faisant preuve de qualités morales exemplaires ».

Pour justifier ces propositions, une promesse démagogique en fin deparagraphe : « Une telle institution servira de point de départ à l'étude des moyens permettant de les associer au sort de l'entreprise ». (Au sort !) mais assurément pas aux bénéfices.

M. de La Rocque est encore là en pleine communauté de démagogie avec Hitler dont le ministre du Travail disait dans un discours en 1934 : « Tous sont désormais unis par un intérêt commun, à savoir l'entreprise, qui leur assure indistinctement à tous un gagnepain ». Suit un article aussi vague que les deux premiers cités sur « l'orientation et l'apprentissage ».

Le point suivant a trait aux assurances sociales ; encore rien de nouveau sur ce sujet, la vieille proposition réactionnaire de la refonte de la loi est reprise avec des termes différents, non pas « mutualité » actuelle, mais d'après les règles mutualistes. C'estàdire non pas capitalisation dans les mains de l'Etat mais dans les mains du patronat qui créerait ses mutuelles. Belle arme, en effet, que posséderaient ainsi les oligarchies pour tenir encore plus sous leur coupe les travailleurs.

Contrairement à l'habitude, dans ce manifeste, les paroles sont plus réservées envers les chômeurs, mais toujours rien de nouveau ni aucune proposition concrète.

Il en est de même sur le paragraphe ayant trait à la protection de l'enfance.

Et voilà le grand cheval de bataille de Casimir, les fonctionnaires. L'Association des Croix de feu réclame « un statut sauvegardant leur dignité », mais elle les prive du « droit de grève ». Voyezvous si elleleur est chère cette dignité, les fonctionnaires seront des hommes enchaînés à l'Etat, des mercenaires n'ayant pas le droit d'émettre leur opinion en dehors du statut fixé.

Hitler, de même, fit inscrire dans les statuts de « l'Union nationale des fonctionnaires allemands » à laquelle l'adhésion de tout fonctionnaire est obligatoire, ce paragraphe : « L'Union a pour but d'éduquer les fonctionnaires en vue de les rendre conscients de la situation sociale d'exécuteurs de la volonté du Führer, s'exprimant dans les lois et les mesures gouvernementales».

Nous avons cherché en vain, soit dans « Service public », soit dans les trois autres factums édités ces temps derniers, quelque chose qui ait trait à la situation difficile des petits commerçants. Mais dans son « manifeste » le chambellan de de Wendel a jugé utile de leur faire quelques promesses : « La législation sur les billets de fonds doit être adaptée aux circonstances présentés par une réévaluation équitable et stable des créances »; par une « réévaluation », encore un mot à double sens.

S'agitil de les réévaluer à un taux inférieur ou supérieur ? Il se garde bien de vouloir préciser, il ne le peut sans danger pour son rôle. Il précise que les principes sont les mêmes pour la propriété paysanne, voilà les travailleurs de la terre qui voient chaque jour s'effriter le patrimoine familial, pour l'édification duquel ils dépensèrent tant d'efforts, informés du bien que leur veulent les représentants de Hitler.

Pour mieux prouver l'intérêt que portent les Croix de feu à leur difficile situation, il est demandé que « les droits successoraux, enligne directe, soient allégés ». Toujours cette démagogie cynique, sous le couvert de défendre les intérêts des couches moyennes ; ils proposent l'allégement des déjà très légendaires charges que supportent les riches.

Rien sur la « clause résolutoire » qui menace les petits commerçants, artisans et paysans, rien contre la patente et les divers impôts qui grèvent ces travailleurs.

Mais il est réclamé au paragraphe suivant, intitulé «impôts», la refonte de l'appareil fiscal au profit des privilégiés de la fortune : « les impôts sur la production étant réduits suivant une cadence aussi rapide que possible».

La Rocque ne veut pas que ses maîtres payent, c'est pourquoi il n'a pas un mot sur les impôts indirects qui écrasent les consommateurs, les travailleurs.

LE CORPORATISME

Nous avons déjà vu que La Rocque, dans le livre qu'il signait, prétendait que la disparition du capitalisme « s'opère d'ellemême ; il faudra la régler ».

Mais après avoir tenté de nier l'existence des 200 familles il repart à la charge pour la défense de leurs intérêts ; il réclame pour elles une plus grande liberté pour qu'elles puissent mieux spolier les travailleurs. « Des mesures légales et réglementaires s'imposent pour rendre aux conseils d'administration le caractère compétent et responsable qu'ils n'auraient jamais dû perdre ».

Ce n'est pas leur donner plus de liberté, que nous voulons, nous,communistes, mais les faire payer et pour cela destituer le Conseil de régence de la Banque de France pour en faire la Banque de la France. Et M. Le comte de saisir le mors aux dents. Il est lui aussi pour que « La Banque de France soit soumise à un contrôle exact et constant de l'Etat ».

C'est modéré, mais affirmé. Cependant deux lignes plus bas nous trouvons la proposition contraire : La Banque de France échappera à la pression officieuse des gouvernements ; toujours la même méthode de la double face.

Dans le programme publié par Hitler en février 1920, nous trouvons au 25è point, ce qui suit :« La formation de chambres corporatives et professionnelles, pour l'application dans chaque pays fédéré des lois générales édictées par le Reich », et le ministre de l'Economie du Reich précisait dans un discours en 1934 la « nécessité de rattacher toutes les entreprises à leur groupe professionnel respectif ». De La Rocque n'a donc rien fait de neuf quand il propose dans son programme « la pièce maîtresse d'un équitable ordre des choses social, économique, sera la « profession organisée ». C'est une copie servile de l'organisation nationale-socialiste.

Sur la question des syndicats et groupements professionnels c'est encore l'esprit d'Hitler. Mais le fascisme français connaissant l'impopularité de ses prédécesseurs prend garde à la formulation dans ses propositions, il écrit :

« Impardonnable serait l'erreur d'ignorer, de supprimer les ressources d'ardeur et d'expérience des syndicats et des groupements professionnels ».II ne veut donc pas les supprimer, mais les transformer, « les ayant débarrassés du virus de la politique de la coalition »; c'est-à-dire en faire des organisations ayant perdu leur caractère d'organisations de défense indépendantes des travailleurs.

Tirant partie de l'expérience du fascisme italien où les syndicats sont réunis nationalement, il vent encore diminuer leur force en les isolant entre eux. « Les syndicats pour jouer leur rôle, doivent être exclusivement professionnels et régionaux... et si une coordination technique s'impose sur le plan national, elle ne doit en aucun cas revêtir un caractère de coalition. »

Vidés de tout leur contenu de lutte, les syndicats deviendront, comme en Italie et en Allemagne, de simples appendices du pouvoir fasciste : « indépendants des alliances politiques révolutionnaires ». Les conflits qui pourront surgir entre les travailleurs et le patronat seront résolus après arbitrage du pouvoir fasciste au service des oligarchies par « l'Etat revêtu de son droit d'arbitrage, de contrôle et de sanction ».

LES CROIX DE FEU CONTRE LA RÉPUBLIQUE

Dans sa brochure « programme », de La Rocque écrit : « Le mouvement Croix de feu ne met pas en cause le régime républicain ». Il est de mode de se teindre en républicain, les pires ennemis de tout jamais de la République nous y ont habitués, M. Le comte ne fait que suivre cette mode.

Pour de La Rocque et ses maîtres, République c'est une formule à bon marché, d'où tout ce qui peut être favorable aux travailleurs doit être banni.

Nous lisons, dans « Service public », sur le rôle de l'Etat : « Il doit servir, mais servir comme un chef ; en travaillant et encadrant ». « Il lui faut la rude autorité, indispensable à l'exécution de sa tâche ». Les 200 familles ont besoin d'un Etat fort pour contraindre le peuple de notre pays à accepter leur politique de misère et d'esclavage et de guerre, d'un Etat fasciste dictatorial qui les sert, « comme un chef »; dans « Service public » elles ne s'en défendent d'ailleurs pas, il est dit :«l'Etat français n'a point à être « totalitaire » ni collectiviste, ni absolutiste, ni libéral » , mais il n'est pas précisé qu'il n'a point à être dictatorial.

Un tel Etat n'est que la copie de l'Etat de Hitler, où l'autorité dictatoriale du « chef » est substituée à celle du gouvernement démocratique.

Au 25è point du programme de Munich, déjà cité, Hitler revendique « la création d'une puissante force centrale du Reich et l'autorité absolue du parlement central politique sur l'ensemble du Reich et sur ses organisations en général ». Nous savons par l'expérience quel rôle joue le Reichstag hitlérien qui est très rarement convoqué et ne l'est que pour entendre les ordres d'Hitler.

C'est un Etat à cette image qu'appelle « république » de La Rocque, avec un Parlement diminué en nombre, trié sur le volet, et dont les membres n'auraient plus qu'un droit, celui d'approuver. En effet, la Chambre serait « dépossédée du droit d'initiative en matière de dépenses ». Les Chambres, Sénat et Chambre des députés, composées des représentants du peuple, quoique élues à deux degrés différents, ne possèdent que le pouvoir législatif.

Suivant les propositions du fasciste de La Rocque, parlant au nom de ses maîtres, les 200 familles, elles, ne posséderaient plus ce droit. Le pouvoir serait exercé par « un chef de la nation, mandaté pour une période portant au moins sur deux législatures successives, nanti du droit de dissolution et responsable du choix des ministres », pouvoir législatif et exécutif, il aurait pour l'aider : « Un premier ministre pourvu du droit de contreseing... Six ou sept ministres au maximum, individuellement responsables », et enfin un organisme représentant la « profession organisée».

« Véritable conseil d'Etat économique, il examinera les lois en instance de publication, émettra ses avis obligatoires, etc. ». C'est là bien un programme copié sur celui du pouvoir dictatorial, le plus hideux, le plus féroce, le fascisme hitlérien.

Cette copie est si évidente que, prévenant les constatations qui ne manqueraient pas d'être faites, de La Rocque a jugé bon de se prémunir contre l'accusation de fasciste qu'il sait être si impopulaire. Pour cela il tente de décharger Hitler : « Il n'est véritablement de fascisme que celui du Duce », dit-il.

AGENTS D'HITLER

En matière de politique extérieure et en particulier sur les dangers de guerre menaçants, M. Le comte est dans ses brochures très discret. L'on trouve bien dans son manifeste des attaques contre l'U.R.S.S., mais c'est en vain que nous avons cherché un mot de réprobation sur le coup de force d'Hitler, mais pire, la S.D.N. Ayant ces temps derniers gêné un tant soit peu les manoeuvres d'Hitler, La Rocque en fidèle valet du fournisseur d'Hitler en minerai, et digne descendant des émigrés de Coblentz, traîtres à leur pays, part en guerre contre la S.D.N.

Il est plus loquace dans la brochure programme parue antérieurement au manifeste ; il y réclame comme les autres fascistes français, agents d'Hitler dans notre pays, la capitulation devant la réoccupation de la Ruhr. Servile agent, il se fait aussi l'écho de l'argument de la menace révolutionnaire en France.

Citons, c'est plus précis : «  Le maintien de la paix européenne dépend en grande partie de nos rapports avec le Reich. Faut-il donc causer avec les Allemands ? Oui. Mais à la condition d'être d'abord maîtres de nous mêmes, d'avoir mis fin chez nous aux entreprises révolutionnaires ».

DIVISEURS DE LA NATION

itler est bien défendu par le valet de son fournisseur ; réellement La Rocque a toutes les qualités pour satisfaire aux intérêts de ses maîtres. Ce sont ces gens là qui osent parler de « Réconciliation française » dans la fin du manifeste, eux qui se font en France les agents de propagande d'Hitler, eux qui veulent instaurer dans notre beau pays le fascisme hideux, pour pouvoir mieux permettre aux vampires des 200 familles d'en exploiter les richesses et le peuple, eux qui chaque jour prêchent la guerre civile entre Français, telles ces paroles de de La Rocque prononcées le 5 novembre 1935 : « Le Congrès radical, le pipard Herriot, je m'en f... Nous sommes prêts. Il fallait une organisation solide, nous l'avons, les consignes sont passées, les chefs sont alertés. Pas de sacrifices inutiles ! Il faudra verser le moins de sang possible. » N'est ce pas à Alger aussi, en juin 1935, qu'il s'écriait : « que si M. Daladier prenait le pouvoir, on ferait du sport ».

Et cette menace toute dernière qu'il a faite dans un discours à ses dispos : « Les mois qui vont venir vont être décisifs. Je vous convoquerai à nouveau en février à la dernière minute ». (Janvier 1936.)

Ce sont ces gens là qui parlent d'ordre, d'union de la nation tout en provoquant à l'assassinat, tel ce Croix de feu du 18è arrondissement de Paris, émule du provocateur Maurras, qui disait : « Un ministre a dit : Blancs, jaunes ou noirs, tous les hommes ont le sang rouge. Mais oui, Monsieur Herriot, les cochons aussi, et vous même d'ailleurs ». Veut on, oui ou non, appliquer la loi de dissolution votée à ces provocateurs qui fusillèrent les travailleurs de Limoges, qui, le 23 mars, à Douvrin (Pas-de-Calais), tendent une embuscade au camarade Cartignies et l'assomment ?

A Port-Lyautey (Maroc), le 22 mars, une cinquantaine de personnes sont blessées après une attaque contre une contremanifestation du Front populaire.

A Tarbes, à Sartrouville, le 3 avril, ils provoquent des bagarres et blessent des travailleurs.

Pour les mercenaires des oligarchies, l'union de la nation c'est la soumission du peuple de France aux volontés de leurs maîtres de France et de l'étranger.Qu'attendent Guernut et Zay pour exiger que soit appliquée la loi à l'armée de la tête de mort, à qui, cela est prouvé, Hitler fournit matraques et mitrailleuses Mauser.

Laissera t on ces agents des 200 familles et de l'étranger mettre leurs menacés à exécution pour prendre les mesures qui s'imposent : l'arrestation de de La Rocque et de ses bailleurs de fonds, la dissolution de ses troupes de mercenaires.

On pourrait le croire devant la passivité dont fait preuve le gouvernement Sarraut.

Que de La Rocque et ses maîtres soient assurés que nous, communistes, sommes décidés à ne pas laisser jeter le peuple de France dans l'esclavage, la misère et la guerre.

Nous seuls, communistes, sommes des lutteurs conséquents pour l'union des travailleurs de France, nous qui voulons les unir sans distinction d'opinions ou de tendances, athées et croyants, travailleurs trompés par la démagogie réactionnaire et fasciste, travailleurs de gauche et travailleurs révolutionnaires, parce que tous ils subissent l'oppression de la minorité de parasites que sont les oligarchies. Pour réaliser cette tâche grandiose, il nous faut être constamment à la pointe du combat, être l'exemple pour tous.

Que, dans cette campagne, nous nous efforcions d'élargir toujours plus le Front populaire ! Constituons partout des comités de masse, avec des directions élues par elle ! C'est là la seule arme efficace qui puisse nous permettre de battre les 200 familles et leurs troupes fascistes, de donner au peuple de France, le Pain, la Liberté et la Paix.