21 oct 2014

Trotskysmes et néo-socialismes français - 7e partie : les néo-socialistes comme 5e colonne au sein du Front populaire

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Les néo-socialistes, une fois quittée la SFIO, formèrent le « Parti Socialiste de France – Union Jean Jaurès ». C'est tout à fait cohérent avec l'idéologie de Jean Jaurès, sauf que bien évidemment l'idéal socialiste devenait une réalisation purement technocratique.

Cela ne permettait pas de construire un large parti « populaire ». Les néo-socialistes disposaient de 23.000 membres en mai 1934, et seulement 12.000 six mois plus tard, et 7.400 à la fin de l'année 1936.

D'ailleurs, la notion même de parti disparaissait ; le manifeste de la nouvelle organisation parlait ainsi de la « faillite des partis politiques caducs, prisonniers d'oligarchies financières ou de comités bavards ».

En pratique, le nouveau parti est un surtout un agrégat d'élus et de propagandistes, associés à des responsables « planistes » fournissant des revendications secteur par secteur, sur une base corporatiste.

Cette tendance de plus en plus ouverte à la fascisation n'alla pas sans contradictions : Adrien Marquet, qui participa « à titre personnel » au gouvernement d'alors, fit défiler au second congrès du parti en mai 1934 une équipe en chemises grises, avant finalement de quitter le parti lui-même.

Mais elle ouvrit la porte aux syndicats, aux responsables syndicaux tendant eux-mêmes au corporatisme, comme René Belin, pratiquement le numéro deux de la CGT (et futur ministre du travail du premier gouvernement de Pétain, ainsi que rédacteur alors de la « Charte du travail »), ou encore Georges Dumoulin, secrétaire général de l'Union départementale CGT du Nord (alors militant antiraciste et futur apôtre de la collaboration, sur la base d'un antisémitisme forcené).

Les syndicats, de par leur forme, correspondent aux attentes des planistes, puisqu'il s'agit d'une sorte d'organisme social à la fois capitaliste et socialiste. Les syndicats doivent ainsi participer de plain-pied au plan et les néo-socialistes participèrent dans cette perspective au Front populaire.

Pour cela, le « Parti socialiste de France – Union Jean Jaurès » s'est allié à deux autres scissions de la SFIO : le « Parti socialiste français » et le « Parti républicain-socialiste », dans une « Union socialiste républicaine » qui échoue aux élections de 1936 (29 députés contre 45 auparavant en additionnant ceux des partis la composant) mais participe au gouvernement du Front populaire.

Les néo-socialistes sont ici une véritable cinquième colonne, au service de la transformation du Front populaire en « Front national », comme Marcel Déat l'explique par ailleurs ouvertement dans Le Front populaire au tournant, en 1937 :

« Nous souhaitons, certes, et depuis longtemps que le Front populaire « s'élargisse en Front national », que le Rassemblement populaire devienne celui de la quasi-totalité de la nation.

Mais justement, pour qu'il en soit ainsi, encore faut-il que la majorité elle-même ne perde pas son axe et ne gaspille pas ses forces en querelles internes. Quelles que soient les erreurs tactiques ou doctrinales de tel ou tel groupement appartenant au Rassemblement populaire, il reste que ce grand mouvement déborde les cadres traditionnels des partis, et qu'il exprime avec force les aspirations justes et saines des masses françaises, des producteurs français, de ce prolétariat et de ces classes moyennes, dont l'alliance définit assez bien le Front populaire lui-même. »

Après la vague du Front populaire et alors que les négociations sociales se poursuivent, la petite-bourgeoisie s'organisa sous l'égide tout d'abord du « Comité confédéral des syndicats de classes moyennes » en novembre 1937, devenant en janvier 1938 la « Confédération générale des syndicats de classe moyenne », regroupant nombre de professions libérales (bouchers, pharmaciens, etc.), des cadres et des membres de la maîtrise, revendiquant pas moins de trois millions d'adhérents au sein de 18.000 syndicats de base.

Son journal tirant à 50.000 exemplaires, Front économique, est conquis par les néo-socialistes, qui ont l'hégémonie sur l'émission de radio diffusée nationalement de manière hebdomadaire.

Leur ligne est d'appuyer l'anti-communisme de l'intérieur même du Front populaire, telle une cinquième colonne, en s'appuyant sur la petite-bourgeoisie, en poussant vers le corporatisme.

Mais à l'extérieur, un autre parti du même type agit : le « Parti Populaire Français », de Jacques Doriot.