Le radical-socialisme écrase le 77e congrès du Parti Socialiste
Submitted by Anonyme (non vérifié)Ce week-end, le Parti Socialiste a tenu son congrès, le 77e, ce qui est un événement pour notre pays : c'est un parti issu historiquement du mouvement ouvrier, portant des valeurs encore considérées comme un espoir par bon nombre de personnes progressistes en France.
Pourtant, le Parti Socialiste n'est pas un parti réformiste assumant des transformations profondes réalisées par les institutions, comme avait pu le prétendre Jean Jaurès.
Pour preuve, on a ce qu'a osé faire le premier ministre Manuel Valls. Il a quitté le congrès du Parti Socialiste pour rejoindre, tous frais payés par l’État, un match de football à Berlin : la finale de la Ligue des Champions entre le FC Barcelone et la Juventus de Turin.
Puis, il est revenu à Poitiers, assister au congrès, pour finalement repartir aussi sec… assister à Paris à la finale hommes du tournoi de tennis de Roland Garros.
C'est malsain, typique d'un comportement de grand bourgeois, que Manuel Valls a justifié en soulignant son statut de premier ministre, une pseudo réunion avec les instances du football à Berlin, la passion du football avec notamment ses origines catalanes (le cousin de son père ayant écrit l'hymne du FC Barcelone), etc.
Il y a là quelque chose de très grave qui, bien sûr, ne peut que renforcer le Front National. Autant de suffisance insulte les masses. On aurait tort, cependant, de considérer comme le font les anarchistes et les trotskystes, que le Parti Socialiste « trahirait ».
C'est là une analyse absolument fausse. Manuel Valls et François Hollande ne sont pas des socialistes dans une variante libérale. Ce courant existe en dehors du Parti Socialiste, par exemple dans le mouvement « la Gauche Moderne », passé chez Nicolas Sarkozy en 2007 avec Jean-Marie Bockel.
Manuel Valls et François Hollande ne sont pas non plus des néo-socialistes, c'est-à-dire des « planistes » pratiquement fascisant ou fascistes. Pour cela, on a Ségolène Royal, ou encore Arnaud Montebourg qui prône un nationalisme social autour du thème du « made in France », signant avec le banquier Mathieu Pigasse une tribune dans le Journal du Dimanche le jour de la fin du congrès du Parti Socialiste.
Le banquier Mathieu Pigasse a d'ailleurs été le conseiller économique de SYRIZA en Grèce ou d'Hugo Chàvez au Venezuela : on comprend que Jean-Luc Mélenchon vient de l'appeler lui et Arnaud Montebourg à le rejoindre au Parti de Gauche.
Manuel Valls et François Hollande ne sont rien de tout cela. Ce qu'ils sont, en réalité, ce sont des radicaux-socialistes : des républicains favorables à des mesures sociales et au renforcement de la laïcité, se posant comme les garants des institutions face au « capitalisme financier », comme l'explique la « Lettre au peuple de France », adoptée lors du Congrès de Poitiers.
Ces « radicaux-socialistes » oscillent entre une ligne traditionnellement très proche de la franc-maçonnerie historique et une ligne ouvertement post-moderne (par ailleurs soutenue par une partie de la franc-maçonnerie). Ce sont des gestionnaires, reconnaissant pleinement les institutions, des démocrates-chrétiens en version laïcs.
Ils ne peuvent pas « trahir » alors qu'ils n'ont jamais prétendu avancer vers le socialisme. Si les trotskystes et les anarchistes (ou les pseudos « maoïstes », etc.) pensent pourtant cela, c'est simplement parce que ce sont des petits-bourgeois tentant de pousser le Parti Socialiste « vers la gauche ».
La position communiste est toute autre : voir en François Hollande et Manuel Valls des radicaux-socialistes, et non des socialistes, permet justement de ne pas avoir d'illusion et d'œuvrer au développement idéologique, culturel, politique, d'un Parti Communiste de France authentique.
Notons ici que les socialistes qui se revendiquent comme des « frondeurs » ne sont pas plus des socialistes au sens strict : ce sont en fait des sociaux-démocrates. Ils n'ont pas comme objectif le « socialisme », mais des avancées sociales, dans un esprit plus directif, comme en témoigne la position de Laurent Fabius il y a dix ans lors du référendum sur la constitution européenne, où il avait appelé à voter « non », ou l'incapacité de Christian Paul et Emmanuel Maurel, meneurs des « frondeurs », à assumer une rupture culturelle et idéologique nette avec François Hollande.
La raison en est bien sûr… la lutte des places. Sortir du Parti Socialiste, c'est perdre des mandats électoraux, risquer l'insignifiance. Mieux vaut rester au chaud, quitte à nier la réalité. Voici ce qu'a pu dire par exemple Emmanuel Maurel lors du congrès socialiste de Poitiers, qui a duré trois jours :
« Il y a une chose que nous ne laisserons pas faire, c'est laisser imposer au parti de Jaurès et de Blum une mue sociale libérale dont nous ne voulons pas. Vous nous trouverez sur sa route, pour empêcher une évolution qui nous mènera à la défaite et au déshonneur. »
Or, la mue s'est déjà déroulée ; le déshonneur est sur le Parti Socialiste depuis longtemps : à partir du moment même où il abandonné sa prétention à « changer la vie », au début des années 1980. Faut-il rappeler que l'actuel ministre de l'économie, Emmanuel Macron, est un ancien de la banque Rotschild et qu'il n'a même pas sa carte au Parti Socialiste ?
Comment se fait-il qu'un Parti prétendant changer les choses en profondeur n'assume même pas la responsabilité d'un tel ministère ? C'est là une sacrée preuve de faillite. Quelle ironie de voir alors l'ancien trotskyste et actuel secrétaire du Parti Socialiste, Jean-Christophe Cambadélis, osé affirmer que :
« Quand on est socialiste, il faut vouloir changer le monde, ou bien il faut changer de parti. »
C'est là tout à fait vain. Comment un parti pourrait changer le monde alors qu'il délègue le poste de ministre de l'économie et qu'il laisse le premier ministre aller en jet privé assister à un match de football en plein congrès, tout cela avant de côtoyer les bourgeois lors de « leur » fête qu'est Roland Garros ?