9 juil 2014

Des ex- "chasseurs de skins" rejoignent Alain Soral : l'effondrement de l'antifascisme radical

Submitted by Anonyme (non vérifié)

C'est un coup très dur que l'extrême-droite vient de porter à la scène anarchiste. « Egalité et réconciliation », la structure d'Alain Soral, a en effet mis en ligne une vidéo d'interview de 30 minutes présentée de la manière suivante :

Antifa : mise au point
Entretien avec Kim et Mhedy, ex-chasseurs de skins
Kim et Mhedy, deux chasseurs de skins durant les années quatre-vingts, reviennent sur leurs parcours et développent un regard critique sur la mouvance « antifa ».

Cette vidéo est une catastrophe pour le mouvement anarchiste. En effet, cela fait très peu de temps que les anarchistes ont décidé de mettre en place une idéologie « antifa ». Auparavant, les anarchistes refusaient de prendre au sérieux la question du fascisme, ils pratiquaient un boycott général des positions du PCMLM ou y ressemblant, car le PCMLM expliquait dès 2005 que le Front National allait énormément progresser.

Comme exemple représentatif, on peut prendre celui d'une personne ayant jeté une centaine d'autocollants « Action antifasciste » à la poubelle une fois qu'on lui ait dit qu'il s'agissait de maoïstes ; quelques années après, le terme et le logo étaient assumés un peu partout en France, de manières très différentes et par des gens très différents !

Le problème est que cet antifascisme, dans une majorité des cas, est idéologiquement un anti-antifascisme. C'est le paradoxe. Car l'antifascisme signifie le front antifasciste, le concept a été développé par les communistes, avec le Front populaire ne France, l'action antifasciste en Allemagne.

Or, les anarchistes, tout comme les trotskystes, sont contre l'antifascisme, qui est pour eux une trahison de la révolution. L'antifascisme anarchiste consiste donc à se dire « antifa » mais à combattre « tous les fascismes », avec des listes plus ou moins longues (capitalisme, racisme, âgisme, validisme, homophobie, arabophobie, islamophobie, homophobie, lesbophobie, etc. etc.).

Il ne s'agit pas d'une ligne antifasciste, qui justement dit : progressistes, faisons des compromis et unissons-nous à la base contre le fascisme, pour que dans les masses les bonnes valeurs se diffusent, que les mauvaises valeurs régressent.

La ligne de l'antifascisme dit « radical » est en pratique le reflet de l'idéologie post-moderne qui rejette la lutte des classes et voit tout du point de vue individuel, avec des « oppressions » dérangeant l'individu et représentant un phénomène isolé. Jamais il n'est parlé du système en général, des classes sociales, du mode de production, de la lutte des classes.

Cette idéologie post-moderne « contre tous les fascismes » - donc au lieu de l'antifascisme comme front démocratique face au fascisme – est inévitablement portée par des couches petites-bourgeoises, avec des intellectuels liés aux universités et leur esprit bourgeois « radical ».

De manière intelligente, l'extrême-droite est donc allée taper là où cela fait mal. En effet, des jeunes des quartiers populaires ayant rejoint hier le mouvement antifasciste ne peuvent pas assumer le hold up fait par les anarchistes sur le terme « antifa ». Ils ont rejoint un mouvement populaire et progressiste, de manière objective. Ils ne veulent pas voir l'histoire réduite à un « antifascisme radical », une ligne « ultra » qui n'a jamais été ce en quoi ils se sont investis.

Alors, afin de bloquer une critique de gauche, « Egalité & réconciliation » a lancé une critique de droite, afin de liquider le terme même d'« antifa ».

Et cela marche, car les anarchistes ont nié la dimension idéologique de l'antifascisme des années 1980. Les SCALP – sections carrément anti-Le Pen – ont été portées par les masses, il y avait de vraies dynamiques idéologiques, bien que des gens comme ceux de la revue REFLEX, déjà, tentait de réduire cela à un antiracisme très basique.

Le mouvement « antifasciste » des années 1980 est inconcevable sans voir la force de frappe du Parti « Communiste » français, encore extrêmement puissant alors, lançant des campagnes pour Nelson Mandela. Les « redskins » en étaient souvent proches.

Et quand on parle de « redskins », on parle de gens non pas vraiment skinheads (mais de gauche), mais plus un mélange skinhead – rock alternatif – squatt, avec des coupes de cheveux à la Tintin en quelque sorte (tondu mais avec une petite houpette).

Une organisation ayant une profonde influence également était le « Parti Communiste Internationaliste » (le futur Parti des Travailleurs, devenu par la suite le Parti Ouvrier Indépendant). C'est la raison faisant que telle personne sénatrice socialiste peut avoir un service d'ordre redskin à la petite fête de sa victoire.

Le coup intelligent de l'extrême-droite a été de profiter de cette négation idéologique pour former un « front populaire » de droite, disant à telle ou telle frange de gens : nous on va dans le bon sens et on est prêt à vous reconnaître.

C'est cela que devrait faire un vrai mouvement antifasciste : traiter du mouvement des masses à la base, car ce sont les masses qui ont porté l'antifascisme des années 1980, pas des individus en particulier. Ce sont les masses qui font l'histoire.

L'extrême-droite intervient alors pour passer par là pour casser l'antifascisme. N'étant pas communistes, Kim et Medhy, en l'occurrence, ont répondu positivement à cet appel réactionnaire. Mehdy a expliqué grosso modo qu'il était contre les racistes, car il était d'origine immigrée, mais que sur le plan culturel il était conservateur, voire même en fin de compte « nationaliste » comme il le dit.

Quant à Kim, un personnage ayant été en première ligne dans la seconde partie des années 1980 contre les gangs fascistes, il a abandonné sa posture guerrière d'il y a quelques années pour exprimer une « sagesse » de papa tout à fait conservatrice, se demandant ce qu'il faisait là souvent dans la vidéo, mais lançant des appels humanistes contre les oppressions, à ceci près qu'il nie la lutte des classes pour expliquer le monde au moyen des délires sur « l'oligarchie », avec une logique antisémite sur les « juifs ashkénazes » contrôlant le monde, etc.

En clair, cela donne deux personnes donnant leur point de vue qui est un terrible mélange d'irrationalisme, de sincérité et de mauvaise foi, de morale populaire et de philosophie de comptoirs... Bref, ce qui relève du fascisme. Et il faut bien avoir conscience que ces deux exemples ne sont la face émergée de l'iceberg : derrière, nombreuses sont les couches sociales contaminées !

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