Nouvelle « manif pour tous » en pleine offensive de la réaction
Submitted by Anonyme (non vérifié)« Nous sommes au seuil des années 1930 » annonçait le PCMLM : les faits sont têtus et démontrent qu'en effet telle est la situation. La grande offensive culturelle-idéologique de la réaction a en effet réussi hier son pari hier, et cela doublement.
C'est en effet une nouvelle « Manif pour tous », en plein hiver, longtemps après la première grande vague de mobilisation de ce type.
Cela donne, déjà, une vraie force militante qui s'est affirmée avec plusieurs centaines de milliers de personnes à Paris (80 000 pour la police – 500 000 selon les organisateurs, pour reprendre les chiffres « officiels »), ainsi qu'entre 20 et 40 000 à Lyon, en présence de l'archevêque de Lyon, le cardinal Philippe Barbarin, et le recteur de la Grande Mosquée de Lyon, Kamel Kabtane.
Une claque de plus pour le camp du progrès
Une claque de plus pour le camp du progrès, forcément plombé par la social-démocratie. Car non seulement Hollande, avec ses tromperies faussement sentimentales, décrédibilise moralement la gauche « en général », mais en plus la social-démocratie pratique le déni : il n'y aurait pas de « théorie du genre », seulement des études sociologiques et une lutte contre le sexisme.
Cela est totalement ridicule, quand on connaît la vigueur idéologique des courants post-modernes, porté par tout un secteur moderniste de la bourgeoisie, et dont justement le Parti Socialiste est le représentant.
Nous assistons à un choc inter-bourgeois particulièrement violent, une expression brutale de la crise capitaliste au sein même de l'Etat, qu'il est impossible de nier.
Ce n'est cependant pas tout. Car cette manifestation a un pendant : celle de la semaine dernière, « Jour de colère », dimanche 26 janvier. Hier, c'est la bourgeoisie conservatrice « tranquille » qui manifestait, la semaine dernière, c'était le secteur petit-bourgeois avec son antisémitisme virulent et ses slogans comme « Juif casse-toi la France n'est pas à toi », « CRS milice des Juifs ».
Le fascisme présente, de manière typique, son visage multiple. Au modernisme démocrate bourgeois traditionnel, il présente une série de monstres se combinant et s'opposant. Entre hier dimanche 2 février et dimanche dernier 26 janvier, il y a ainsi une différence de « style ».
Aucune arrestation n'a donc eu lieu hier, à part une douzaine de fascistes de manière « préventive », alors qu'il y en a eu 250 la dernière fois, avec des peines avec sursis ridicules quand il y en a eu (montrant par ailleurs bien que les tribunaux sont forcés de reculer dès qu'une expression politique radicale s'exprime de manière frontale dans ce contexte explosif).
La réaction prend le dessus et la ligne doit être tracée
L'activisme du moment est clairement d'extrême-droite, l'agitation est populiste, l'heure est à la réaction. Il faut donc des garde-fous idéologiques et culturels pour protéger la cause du progrès. Ceux-ci ne s'improvisent pas. Seul le Parti Communiste muni du matérialisme dialectique a les moyens de produire cela.
Sans cela, on tombe dans le relativisme et le spontanéisme.
Ainsi, les bonnets rouges, apparus en Bretagne, un des vecteurs de la manifestation de dimanche dernier, sont une composante éminente de la réaction. Et pourtant, lors de leur apparition, une partie significative de l'extrême-gauche - surtout en Bretagne - a parlé de mouvement populaire, de type contradictoire, qu'il fallait soutenir et dépasser, etc.
Dieudonné, propageant le harcèlement antisémite depuis des années, doit être stoppé. Et pourtant lors de la vague progressiste pour le casser, il y a eu un discours d'ultra-gauche qui s'est développé, selon lequel le phénomène Dieudonné serait à relativiser, à mettre sur le même plan que le ministre de l'intérieur Manuel Valls à ce moment-là.
Pourtant, quand Manuel Valls affirme qu'il faut « se rebeller contre l'infâme », il est un allié objectif face à l'ennemi fasciste lorsque celui-ci est principal. L'enseignement de Mao Zedong est très clair : il y a un seul aspect principal, même s'il peut changer selon les moments.
Il faut donc étudier les moments où le fascisme est la menace principale, les moments où inversement la social-démocratie est l'ennemi principal car appuyant en fait le fascisme.
Les réactions unilatérales de l'extrême-gauche ne montrent qu'une chose : qu'elle est devenue une ultra-gauche ou bien un appendice de la social-démocratie.
L'extrême-gauche décomposée et ses contradictions
Il est significatif que l'extrême-gauche s'effondre : elle est petite-bourgeoise et siphonnée par l'extrême-droite qui produit des anticapitalismes romantiques de remplacement, plus adaptés à la situation. Il y a ainsi un puissant sas menant à Alain Soral, qui recrute largement dans toute la scène anarchiste anti-marxiste.
L'autre aspect est la dimension toujours plus réformiste des restes décomposés de l'extrême-gauche. Il y a dix ans, le syndicat CNT se posait comme un projet d'avenir radical et populaire ; aujourd'hui ses restes pratiquent un réformisme de survie, ce qui donne même à Metz une participation électorale aux municipales.
Même si l'on considère que dans ce dernier cas il y a la possibilité de l'affirmation locale d'un pôle radical, il est flagrant qu'il est politiquement malhabile s'intégrer au système au moment où les « anti-systèmes » sont à l'offensive.
Il y a ici une incompréhension fondamentale du fascisme et de l'antifascisme. L'antifascisme historique et authentique est en effet une stratégie de Front populaire proposée par les communistes avant de contrer le fascisme dans sa quête de pouvoir – le fascisme considéré comme tendance dominante dans un capitalisme en crise.
Or, anarchistes et trotskystes refusent cela, au nom du rejet de la « collaboration de classe ». De plus, pour les anarchistes et les trotskystes, il n'y a pas de crise générale du capitalisme, il n'y a pas de tendance fasciste générale, simplement des mouvements fascistes éparpillés composés de gangsters espérant se vendre si possible à la bourgeoisie. C'est le concept de fascisme comme gangrène.
C'est une erreur complète, qui empêche de générer des fronts authentiquement progressistes.
L'antifascisme lutte contre le fascisme, pas contre « les » fascismes
Dans un même esprit, on retrouve une manifestation à Paris le 9 février, au nom de l'antifascisme et en allusion à la tentative de coup d'Etat fasciste le 6 février 1934 en France.
C'est une initiative très intéressante, parce qu'elle révèle tout de « l'antifascisme » récent mis en avant par des anarchistes et des trotskystes.
Cela donne un appel très parlant :
« nous nous inscrivons dans le prolongement des mobilisations d’hier contre toutes les formes de fascismes : manifestations contre les ligues fascistes en 1934 ; celles des lycéens et étudiants contre les nazis et Vichy en 1940 ; mobilisations contre le colonialisme et l’OAS dans les années 1950 et 1960 ; pour le droit des femmes à disposer de leurs corps dans les années 1970 ; pour l’égalité des droits et contre les crimes racistes et sécuritaires dans les années 1980 ; pour l’ouverture des frontières et le soutien aux sans-papiers dans les années 1990 ; contre la violence de l’extrême droite dans les années 2000, pour la solidarité internationale… »
Prenons chaque étape et voyons simplement les contradictions :
* « manifestations contre les ligues fascistes en 1934 » : c'est le Parti Communiste SFIC, dont le PCMLM se revendique, qui a assumé cette tâche avec les travailleurs socialistes, et cela a donné le Front Populaire – que justement anarchistes et trotskystes refusent.
* « celles des lycéens et étudiants contre les nazis et Vichy en 1940 » : c'est le Parti Communiste SFIC, dont le PCMLM se revendique, qui a assumé cette tâche dans un esprit d'unité patriotique, et cela a donné la Résistance - que justement anarchistes et trotskystes refusent.
* « mobilisations contre le colonialisme et l’OAS dans les années 1950 et 1960 » : formulé ainsi, on pourrait croire que Charles De Gaulle était un progressiste, alors qu'en réalité le colonialisme s'est simplement transformé et modernisé, l'Algérie étant par exemple passé de coloniale à semi-coloniale semi-féodale.
* « pour le droit des femmes à disposer de leurs corps dans les années 1970 ; pour l’égalité des droits et contre les crimes racistes et sécuritaires dans les années 1980 ; pour l’ouverture des frontières et le soutien aux sans-papiers dans les années 1990 » : aussi progressiste que cela soit, il n'y aucun rapport avec le fascisme comme mouvement ultra-réactionnaire entendant prendre le pouvoir d’État pour exercer une dictature terroriste.
* « contre la violence de l’extrême-droite dans les années 2000 » : ce qui caractérise pourtant les années 2000, c'est justement la faiblesse de cette violence par opposition à comment elle ne cesse de grandir désormais.
Il y a également ce qui manque. Il est significatif que manque l'opposition au coup d'Etat de 1958 (qui a donné naissance à la Ve République) ou encore le mouvement populaire suite à l'action fasciste à Carpentras.
Or, historiquement, ce sont deux moments essentiels de l'antifascisme. Déjà parce que justement la Ve République un régime ultra-autoritaire et plébiscitaire et que l'antifascisme a échoué : cela a été un moment essentiel où le Parti Communiste devenu révisionniste a d'ailleurs totalement capitulé.
Ensuite, parce que le mouvement suite à la profanation de Carpentras a été très large et a véritablement cassé la dynamique du Front National, dans le prolongement de SOS Racisme et des SCALP (Section Carrément Anti-Le Pen).
Vers un mai 2014 fasciste ?
Le mouvement de fascisation n'est pas prêt de s'arrêter. Tout va continuer et s'accélérer, le sang va couler inévitablement car le fascisme est assassin. La situation va inévitablement empirer.
Prendre conscience de cela est le point de départ d'une affirmation progressiste réaliste. En effet, l'extrême-droite travaille ses fondamentaux depuis des années. Sur les plans culturel et idéologique, il y a eu un travail gigantesque.
Pendant ce temps-là, l'extrême-gauche anarcho-trotskyste anéantissait ses rares positions obtenues – souvenons-nous quand elle était à la mode, lorsqu'un de ses membres gagnait Loft Story, que la CNT rassemblait des milliers de gens dans ses cortèges, qu'Olivier Besancenot était superstar et que « L'insurrection qui vient » était un best-seller parisien !
Il faut donc payer la facture, qui va être salée. On ne triche pas avec l'histoire ; la cause du progrès exige des efforts, des sacrifices. En l'absence de cela, c'est le fascisme qui triomphe.