7 fév 2014

Positions révélatrices sur le 80e anniversaire du 6 février 1934

Submitted by Anonyme (non vérifié)

Les réactions à l'anniversaire du 6 février 1934 révèlent un important fond politique. En effet, comment s'étonner que, par principe, la bourgeoisie nie le fait qu'il y ait une tentative de coup d'Etat.

Février 1934 : un coup de force que la bourgeoisie tente de nier

Dans Libération, on trouve ainsi une interview de l'historien Olivier Dard, professeur à la Sorbonne, qui explique :

« Contrairement à ce qu’ont pensé les contemporains de gauche, il ne s’agissait pas d’un coup d’Etat fasciste. Mais ce ne fut pas non plus une simple manifestation. »

Cela ne veut bien entendu rien dire, cependant il s'agit pour cet historien à la solde de la bourgeoisie de masquer la violence des événements de février 1934. On voit mal en effet comment il serait possible de nier le fait que des milliers de fascistes souvent armés tentant de prendre d'assaut le parlement, cela correspond par définition au principe du coup de force...

Un gouvernement, un régime même, pourrait-il tenir avec un parlement bloqué, fermé ? Non, bien entendu, à part apparemment pour ce professeur de la Sorbonne.

Il faut dire qu'il y a un aspect ici très important : en France, à part avec l'historien Zeev Sternhell, on ne considère jamais qu'il y a eu dans notre pays des mouvements fascistes.

Dans Le Figaro, on a une interview de l'historien Nicolas Lebourg, qui s'empresse de dire que les « Croix de feu » ont été « injustement considérées par beaucoup comme une forme de fascisme ».

Un mouvement nationaliste qui possède des sections armées, et même des avions, et veut instaurer un régime « autoritaire » ne serait donc pas fasciste ! Que serait-il alors ? On a ici une hypocrisie complète.

Et cela se lit dans une réponse très intéressante de ce même historien, quant au parallèle entre 1934 et les « rébellions » actuelles du type bonnets rouge et Cie. Son explication est très parlante :

« On retrouve, en revanche, dans les manifestations actuelles, une dévaluation de l'État républicain et un rejet viscéral de l'humanisme égalitaire, soutenus par un faisceau de structures issues de l'extrême droite radicale. Il y a un climat dur, et la violence des slogans antisémites dans le cortège «Jour de colère» est saisissante. Mais le problème pour les activistes les plus déterminés c'est qu'il n'y a aujourd'hui pas d'appareil pour diffuser leurs conceptions dans la population, ni de projet structurel, contrairement à 1934. »

Ce qui revient à dire : il y avait des fascistes en février 1934, et aujourd'hui une fraction de la « rébellion » populiste veut refaire la même chose. Et c'est en contradiction avec ce que dit l'historien par ailleurs sur l'absence de gravité des événements de 1934...

Les contorsions des révisionnistes du P « C »F et des trotskystes

Raconter l'histoire du 6 février 1934 est particulièrement difficile pour les révisionnistes du P « C » F et les trotskystes.

Pour les premiers, il y a le problème que le Parti Communiste était alors un parti de cadres, se revendiquant du matérialisme dialectique et bataillant pour mener la révolution socialiste, l'instauration de la dictature du prolétariat.

Pour les seconds, il y a lieu de cacher à tout prix le refus de l'antifascisme et du Front populaire.

Les différentes publications proches du P « C » F, comme l'Humanité ou Regards, ont donc multiplié les appels à l'unité de la gauche, dont février 1934 serait un exemple... tout en précisant bien, comme l'a fait l'éditorial de l'Humanité, que :

« Le monde d’aujourd’hui ne ressemble en rien à celui des années trente. »

Roger Martelli, ancien membre de la direction du P « C » F, s'empresse lors d'une interview à l'Humanité de bien cadrer toute réflexion :

« Le glissement du PS ouvre un problème énorme, celui de la tentation du renoncement. Il faut changer de cap, créer une dynamique sans le fétichisme des formes anciennes. »

Dans la revue Regards, le même Roger Martelli s'est occupé de publier un article intitulé, dans un même sens, « Février 1934. Laissons la nostalgie au vestiaire ». Car la panique des révisionnistes est bien là : alors que tout ressemble aux années 1930, comment justifier la révision des enseignements fondamentaux du communisme ?

Les révisionnistes ont la lourde tâche de défendre le Front populaire, tout en niant que cela procède d'une définition communiste de type orthodoxe, dans le cadre de l'Internationale Communiste, notamment du cinquième congrès...

Les trotskystes ont quant à eux une tâche inverse : tenter de s'approprier le mouvement populaire du Front populaire, tout en rejetant le Front populaire. Ce qui forme une contradiction insoluble.

Le 6 février 1934 est en effet un moment essentiel de l'histoire de France, puisqu'il est le début du Front populaire. Il serait en effet erroné de penser qu'il y a eu d'abord l'unité à la base des travailleurs, puis au final un accord électoral aux élections de 1936. C'est l'unité à la base qui est le Front populaire : toute analyse historique un tant soit peu sérieuse le montre.

Les révisionnistes du P « C » F tentent de dissoudre l'idéologie dans cette unité à la base, les trotskystes tentent eux de nier le Front populaire lui-même, avec toute cette dimension culturelle du Front populaire que tente de gommer par exemple Lutte Ouvrière.

Cette organisation trotskyste, qui rejette par définition le Front populaire, a publié un article pour saluer la riposte de la classe ouvrière en février 1934. Mais elle « oublie » que c'est le Parti Communiste – SFIC qui a dirigé la lutte, elle résume la lutte à la base à une sorte de lutte abstraite, trahie par la suite par le Front populaire :

« Seule la politique des partis de gauche, PS et PC, réunis dans le Front Populaire, allait réussir, après 1936, à faire refluer la mobilisation ouvrière. »

C'est là une vision économiste typique, et hypocrite car par définition le trotskysme a toujours rejeté le principe de Front uni antifasciste, au nom de la « révolution permanente ».

C'est une incompréhension de la menace fasciste, mais également de l'unité à la base et en toute conscience des travailleurs socialistes et communistes...

Le lourd silence des ML et des faux maoïstes

Il est intéressant de voir que ceux qui ont parlé des événements du 6 février 1934 à l'occasion du 80e anniversaire – en gros le PCMLM, le P « C » F, Lutte Ouvrière – se posent comme liés à l'histoire de France.

Leur rejet de Dieudonné a été, au-delà des différences de perception, d'ailleurs le plus net à l'extrême-gauche.

Inversement, ceux qui ont mis sur le même plan Manuel Valls et Dieudonné n'ont précisément rien dit sur l'anniversaire du 6 février 1934, qui a ainsi été oublié par les « marxistes-léninistes » (PRCF, URCF, ROC ML, RCC, etc.), les faux maoïstes (drapeau rouge, futur rouge, etc.)... Mais également par les anarchistes, les trotskystes, etc.

Toute cette extrême-gauche – en fait cette ultra-gauche – rejette le Front populaire, pratique le cosmopolitisme, vit dans un monde parallèle, coupé de la réalité et consistant en de l'auto-intoxication.

Ces gens ont sous-estimé la dynamique réactionnaire de la « manif pour tous », ils ont refusé de mobiliser contre Dieudonné, ils se moquent du 6 février 1934 comme date historique... C'est purement suicidaire, et révélateur de leur nature de classe, fondamentalement petite-bourgeoise.

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