31 oct 2014

Comment la France produit des hippies de droite qui s'imaginent être de gauche

Submitted by Anonyme (non vérifié)

C'est une constante française, dont l'école d'Uriage est l'exemple le plus frappant. C'est une attitude, une démarche qui se prétend morale, un état d'esprit qui se veut alternatif, une posture rebelle, qui se veut surtout une aventure existentielle, un engagement personnel concernant tout son « être ».

C'est quelque chose de tout à fait, d'exactement contraire à Aristote, à l'humanisme, à Baruch Spinoza, aux Lumières et Denis Diderot, à la social-démocratie, à l'idéologie communiste d'URSS et de Chine populaire, au principe de voir comme primordiale la collectivité, de voir les individus comme semblables dans leurs besoins et leurs exigences.

C'est une attitude qui a comme base l'esprit catholique féodal de la chevalerie, avec une intervention « personnelle » face à quelque chose considéré comme « inacceptable », avec une prise de position « unique » et subjective.

Il n'y a rien de réfléchi, rien d'écrit, on se situe en-dehors de l'esprit posé et rationnel. On est seulement du vécu, et c'est justement parce que c'est du vécu que c'est considéré comme « authentique ». C'est une intervention, tel un saint ou une sainte, pour placer son individualité comme « obstacle ».

Les exemples en France sont innombrables. Il y a les associations et leur engagement individuel « humaniste », qui relève en fait du réformisme chrétien. Il y a les gens qui se réunissent autour d'un feu, avec un animal en train de griller, débattant de refaire le monde un verre d'alcool à la main, à la « fête de l'Huma » ou entre amis.

Il y a les gens allant en free party et prenant des drogues, s'imaginant vivre totalement en dehors du système, car leurs perceptions modifiées leur ouvre un horizon « nouveau ». Il y a les gens sur la ZAD de Notre-Dame-des-Landes qui essaient de faire revivre l'esprit « pionnier » de la petite propriété des origines, cette « aventure ».

Ce sont aussi les gens partis dans les villages, tel à Tarnac, pour retourner aux sources, c'est-à-dire en fait se « lier » à la terre, à ce que les royalistes appellent le « pays réel », à cette « terre » dont le Maréchal Philippe Pétain disait qu'elle, « elle ne ment pas ».

Ce sont également des gens qui rêvent d'autogestion généralisée, dans l'esprit de Pierre-Joseph Proudhon, et qui s'escriment avec des syndicats « révolutionnaires » ou bien dans des projets « nationaux » fictifs (Bretagne, Occitanie, etc.).

Et tous ces gens s'imaginent de gauche. Mais ils l'assument : ils n'ont pas de programme, et leur objectif est lointain, non détaillé, relevant pratiquement du mythe, ce qui est justement une démarche propre à Georges Sorel, propre au fascisme.

Il y a une dimension mystique, car l'action est présentée comme transportant une « libération ». La révolte, en soi, affirme l'individu : c'est précisément ce qu'expliquait Sartre avec l’existentialisme, ainsi que tous les membres de ce courant (Frantz Fanon, Jean Genet, etc.).

On est dans la spontanéité qui permettrait d'imposer un nouveau « rythme » à la réalité, ce qui est un subjectivisme complet, dans la lignée d'Henri Bergson.

Et l'anticommunisme est assumé : le collectivisme, l'unification, la centralisation des efforts, tout cela apparaît comme insupportable à l'esprit anti-conformiste, rebelle, farouchement anti-étatique, et ne faisant confiance qu'à une communauté librement « choisie »… à partir d'une aventure forcément individuelle.

Cet esprit d'aventure, anti-raison, c'est précisément la démarche du fascisme français, l'esprit de l'école d'Uriage. Le fascisme français n'a pas produit de S.A. ultra-violent en masse : il a produit des hippies de droite, des ultra-individualistes vivant une « aventure » qui aurait en soi de la valeur.

On est ici dans une posture totalement opposée aux principes de la raison. On est là dans une mystique révolutionnaire qui critique toujours le capitalisme ou plutôt les banques, mais ne connaît pas le mot bourgeoisie, et attaque donc l'oligarchie présentée comme parasitaire, tout à fait dans l'esprit de Eugen Dühring et Jean Jaurès, justement dénoncés par Friedriech Engels et Karl Kautsky.

Être progressiste, c'est rejeter cet esprit individualiste de défense du « choix » personnel, de culte du positionnement subjectiviste, c'est voir que ces postures n'ont rien de gauche, mais forment une sorte de magma hippie de droite, rejoignant le fascisme dans ce qu'il est avant tout : une célébration de l'idéalisme.

Être progressiste, c'est comprendre la substance de ce « socialisme français » qui a historiquement bloqué le matérialisme dialectique et la social-démocratie.

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Le fascisme français n'a pas produit de S.A. ultra-violent en masse : il a produit des hippies de droite, des ultra-individualistes vivant une « aventure » qui aurait en soi de la valeur...