25 avr 2012

Marine Le Pen à l'Equinoxe : un condensé de fascisme

Submitted by Anonyme (non vérifié)

A la suite de l'annonce des résultats des élections, Marine Le Pen, comme tous les responsables politiques, a fait une déclaration devant ces militants retransmises en direct sur toutes les chaînes de télévision. 

C'est donc une déclaration courte, mais très travaillé et de fait très importante. D'autant plus au vu du résultat historique du Front National. En effet, en ayant obtenu 17,9% des voix (c'est-à-dire plus de 6,5 millions de voix) elle dépasse le score obtenu par Jean-Marie Le Pen lors son accession au second tour de la présidentielle de 2002, recueillant même un million de voix supplémentaires. Elle fait le score le plus élevé de l'extrême-droite en France depuis la Seconde Guerre mondiale. 

L'impact de ce score est d'autant plus renforcé que les sondages la plaçaient très largement en-dessous de son score réel pourtant aisément anticipable. Cela a renforcé l'impression de mouvement, de levée de masse dont a besoin le fascisme pour progresser dans sa marche au pouvoir. On voit là à quel point le fascisme est en fait porté par une partie des élites intellectuelles bourgeoises. 

Le discours que Marine Le Pen a prononcé ce soir du 22 Avril est très important à étudier pour toutes personnes antifascistes. Malgré sa brièveté c'est un pur condensé, une synthèse d'idéologie fasciste. Elle y trace un cap stratégique qu'il est important de connaître pour ceux qui aujourd'hui veulent préparer la résistance au raz-de-marée fasciste.

Marine Le Pen a tenu sa réunion à la salle Equinoxe qui se situe dans le 15ème arrondissement de Paris. C'est, historiquement à Paris, le quartier de la jeunesse fasciste. C'est là que se situent la plupart des locaux des groupes fascistes parisiens, les bars et les salles de concert où les jeunes fascistes se réunissent et font la fête, ou encore des magasins de fringues ; c'est un quartier étudiant mi-bourgeois mi -populaire. C'est l'exact pendant du quartier de Ménilmontant qui est lui le quartier de la jeunesse d'extrême-gauche.

Elle y a fait un discours très offensif, guerrier même, annonçant clairement que le fascisme se sent pousser des ailes et sait son tour arriver prochainement. 

Elle a ainsi déclaré :

quoiqu'il puisse arriver dans les 15 jours à venir, la bataille de France ne fait que commencer !

Son objectif est de pousser en avant ses troupes, de leur insuffler une attitude archi-offensive ; mais pas seulement. Elle en profite pour mettre une pression sur la Droite et particulièrement sur ses composantes souverainistes. Elle sait que l'UMP va exploser très prochainement sous le poids de ses contradictions internes (entre les fractions bourgeoises industrielle-traditionnelle et impérialiste-agressive) et que le nationalisme a emporté culturellement des secteurs importants dans ce parti.

Elle s'est aussi adressé aux secteurs chauvins de la Gauche bourgeoise qu'elle sait important en les appelant à la rejoindre dans un grand rassemblement patriotique. 

Cet appel s'ancre pleinement dans la stratégie fasciste de casser les frontières politiques traditionnelle de la bourgeoisie pour imposer sa vision du monde.

C'est le sens du "Ni gauche, Ni droite". Le fascisme fait mine de se placer en dehors du système, de redéfinir les frontières politiques et met en avant une capacité de "réconciliation" nationale ou de cette tirade lors de son discours :

tous ensemble, dans ce grand élan de fraternité nous imposerons le grand changement 

Marine Le Pen, de manière typiquement fasciste, cherche d'abord à gommer la lutte de classe. Pour la bourgeoisie impérialiste, la lutte de classe est le principal frein à son besoin de mobiliser les masses pour mener ses guerres de conquêtes. 

Car le fascisme n'est pas un mouvement de droite "pur", uniquement ultra-réactionnaire, contrairement à ce que les trotskystes racontent. C'est un mouvement qui vise la mobilisation totale de la société.

Il cherche donc à mobiliser les masses et particulièrement la classe ouvrière ; et s'il n'y arrive pas, il cherche au moins à la neutraliser politiquement. L'offensive du fascisme, avant d'être politique, est culturel. Il répand donc sa vision du monde niant la lutte de classe et mettant en avant "l'intérêt national". C'est le sens des déclarations incessantes de Marine Le Pen et des cadres du front National comme quoi, aujourd'hui, la vraie fracture serait entre "mondialistes" et ceux qui défendent la Nation.

Pour faire passer cela, le fascisme doit présenter la Nation comme seul recours social, ainsi que nous l'avons largement analysé dans nos documents sur Marine Le Pen. Il impose aussi la notion de "travailleurs", à l'opposé de celle de classe ouvrière ; aidé en cela par les syndicalistes. Dans son discours Marine Le Pen rappelle bien cela en déclarant:

Dans la France des clochers, des terroirs, dans nos campagnes, dans nos grandes régions industrielles, les ouvriers, les pécheurs, les petits fonctionnaires, les commerçants, les artisans, tous ceux qui travaillent et qui souffrent et qui ont la France au coeur. Tout ceux-là ont fait monter la vague bleue marine qui fait (..) trembler le système

Cette tirade est à elle-seule un pur condensé de fascisme. Il y a le culte typique du fascisme français de la terre et de la France profonde et catholique (les "clochers"). A côté de cela, elle nie clairement l'existence des classes sociales par la notion de "travailleurs". Ainsi sont mis dans un même paquet les petits-bourgeois commerçants ou artisans, les ouvriers ou les employés de la fonction publique. Et dans la démarche de mobilisation, elle les présente comme les derniers défenseurs de la France, tout en cherchant à se présenter comme à la tête d'un mouvement se préparant à renverser "le système". 

Le fascisme tente de récupérer pour la détourner la colère populaire. Il lui donne un contenu, mais un contenu qui ne sert que la bourgeoisie impérialiste. C'est là un aspect essentiel, si le fascisme peut atteindre aujourd'hui l'influence qu'il a dans les masses populaires de France, c'est aussi parce-que l'extrême-gauche est totalement petite-bourgeoise et qu'elle a complètement abandonné la perspective du soulèvement du prolétariat.

Enfin Marine Le Pen a confirmé, comme nous l'avions déjà analysé, l'aspect profondément antisémite du fascisme français, en déclarant

Nous avons fait exploser le monopole des deux partis de la Banque, de la Finance, des Multinationales

c'est clairement un appel antisémite digne du national-socialisme qu'elle passe.

Elle présente les partis politiques traditionnels de la bourgeoisie française comme étant des marionnettes des forces obscures de "la" Finance. C'est en fait un discours très classique de l'antisémitisme.... et de l'extrême-gauche, tout aussi anti-capitaliste romantique.

Antisémitisme, négation de la lutte de classe, mobilisation des masses ... ce discours, aussi court soit-il, montre clairement que nous avons raison lorsque nous qualifions le fascisme de mouvement "anticapitaliste romantique".

Ce discours de Marine Le Pen place à lui seul les enjeux à venir. Le fascisme ne s'arrêtera pas là. Sous la direction de Marine Le Pen et porté par la crise, il a lancé la mobilisation générale pour gagner la classe ouvrière puis après elle prendre le pouvoir. 

Aujourd'hui, alors que le fascisme a atteint un niveau jamais atteint dans les masses même dans les années 30, nous sommes à un moment historique. Un moment où doit se poser les bases de la Résistance à la barbarie, où se structure une force capable de sauver la civilisation et de la faire passer à un niveau supérieur. 

Cette force ne pourra être qu'un mouvement antifasciste autonome rompant avec les illusions petites-bourgeoises anarcho-trotskystes. Ce ne peut être qu'un mouvement qui assume de mener la bataille culturelle avec le fascisme sur le terrain où il se développe : dans les masses !

Aujourd'hui, plus que jamais, c'est soit le Socialisme soit Barbarie !

 

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