13 Jan 2015

Le mot juif n'existe toujours pas pour Voie Prolétarienne

Submitted by Anonyme (non vérifié)

Voie Prolétarienne, nous en reparlions récemment pour en parler du gauchisme. Etant donné que nous avons dénoncé le fait que l'attaque contre l'épicerie casher ait été « oubliée » par tout le monde, ces petits malins se sont imaginés se rattraper en publiant un texte intitulé :

Après le choc des massacres de Charlie Hebdo et de l’épicerie cacher, mettons-nous au clair

Quand on lit cela, on se dit : enfin ! Mais ce qui est formidable dans ce texte, c'est qu'on n'y trouve rien sur l'antisémitisme. Il est parlé des « meurtres antisémites des otages de l’épicerie cacher », mais cela s'arrête là. On ne retrouve pas une seule autre fois le mot antisémitisme.

Et si on a le mot juif, c'est une seule fois, pour lire « des juifs intégristes dont le sionisme est la perspective » - parce que quand on chasse le naturel, il revient au galop : quand on utilise le mot juif chez ces gens, cela forcément de pair avec une critique, ou plus exactement, une dénonciation.

Il est intéressant de voir que de tels propos sont tenus alors que l'État annonce que l'armée va être appelée pour protéger les lieux de prière ainsi que les écoles liés à la minorité juive. Il y a ainsi un décalage, qui semblera au mieux amer, au pire outrageant, et dans tous les cas relevant du typiquement français silence antisémite.

Après le choc des massacres de Charlie Hebdo et de l’épicerie cacher, mettons-nous au clair

Le massacre de Charlie Hebdo puis celui de l’épicerie cacher a sidéré tout le monde, nous y compris. Nous avons réagi rapidement par un communiqué qui allait à l’essentiel et qui a été largement diffusé, et nous ne nous sommes pas trompé quand nous n’avons pas accepté de participer aux manifestations du week-end.
Mais une fois sortis de l’émotion partagée, avec un peu de recul, il nous semble important de revenir sur toutes les questions apparues autour de nous, dans les entreprises, les quartiers, les associations, les débats partout en famille ou avec les amis.
Alors, voici quelques questions, quelques réponses : nous prenons position, pour tenter, à notre modeste échelle d’éclairer le débat que tous les exploiteurs veulent éviter.

Que dire des tueurs ? Comment caractériser ces assassinats ?

Le massacre des journalistes et employés du journal Charlie Hebdo, comme les meurtres antisémites des otages de l’épicerie cacher est l’œuvre de tueurs fondamentalistes, répondant à une idéologie réactionnaire et fasciste sur le mode « je ne suis pas d’accord avec toi, je te tue ». On ne peut qu’être horrifiés et condamner sans aucune réserve cet acte. Nous avons partagé la colère et l’émotion des premières heures qui ont juste suivi le massacre, nous comprenons la compassion pour les victimes.

D’où viennent les djihadistes (en général) ?

On oublie un peu vite que les djihadistes sont avant tout une conséquence des politiques impérialistes. Politique volontaire d’abord : en Afghanistan, en Syrie, les impérialistes occidentaux, dont la France, ont soutenu et armé les groupes intégristes en feignant de ne pas voir leur programme et leur pratique rétrograde, car cela était conforme à leurs intérêts géopolitiques du moment (par exemple contre l’impérialisme russe). Chez nous, dans les quartiers populaires des années 90, les mairies de toutes tendances ont favorisé les imams intégristes face à la révolte légitime des jeunes. Politique involontaire ensuite : à force de créer le chaos dans les pays dominés, d’y mener des guerres meurtrières, d’y installer des dictatures, d’y imposer des plans économiques d’ajustement structurels antisociaux, leurs interventions ne peuvent qu’engendrer ces monstres du type de l’Etat Islamique ou des tueurs comme ceux de Charlie Hebdo.

Est-ce que Charlie Hebdo « l’avait bien cherché » comme on a pu l’entendre ici ou là ?

La réponse est clairement NON. Mais le caractère pseudo provocateur de Charlie Hebdo était critiquable et insupportable notamment par l’amalgame systématique qu’il faisait entre islam et intégrisme. Ce qui ne justifie en rien la tuerie.

Alors c’était quoi Charlie Hebdo ?

Charlie Hebdo a pu être important dans l’après 68 (Cabu, Wolinski), dans la lutte contre le FN (Charb), ou pour RESF (Tignous) mais une lente dérive l’avait conduit à développer une ligne vraiment réactionnaire, raciste, homophobe et sexiste. Charlie Hebdo n’était pas un journal d’extrême-droite comme Minute ou Valeurs Actuelles mais il était devenu un journal de « beaufs », ceux que Cabu croquait allégrement il y a trente ans. Ce glissement est bien celui d’une partie de la petite-bourgeoisie réformiste, déboussolée par l’instabilité du monde, et qui se replie par peur sur les valeurs de la bourgeoisie.
D’ailleurs le journal s’était institutionnalisé et de plus en plus intégré à la bourgeoisie (Philippe Val directeur de France Inter, Bernard Maris administrateur de la Banque de France pour ne citer qu’eux) et à la presse bourgeoise. Aujourd’hui, l’Etat met tous ses moyens au secours de la survie de ce journal, mais la presse militante est de son côté éliminée de la diffusion des kiosques.
Nous partageons l’émotion des #jesuischarlie, mais nous ne sommes pas « Charlie » Hebdo !

Des conséquences immédiates et très graves sur le prolétariat et les classes populaires.

La première conséquence est la terreur pour la fraction immigrée de la classe ouvrière, attentats contre des mosquées, appels à la haine, manifestations de réactionnaires, provocations racistes dans les entreprises… partout. C’est la peur des représailles racistes et de la division qui inquiètent le plus pour l’avenir. Déjà des mosquées attaquées, plusieurs agressions racistes comme à Lyon.
Dans un contexte de rafle et d’expulsion, nos camarades sans-papiers sont tétanisés par la peur y compris pour leur vie.
Dans la classe ouvrière de France, des éléments réactionnaires s’affichent sans honte en multipliant les amalgames racistes, les provocations, le rejet explicite, et le repli individualiste sur fond de crise économique.
Pour sa part, la grande majorité des prolétaires est inquiète et lucide sur ce que ça va provoquer pour les couches immigrées et issues de l’immigration mais aussi des suites répressives massives pour toute la société. Pourtant il faut sortir du silence et de l’impuissance.

 

Innombrables ont été les prises de position contre l’amalgame entre l’islam et les tueurs fondamentalistes, dans toutes les manifestations et réactions spontanées autour de nous.
Cette juste réaction populaire doit se poursuivre et se manifester dans la solidarité concrète entre français et immigrés, envers les sans-papiers, tous unis contre la bourgeoisie qui nous exploite.

Les musulmans sont mal intégrés ?

La tuerie de Charlie Hebdo n’est en rien un exemple d’une prétendue « mauvaise intégration » des musulmans de France. Ceux qui l’affirment sont ceux qui saisissent la moindre occasion de souffler la flamme de la division en fonction de nos origines, ou entre musulmans et non musulmans, au service d’une politique réactionnaire contraire aux intérêts du peuple et des prolétaires. Le chômage, la pauvreté, la crise, la violence de la société ne sont pas de la faute des immigrés, mais de ceux qui nous oppriment et nous exploitent, de ceux qui ont fait fermer les usines, détruisent nos quartiers etc. Ce sont les mêmes qui ont colonisé l’Afrique, le Maghreb, l’Asie, les pillent, et ont contraint ses enfants à immigrer en France, où ils ont été surexploités dans les usines, sur les chantiers ou dans les mines, et entassés dans les cités une fois que leur force de travail n’a plus été utile.

Nous rejetons l’Union Nationale !

Nous refusons les appels à l’unité nationale pour la défense de la République Sarkozy, Valls et Hollande main dans la main, toutes tendances politiciennes confondues. Nous refusons de défiler avec ceux qui nous exploitent, ferment les usines, raflent les sans-papiers et quadrillent les banlieues. Accepter ou pas le FN n’est qu’une posture électoraliste des uns ou des autres, car tous les partis politiques bourgeois sont unis autour de la défense de leur République, de leur Démocratie, de leur Liberté.
Nous dénonçons l’indignation sélective et nous constatons qu’il n’y a eu aucun deuil national pour Rémi Fraisse tué à Sivens (alors qu’un « vibrant » hommage était rendu au même moment au patron de Total mort dans un accident), pour Clément Meric, pour Zyed et Bouna assassiné du fait de la police en 2005, qu’il n’y a pas eu de deuil international pour les 100 000 morts de l’amiante, pour les civils de Gaza et les combattant(e)s de Kobané, pour les migrants morts par milliers en Méditerranée, etc…
C’est d’abord pour ces raisons que nous n’avons pas défilé dimanche et nous avons regretté, comme beaucoup d’autres, qu’il n’ait pas été possible d’organiser dans l’urgence un contre-rassemblement anti-raciste et anti-impérialiste.

La belle alliance internationale…

Dimanche à Paris, on a assisté au grand rassemblement international de la bourgeoisie réactionnaire, unie pour la défense de « leur » démocratie. Netanyahou, Omar Bongo, Orban de Hongrie, le roi de Jordanie, Cameron, Merkel, Rajoy, le représentant de Poutine et bien d’autres, il ne manquait que le pape ! Jusqu’au traître de l’autorité palestinienne Mahmoud Abbas qui a défilé aux côtés du bourreau de Gaza…
La participation massive de ces bourgeois et exploiteurs a contribué à ouvrir les yeux autour de nous sur le vrai sens de la manifestation : au-delà de l’émotion et de la compassion avec les victimes, c’était une gigantesque récupération politique pour nous aveugler et nous amener à défendre leur monde de guerres et de misère. A tel point que de nombreux militants honnêtes ont grincé des dents, jusqu’aux journalistes survivants de Charlie Hebdo…

Le renforcement de la police est-il la solution pour notre sécurité ?

Le gouvernement, soutenu par tous les partis politiques du PCF au FN, continuera de faire passer de nouvelles lois « antiterroristes » au prétexte de « nous protéger ». Mais ces lois serviront contre nous, dirigées pour combattre dans le futur, nos révoltes légitimes comme à Notre-Dame des Landes, ou lorsque des travailleurs en colère retiendront leurs patrons pour demander des comptes.
Nous refusons de nous ranger derrière l’opération médiatique de réhabilitation de la police, présentée aujourd’hui comme « gardien de la paix » et défenseure de la démocratie. Nous n’oublions pas que c’est la police qui matraque dans les manifs, qui rafle les sans-papiers, tue dans les quartiers populaires et pourchasse les militants.

Défendre la liberté de la presse ?

Nous ne rentrons pas non plus dans le concert actuel sur la défense de la liberté de la presse. Nous n’avons pas oublié les manipulations médiatiques honteuses de l’été 2014, lors des manifestations de soutien au peuple palestinien. Nous n’oublions pas la propagande, jour après jour, sur toutes les radios et télés, pour soutenir les plans d’austérité toujours plus violents contre les travailleurs et le peuple, pour le travail du dimanche, l’acceptation des licenciements et des fermetures d’entreprises, pour le réalisme économique et la soumission à la crise. Ils nous mentent, ils nous manipulent tous les jours. Les journalistes des grands médias sont aux ordres, ils forment une fraction de la bourgeoisie dont ils sont les chiens de garde.
La liberté d’informer que nous défendons, celle que nous faisons vivre, c’est celle des travailleurs et du peuple.

Il n’y a pas de complot !

Comme d’habitude dans ce genre de situations se développent des théories fumeuses sur des responsabilités supposées et cachées des sionistes, des impérialistes, du gouvernement, ou autre Illuminati. Que tout ne soit pas connu, c’est une évidence mais l’essentiel est clair.
Particulièrement quand les médias nous mentent et nous manipulent, la tentation est forte d’inventer des complots cachés pour expliquer des contradictions politiques et sociales. Nous ne rentrons pas dans ce jeu qui n’a d’autre objectif que nous réduire à l’impuissance.

A-t-on le droit de critiquer la religion ?

L’OCML Voie Prolétarienne est une organisation matérialiste et athée. Pour autant nous respectons la liberté religieuse, et nous reconnaissons aussi le droit de critiquer les religions quelles qu’elles soient. Mais la critique de la religion est d’abord une critique politique, et ne doit pas permettre des alliances avec des forces réactionnaires, en attisant les contradictions au sein du peuple. Aussi la critique de l’islam doit se démarquer radicalement de celle de la bourgeoisie ou de la réaction raciste, dans un contexte de délire sur une supposée islamisation de l’Europe.
Nous mènerons la lutte contre tous les intégristes religieux réactionnaires, toutes religions confondues, qu’il s’agisse des cathos et de Christine Boutin sur le Mariage pour tous, des juifs intégristes dont le sionisme est la perspective, ou des islamistes.

 

« L’unité révolutionnaire de la classe opprimée pour se créer un paradis sur terre nous importe plus que l’unité d’opinion des prolétaires sur le paradis au ciel. » Lénine

Ce que nous voulons :

Face à ce chaos, même si nous sommes encore tous bouleversés et désemparés, il faut maintenir le cap, ne pas laisser l’impérialisme et la réaction détruire nos vies. Il faut se reprendre, parler, échanger, s’engager pour désembourber l’avenir.
Au-delà des questions et de l’émotion, il reste autour de nous l’aspiration à changer cette société capitaliste barbare, violente et insupportable. L’union nationale ne sera qu’un feu de paille face aux exigences de la crise du capitalisme, et c’est à notre volonté de changement que nous voulons donner un sens !

 

Contre tous les fascismes, unité populaire !
Contre l’union nationale, unité des prolétaires contre les exploiteurs !
Régularisation sans condition de tous les sans-papiers, liberté de circulation !
Arrêt de toutes les interventions impérialistes à l’étranger, retrait des troupes !
Guerre là-bas, pas de paix ici !
Ouvriers français ou immigrés, croyants ou athées, solidarité : une seule classe ouvrière !

Pour construire un autre futur, #NousSommesRevolutionnaires !

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Etant donné que nous avons dénoncé le fait que l'attaque contre l'épicerie casher ait été « oubliée » par tout le monde, l'OCML-VP s'est imaginée se rattraper en publiant un texte intitulé : "Après le choc des massacres de Charlie Hebdo et de l’épicerie cacher, mettons-nous au clair"...