Émigration et immigration - 2e partie : exode rural au sein d'un pays et depuis un autre pays
Submitted by Anonyme (non vérifié)Historiquement, les progrès techniques dans la production de biens manufacturés, ce qu'on appelle la « révolution industrielle », ont provoqué un déplacement massif de la population paysanne, ce qu'on appelle « l'exode rural ».
Cependant, cela est vrai dès le début de la croissance des bourgs, où vivent les bourgeois, c'est-à-dire les commerçants, artisans, marchands et négociants.
En France, personne n'avait donc ses ancêtres vivant au même endroit que lui dans les 300 années précédentes. Au fur et à mesure du XVIIIe siècle, qui est celui de la révolution française, les villes voient leur population, alors d'un million de personnes, être multipliée par cinq et dans les cinquante premières années du XIXe siècle, 3 millions de personnes de plus vivent même dans les villes françaises.
Les progrès agricoles, telle la diffusion de la charrue, ont cependant permis parallèlement une croissance de la population dans les campagnes, qui est d'un peu plus de 27 millions en 1850. Le développement du capitalisme, forcément en spirale, va toutefois précipiter l'effondrement lors de son accélération.
A partir de 1860, plus de 710 000 personnes quittent les campagnes ; au milieu des années 1870, le chiffre est de plus de 840 000 personnes. Au milieu des années 1880, ce sont 670 000 personnes qui se déplacent dans les villes, puis 620 000 dans les années 1900.
En 1906, la population agricole ne forme plus que 43,8 % de la population totale. Le chiffre est de 31 % en 1954, pour passer à 4 % à la fin du 20e siècle.
Ce processus est toutefois un aspect seulement du processus du développement du mode de production capitaliste. Le second aspect est la formation de pays rendus dépendants par rapport à ce processus.
L'exode rural comme l'immigration et l'émigration sont la conséquence de la naissance du capitalisme par les villes, en anéantissant l'économie traditionnelle des campagnes, ainsi que de la loi du développement inégal séparant les pays du monde en pays impérialistes d'un côté, pays semi-coloniaux semi-féodaux de l'autre.
Le capitalisme, à son stade impérialiste, empêche le développement des pays semi-coloniaux semi-féodaux, provoquant des guerres et donc des déplacements de réfugiés, mais surtout la misère dans les campagnes amenant des départs massifs vers les villes, qui deviennent alors en Afrique, en Asie, en Amérique latine, de gigantesques centres urbanisés invivables.
Des secteurs entiers de population des pays opprimés sont aussi pris en otage, étant importés telles des marchandises, dans les pays impérialistes. Il est significatif que dans les deux années suivant la pseudo-indépendance de l'Algérie en 1962, qui devient alors un pays semi-colonial semi-féodal, 260 000 personnes quittent ce pays pour s'installer en France.
La tendance ira en grandissant : alors qu'entre 1946 et 1954, le chiffre des gens venant d'Algérie étaient passé de 22 000 à plus de 210 000 personnes, en 1982, pas moins de 800 000 personnes viennent d'Algérie.
La logique d'importation de la force de travail des pays semi-coloniaux semi-féodaux, anciennement colonisés ouvertement, est générale : de 1962 à 1982, le nombre de personnes ayant quitté le Maroc pour la France est passé de 31 000 à 440 000, pour la Tunisie on passe de 26 000 à 190 000, pour les autres pays nord-africains les chiffres sont de 17 000 à 157 000.
Il s'agit, là aussi, d'un exode rural, mais cette fois le processus n'est pas au sein d'un pays devenant capitaliste ; il concerne deux pays, avec une population venant du « bled » d'un pays semi-colonial semi-féodal pour rejoindre un pays capitaliste dominant.
Il s'agit d'un processus de prolétarisation généralisée et donc d'urbanisation, liquidant les campagnes à l'échelle mondiale, dans un processus particulièrement tourmenté.