Deux rocardiens au second tour des «Primaires citoyennes» : la seconde mort de François Mitterrand
Submitted by Anonyme (non vérifié)Les « primaires citoyennes » ont rendu leur verdict, avec une participation qui dépasse le million de votants (1,34 million), ce qui est bien moins que la droite avec ses primaires (4,4 millions de votants), moins bien également que les primaires de 2011 (2,7 millions de votants), mais témoigne qu'en arrière-plan, un débat certain existe dans les masses.
Toutefois, le niveau de ce débat est à l'image de la société française et il n'a pas su aller au fond des choses au point d'avoir placé en tête quatre personnes relevant d'une seule et même famille politique.
Benoît Hamon, qui est arrivé en tête (36,21%), avait en effet fondé le courant du « Nouveau Parti Socialiste » avec Arnaud Montebourg, qui a pris la troisième place (17,62%), et Vincent Peillon, qui a pris la quatrième place (6,82%).
Il s'est également toujours revendiqué de Michel Rocard, tout comme Manuel Valls, qui a pris la seconde place (31,19%).
Manuel Valls a d'ailleurs été, dans les années 1980, le responsable des clubs Forum, la structure jeunesse des rocardiens dans le Parti Socialiste.
Benoît Hamon a justement été un membre de ces clubs Forum, vivant d'ailleurs alors dans le Finistère, dont la fédération du Parti Socialiste était acquise à Michel Rocard.
Une lecture aile gauche / aile droite au sein du Parti Socialiste n'a donc pas de sens : tant Benoît Hamon que Manuel Valls ont été des « rockies », des soutiens de Michel Rocard au sein du Parti Socialiste, dont il a toujours représenté l'aile la plus à droite, surnommée péjorativement dans les années 1980 la « gauche américaine ».
Benoît Hamon et Manuel Valls sont, aujourd'hui, l'expression pure et simple du rocardisme, de la « gauche américaine » qui assume de n'avoir aucun lien, même pas historique, avec la social-démocratie historique, avec le mouvement ouvrier.
Il n'existe aucune ambiguïté au sujet de ce rocardisme.
A la mort de Michel Rocard, en juillet 2016, Manuel Valls avait été très clair :
« J'ai toujours été et je suis toujours rocardien (...) je perds un mentor, un ami (...)
Je me suis engagé en politique par et pour Michel Rocard »
Benoît Hamon n'a pas été en reste :
« Avec lui, j'ai appris ce qui compte à mes yeux le plus : l'éthique de conviction. Michel Rocard s'est éteint et sa mort me bouleverse ».
Les « primaires citoyennes » ont donc abouti à un seul et même processus : placer en tête des gens n'ayant aucun lien avec le mitterrandisme, c'est-à-dire la tradition historique du Parti Socialiste.
Le mitterrandisme était déjà une version modernisée du jauressisme, du républicanisme de gauche, en rupture avec la tradition historique de la SFIO de Léon Blum, elle-même une version particulièrement délavée de la social-démocratie historique.
Avec Manuel Valls et Benoît Hamon au second tour des « primaires citoyennes », le « logiciel » du Parti Socialiste bascule entièrement. La rupture est complète avec tout ce qui a un rapport, de près ou de loin, avec la tradition historique du mouvement ouvrier.
La notion même de socialisme a entièrement disparu. Benoît Hamon n'utilise que des recettes post-modernes, comme le « revenu universel », la « conversion idéologique », le « renouveau démocratique », le « 49-3 citoyen », la « raréfaction du travail », etc.
Benoît Hamon est un Manuel Valls sachant manier les concepts, et s'étant placé de manière opportuniste comme représentant la « gauche », tout comme Arnaud Montebourg a tenté de le faire vainement.
Manuel Valls est un Benoît Hamon déjà installé dans les institutions, qui n'a pas besoin de prétendre moderniser fortement le régime, préférant comme hier soir opposer des « promesses irréalisables » à « une gauche crédible qui assume les responsabilités du pays ».
Le rêve de ces deux personnalités politiques, c'est de donner naissance à un Parti Démocrate à l'américaine, qui œuvre au progrès social et économique depuis l'intérieur du capitalisme, par des réformes modernistes. D'un point de vue authentiquement de gauche, on ne peut que les dénoncer : ils ne sont même pas mitterrandistes, ils représentent la pseudo-gauche telle que voulue par le post-modernisme.