26 aoû 2014

Remaniement du gouvernement : le Parti socialiste est-il possible sans l'UNEF-ID ?

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Finie la tradition historique du Parti Socialiste, place au libéralisme social teinté de « progressisme » post-moderne : tel est le sens du nouveau gouvernement dit Valls II.

Le ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique Emmanuel Macron ne fait même pas partie du Parti Socialiste ; âgé de 37 ans, il a fait sciences-po, l'ENA, banquier d'affaires à la banque Rotschild & Cie., avant d'être secrétaire général de l'Elysée entre mai 2012 et juin 2014.

Il fait partie des carriéristes expert en « technique » qui sont nommés par en haut, par « utilité », par pragmatisme bourgeois. Pareillement, des femmes comme Ségolène Royal, Fleur Pellerin, Najat Vallaud-Belkacem, Christiane Taubira... sont l'expression du pire féminisme bourgeois, coupé de tout lien historique culturel et idéologique avec la classe ouvrière.

On est là dans le carriérisme d'appareil, dans le faux « progressisme » qui ne consiste qu'en la modernisation de l'Etat. Ce que cela révèle est d'importance : le Parti Socialiste a vendu son peu d'âme.

Car le nouveau gouvernement qui vient d'être formé par Manuel Valls reflète un véritable problème de fond dans la nature même du Parti socialiste. Ce dernier, est en effet, historiquement le pendant « français » de la social-démocratie allemande. Cette dernière était massive, extrêmement bien organisée, suivant une ligne idéologique bien déterminée, sur la base théorique du marxisme.

En France, la social-démocratie est un magma de courants et de personnalités, faisant bloc par l'intermédiaire du droit de tendance, afin de s'amalgamer suffisamment pour peser.

Le Parti Socialiste connaît donc actuellement une crise dont la base est très simple à comprendre. Historiquement, le Parti Socialiste et son ancêtre la SFIO sont portés par des gens appartenant au mouvement ouvrier, sur une base plus ou moins réformiste.

Lorsque François Mitterrand parvient à rassembler tous les courants socialistes au sein du Parti socialiste, à la fin des années 1960 et au tout début des années 1970, il a bien pris soin de reconnaître cette réalité, cette bataille interne.

Le Parti Socialiste savait d'ailleurs dès le départ se régénérer sur ce plan-là en intégrant périodiquement des structures trotskystes, dont l'idéologie consiste précisément en une social-démocratie à la française et « dure ».

Lionel Jospin, qui fut premier ministre et auparavant premier secrétaire du Parti socialiste, vient ainsi de l'Organisation Communiste Internationaliste, organisation qui fut d'ailleurs intimement lié au Parti socialiste en 1981 pour la campagne électorale de François Mitterrand. L'actuel premier secrétaire du Parti socialiste, Jean-Christophe Cambadélis, vient pareillement de cette organisation, tout comme par ailleurs Jean-Luc Mélenchon.

Jean-Christophe Cambadélis était dans sa jeunesse président du syndicat étudiant UNEF-ID, le vice-président étant Julien Dray, membre de l'organisation trotskyste Ligue Communiste Révolutionnaire, qui lui aussi rejoindra le Parti Socialiste, tout comme Henri Weber, un dirigeant historique de la « Ligue », ou Gérard Filoche, dirigeant de la tendance oppositionnelle de la LCR depuis ses débuts jusqu'à son entrée au Parti Socialiste en 1994.

Chaque « passage » de ces figures s'accompagna de celui de dizaines, voire de centaines, de cadres éprouvés, notamment passés par l'UNEF-ID, syndicat étudiant majeur et acceptant le droit de tendance (par opposition à l'UNEF lié au P« C »F), et ancien lieu d'affrontement inter-tendances entre courants trotskystes.

On est ici dans une bataille pour le « recrutement », en s'appuyant sur des cadres très bien formés, ayant parfois le statut de permanents ; la mutuelle MNEF arrosant alors l'UNEF-ID.

Tout se modifia dans les années 1990. A partir de là, le Parti Socialiste est devenu un simple parti de gouvernement, un lieu de pouvoir pour carriéristes. La rupture a été complète avec les traditions historiques de la social-démocratie à la française, on en a un exemple parlant avec les succès de Ségolène Royal, ou encore l'irruption de Najat Vallaud-Belkacem, toutes deux opportunistes sans idéaux et n'hésitant pas à surfer sur le nationalisme à la moindre occasion.

Durant les années 1990, tant le Parti Socialiste que le Parti « Communiste » abandonnèrent concrètement toute prétention idéologique, pour devenir des partis de gouvernement. L'UNEF-ID absorba même l'UNEF, au grand dam de sa base sincèrement très engagée à gauche.

Le dirigeant de ce processus fut Pouria Amirshahi, dirigeant de l'UNEF-ID de 1994 à 1998, puis dernier dirigeant de la MNEF (qui est liquidée en 2000 et remplacée par la LMDE). Député du Parti Socialiste, Pouria Amirshahi en est désormais une figure très « à gauche », à côté notamment de Marie-Noëlle Lienemann, omniprésente ces derniers mois dans l'offensive contre la direction du Parti Socialiste, dans le prolongement de sa position de toujours, il est vrai.

Mais Pouria Amirshahi et Marie-Noëlle Lienemann sont des figures liées à une époque qui n'existe plus. Nombre de gens naviguant dans les hautes sphères du Parti Socialiste sont fondamentalement éloignées des traditions socialistes historiques.

Ni Pouria Amirshahi ni Marie-Noëlle Lienemann ne peuvent s'appuyer sur une base pratique. C'est d'ailleurs pourquoi Jean-Luc Mélenchon a quitté la direction du Parti de Gauche, dont le responsable désormais est également un ancien de l'Organisation Communiste Internationaliste Alexis Corbière. Mélenchon a compris qu'une recomposition inévitable allait se produire.

Il va y avoir trois tendances : une tendance sociale-libérale avec François Hollande, Manuel Valls, Ségolène Royal, etc., une tendance néo-socialiste tendant clairement à la fascisation, avec Arnaud Montebourg, et enfin un renouveau socialiste « de gauche » avec Pouria Amirshahi, Marie-Noëlle Lienemann, de nouveau sur une base de type « SFIO - Parti Socialiste » historique.

Avec donc les mêmes erreurs, les mêmes déviations petites-bourgeoises, le même réformisme épaulé par le trotskysme au nom de la prise hypothétique du pouvoir par « les organisations ouvrières, partis et syndicats », etc.

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