La « falsafa » signifie philosophie en arabe, et on désigne par ce terme la vaste œuvre de pensée qui a existé dans l'aire arabo-persane, alors que l'Europe connaissait le sombre Moyen-Âge. Ce sont en effet les penseurs de la falsafa qui ont récupéré et sauvé la philosophie développée par la Grèce antique. La pensée philosophique arabo-persane est ainsi fondamentalement aristotélicienne, tendant de plus en plus à une affirmation ouvertement matérialiste, pratiquement panthéiste, et par conséquent en conflit ouvert avec la religion et les forces féodales. Les principaux penseurs de la falsafa sont Al-Kindi, Al-Fârâbi, Avicenne et Averroès, ce dernier ayant d'ailleurs joué un rôle capital en Europe dans l'émergence d'une dynamique pour s'arracher au Moyen-Âge. Dans la conception philosophique de la falsafa, l'être humain peut saisir la science et comprendre le monde sans l'aide de la religion. Il n'existe d'ailleurs qu'une seule « pensée », produit de l'univers et de ses conditions concrètes, et par conséquent il n'y a pas de « premier homme », pas de création du monde. La réalité sociale, notamment marquée par l'absence de propriété foncière d'un côté, l'existence d'un appareil d'État du type du despotisme asiatique de l'autre, ne permit pas à la bourgeoisie de porter la falsafa. Ce sont les forces réactionnaires qui purent ainsi mener victorieusement une grande offensive, consistant en un grand programme d’opposition à l’intelligence philosophique et au matérialisme en général. Cela se traduisit par la systématisation de l’irrationalisme comme mode de connaissance, comme le montre la mystique soufie ou la Nahda, ou bien sûr le culte de la juridiction féodale, qui se prolonge en pratique jusqu'au début du 21e siècle dans les pays semi-féodaux semi-coloniaux.