29 sep 2015

Il y a 20 ans, Khaled Kelkal, figure semi-féodale

Submitted by Anonyme (non vérifié)

Il y a 20 ans, Khaled Kelkal était abattu, le 29 septembre 1995, par des forces spéciales de la gendarmerie. C'était, semblait-il alors, la fin d'une histoire.

Khaled Kelkal, né en 1971 et arrivé à deux ans en France, agissait comme figure dirigeante du Groupe Islamique Armé (GIA) ayant mené justement huit attentats en France en 1995, faisant huit morts et deux cents blessés.

C'est surtout Paris qui était visé, avec notamment la gare Saint Michel, la place de l'Étoile, le marché Richard-Lenoir, mais il y eut également la ligne TGV Sud-Est près de Lyon à Cailloux sur Fontaines ou encore une école juive à Villeurbannes. Un vol d'Air France Alger-Paris connut également une prise d'otages, en 1994.

Le caractère artisanal de ces attentats et leur liaison avec la guerre civile algérienne firent que ces événements furent considérés comme un accident.

En 1991,le gouvernement algérien semi-colonial semi-féodal des « colonels » du FLN avait refusé de reconnaître les élections marquées par la victoire du Front Islamique du Salut, qui avait récolté 48 % des voix pour 59 % de participation.

La guerre civile qui s'ensuivit, marquée par des massacres et un chaos général, aboutit à la mort de 60 000 à 150 000 morts, avec un million de personnes déplacées.

Les islamistes basculèrent dans l'ultra-violence féodale, considérant ceux qui ne les rejoignant pas comme des anti-musulmans ; ils procédèrent à des massacres de masse, violant et tuant, coupant des gens en morceaux, le tout avec un double jeu de l'armée algérienne tout à fait heureuse d'avoir un ennemi aussi anti-populaire lui redonnant une certaine crédibilité.

Une toute petite scission dans le Groupe Islamique Armé – qui disposait à un moment d'entre 30 000 et 100 000 personnes – forma le Groupe Salafiste pour la Prédication et le Combat refusant cette ligne de massacre et rejoindra ensuite Al Qaeda.

La situation revint lentement à la normale par la suite, avec notamment l'élection d'Abdelaziz Bouteflika comme président de l'Algérie en 1999 et toujours maintenu à son poste malgré son incapacité à ne serait-ce que parler : l'équilibre de l'Algérie est encore à ce prix aujourd'hui.

Tout ce conflit tient bien entendu à une contradiction au sein du régime algérien, entre le semi-colonialisme qui prédomine encore aujourd'hui et tente un semi-féodalisme de technocrates, et le féodalisme religieux qui tente de prendre le dessus. C'est l'explication matérialiste dialectique.

Cette explication n'étant alors réalisée nulle part, l'Algérie sombrait dans le chaos et en France on tournait le dos aux événements, avec également des courants dans l'extrême-gauche expliquant que le GIA n'existait pas et que c'était un complot du FLN.

Aussi ridicule que cela puisse apparaître aujourd'hui, il n'en est pas moins que Khaled Kelkal eut droit après sa mort à de nombreux articles dans la presse, où sa radicalisation religieuse en prison fut « analysée » et « commentée ». La sociologie bourgeoise s'empara du petit délinquant passé par les casses à la voiture-bélier pour arriver au terrorisme islamiste.

Il est vrai qu'à l'été 1995, sa photographie avait été imprimée à 170 000 exemplaires afin d'être diffusée dans tout le pays. Le Monde avait même retrouvé une interview de Khaled Kelkal datant de 1992 et faite par un sociologue allemand. Khaled Kelkal, qui vivait à Vaulx-en-Velin à la périphérie de Lyon, y expliquait entre autres :

« - Quelle signification a l'islam pour toi ?

- Franchement, c'est une grande chose dans la vie. Même là, je suis en train de gamberger. Je dis : "Il faut que je sois dans la religion. Il faut que je prie."

Tous les trois ou quatre jours, on loue une cassette avec des grands savants de l'islam, avec des Occidentaux, où ils montrent les paroles du Coran. Un des plus grands professeurs en astronomie au Japon a certifié que le Coran est la voix de Dieu. Le plus grand savant de la NASA lui aussi a certifié.

Ce qui est dit là, ça ne peut pas être humain, ça ne peut qu'être divin. Après, on peut plus nier.

Quand les plus grands savants certifient, on ne peut plus nier. C'est très important pour moi. Quand j'étais au collège, je faisais déjà la prière, j'étais hyper bien dans ma peau, j'avais aucun vice. Bien. Au niveau de Dieu, au niveau des gens, bien.

On était même arrivés les premiers dans ma classe en faisant la prière et tout. Le jour où j'ai arrêté la prière, c'est le jour où il m'est arrivé toutes les embrouilles. J'ai arrêté de faire le ramadan, la prière, je me suis retrouvé où ? Dans un trou, en prison (…).

Je vous jure que le plus grand professeur du Japon a levé le doigt et a dit qu'Allah était Dieu et que Mohamed est son prophète. Pourquoi ? Parce que lui il le sait, il a fait des recherches, et je vous jure que les plus grands savants du monde l'ont dit (…).

- Tu as des projets ?

- Moi, j'espère, Inch Allah, retourner dans mon pays et monter quelque chose. »

Cela, et tout le reste de l'interview, montre que Khaled Kelkal était totalement soumis à l'idéologie semi-féodale algérienne. Dans sa vision du monde, seule la religion apparaît d'ailleurs comme une porte de sortie. C'est un besoin de communisme absolument perverti :

« Je ne suis ni arabe, ni français, je suis musulman. Je ne fais aucune différence. Si maintenant le Français devient un musulman, il est pareil que moi, on se prosterne nous devant Dieu. Il n'y a plus de races, plus rien, tout s'éteint, c'est l'unicité, on est unis. Maintenant, vous allez à la mosquée, il y a plein de Français. Il n'y a plus de différence de races. Vous entrez à la mosquée, vous êtes à l'aise tout de suite, on vous serre la main, on vous considère comme un ami qu'on connaît depuis plus longtemps. Il n'y a pas la méfiance, tous les préjugés. Dans la rue, on dit bonjour à quelqu'un : "Pourquoi vous dites bonjour ? je ne vous connais pas !" Moi, je vois un musulman dans la rue : "Salam aleikoum !" ; il me regarde avec un grand sourire, on s'arrête et on discute. C'est la reconnaissance d'autrui, on est frères même si on ne se connaît pas. »

Il y a 20 ans, Khaled Kelkal était abattu, le 29 septembre 1995, par des forces spéciales de la gendarmerie. C'était, semblait-il alors, la fin d'une histoire... Mais ça ne l'était pas. Car il n'y a pas que l'exclusion et les problèmes sociaux : il y a la question de l'idéologie semi-féodale, qui joue un rôle dans tous les pays semi-coloniaux, mais aussi ici comme superstructure des masses immigrées.

Seule l'unité populaire, démocratique, progressiste, par la lutte de classes, peut unifier les masses et écraser cette superstructure. Vues les vingt dernières années, il est logique que les choses aient empirées.

Les grandes questions: 
Rubriques: