Émigration et immigration - 4e partie : un processus d'exode rural à l'échelle mondiale
Submitted by Anonyme (non vérifié)Le processus d'éviction des paysans de leur terre n'est pas valable seulement pour le capitalisme au sein d'un pays donné. C'est vrai aussi dans le cadre du rapport entre un pays où le capitalisme est développé, même relativement, et un pays où le capitalisme est bloqué, par la colonisation, imposant historiquement une forme semi-coloniale semi-féodale.
Karl Marx a étudié le rapport économique entre l'Angleterre en tant que puissance coloniale et les Indes en tant que zone géographique colonisée. Le schéma est bien connu : les matières premières sont vendues depuis l'Inde à bas prix, les produits manufacturés étant vendus depuis l'Angleterre à prix élevé.
Ce processus n'est pas original ; il s'est de fait déjà déroulé dans les campagnes anglaises, où l'artisanat du tissage s'est fait écrasé par la puissance économique des villes. Le schéma se répète, cette fois à l'international.
Les paysans ruinés se voient obligés de travailler là où ils le peuvent, et justement c'est là qu'intervient la forme sociale semi-féodale semi-coloniale : des grands propriétaires terriens sont mis en place par le colonialisme, ainsi qu'une bourgeoisie bureaucratique locale servant d'intermédiaire.
Les masses paysannes écrasées des pays dominés passe sous la coupe des initiatives industrielles (ou agro-industrielles, agraires tout d'abord) des pays capitalistes. Karl Marx, dans Le capital, décrit cela ainsi :
« D'une part, les machines effectuent directement l'augmentation de matières premières, comme, par exemple, le cotton-gin a augmenté la production du coton, d'autre part, le bas prix des produits de fabrique et le perfectionnement des voies de communication et de transport fournissent des armes pour la conquête des marchés étrangers.
En ruinant par la concurrence leur main-d'oeuvre indigène, l'industrie mécanique les transforme forcément en champs de production des matières premières dont elle a besoin. C'est ainsi que l'Inde a été contrainte de produire du coton, de la laine, du chanvre, de l'indigo, etc., pour la Grande-Bretagne.
En rendant surnuméraire là où elle réside une partie de la classe productive, la grande industrie nécessite l'émigration, et par conséquent, la colonisation de contrées étrangères qui se transforment en greniers de matières premières pour la mère-patrie; c'est ainsi que l'Australie est devenue un immense magasin de laine pour l'Angleterre.
Une nouvelle division internationale du travail, imposée par les sièges principaux de la grande industrie, convertit de cette façon une partie du globe en champ de production agricole pour l'autre partie, qui devient par excellence le champ de production industriel. »
Un exemple parlant et récent est celui de la Chine, devenue « l'usine du monde » à partir de la contre-révolution dirigée par le révisionniste Deng Xiaoping. L'exode rural provoqué par l'orientation capitaliste y a été d'une brutalité terrible.
En 1980, la population vivant les villes était de 20 % du total, le chiffre est de 37,7 % en 2001, de 52,6 % en 2012.
43 % de la population vit dans les provinces du littoral, celles les plus liées au développement capitaliste et produisant 62 % du PIB en recevant 90 % des investissements étrangers. La taille de cette zone de 1,3 million de km² ; celle de la Chine centrale est en comparaison de 2,9 millions de km² (pour 31 % du PIB) et celle de la Chine orientale 5,4 millions de km² (pour 7 % du PIB). Le décalage témoigne du développement inégal typique du capitalisme et l’État chinois gère cela de manière fasciste, privant les migrants de droits sociaux et de ceux à l'éducation au moyen du système appelé hùkǒu
Il y a pas moins de 269 millions de travailleurs migrants et au moins soixante millions d'enfants vivant seuls avec les moyens du bord, privés de leurs parents qui ont été obligés de migrer pour parvenir à travailler, dont 40% des enfants de la province du Guizhou, où vivent 34 millions de personnes.
Le processus d'exode rural existe à l'échelle mondiale ; il est produit la domination du mode de production capitaliste sur l'ensemble des rapports sociaux.