5 avr 2015

Le rôle néfaste de Paul Éluard au PCF pour les arts et les lettres

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Paul Éluard (1895-1952) est une figure très importante dans l'histoire du Parti Communiste français. Il représente, en effet, le courant surréaliste l'ayant infiltré, l'ayant subverti : Paul Éluard et Louis Aragon ont formé un tandem particulièrement pernicieux.

Dans les années 1920, on sait que les Partis Communistes, tant en Russie qu'en Europe, ont été rejoints par une série d'artistes vivant la bohème et imaginant que leurs propres prétentions « avant-gardistes » correspondaient au communisme.

Éjecter ces bourgeois bohèmes d'avant l'heure a été une tâche impérative, et en France elle a échoué. Les débats particulièrement âpres entre le Parti Communiste Français et le Parti Communiste de Tchécoslovaquie à la fin des années 1940 et au tout début des années 1950 en témoignent.

En Tchécoslovaquie, Vitzeslav Nezval était un contact important pour les surréalistes et les « avant-gardistes » français, qui s'imaginaient qu'il pourrait diffuser leurs thèses, tout comme ils l'avaient régulièrement fait dans les années 1930, ainsi que juste après 1945 : bien mal leur en a pris.

Pour le communisme, l'art obéit aux principes du réalisme socialiste : reflet de la réalité, dimension typique, correspondance à la société d'une époque précise, prolongement des traditions démocratiques passées, etc.

Pour les « avant-gardistes » par contre, ce qui compte c'est purement et simplement l'inspiration totalement « libre », témoignage d'un individualisme total. Un poème de Paul Eluard est ici particulièrement connu dans le genre :

La terre est bleue comme une orange
Jamais une erreur les mots ne mentent pas
Ils ne vous donnent plus à chanter
Au tour des baisers de s’entendre
Les fous et les amours
Elle sa bouche d’alliance
Tous les secrets tous les sourires
Et quels vêtements d’indulgence
À la croire toute nue.

Les guêpes fleurissent vert
L’aube se passe autour du cou
Un collier de fenêtres
Des ailes couvrent les feuilles
Tu as toutes les joies solaires
Tout le soleil sur la terre
Sur les chemins de ta beauté.

Paul Eluard, Louis Aragon, Pablo Picasso… sont ainsi des artistes ayant vécu de manière décadente, mais se posant comme liés au Parti Communiste, comme si on pouvait séparer l'art et l'artiste de la réalité, par une muraille de Chine.

Leur motivation profonde, c'est un mélange de social et d'individualisme, une forme de parasitisme bourgeois et de christianisme social, les artistes fréquentant la haute bourgeoisie et les milieux littéraires, tout en « choisissant » le peuple.

Ces artistes, s'ils « soutenaient » le peuple, formaient une cercle bien fermé, une véritable clique défendant ses intérêts, surtout ses prérogatives, et s'auto-célébrant.

Voici un poème de 1922, ayant pour titre Max Ernst, du nom du peintre surréaliste :

« Dans un coin l’inceste agile
Tourne autour de la virginité d’une petite robe.
Dans un coin le ciel délivré
Aux épines de l’orage laisse des boules blanches.

Dans un coin plus clair de tous les yeux
On attend les poissons d’angoisse
Dans un coin la voiture de verdure de l’été
Immobile glorieuse et pour toujours.

À la lueur de la jeunesse
Des lampes allumées très tard
La première montre ses seins que tuent des insectes rouges. »

Par la suite, il refera un poème sur Max Ernst, comme sur d'autres peintres, comme Paul Klee, Georges Braque, Joan Miro, Salvador Dali, Man Ray, René Magritte, etc.. Voici par exemple un poème de 1924, ayant pour titre Giorgio de Chirico, du nom du peintre surréaliste :

Un mur dénonce un autre mur
Et l’ombre me défend de mon ombre peureuse,
Ô tour de mon amour autour de mon amour,
Tous les murs filaient blanc autour de mon silence.

Toi, que défendais-tu ? Ciel insensible et pur
Tremblant tu m’abritais. La lumière en relief
Sur le ciel qui n’est plus le miroir du soleil,
Les étoiles de jour parmi les feuilles vertes,

Le souvenir de ceux qui parlaient sans savoir,
Maîtres de ma faiblesse et je suis à leur place
Avec des yeux d’amour et des mains trop fidèles
Pour dépeupler un monde dont je suis absent.

Voici celui traitant de Pablo Picasso, en 1926 :

Les armes du sommeil ont creusé dans la nuit
Les sillons merveilleux qui séparent nos têtes.
À travers le diamant, toute médaille est fausse,
Sous le ciel éclatant, la terre est invisible.

Le visage du cœur a perdu ses couleurs
Et le soleil nous cherche et la neige est aveugle.
Si nous l'abandonnons, l'horizon a des ailes
Et nos regards au loin dissipent les erreurs.

Voici celui sur Jean Arp :

Tourne sans reflets aux courbes sans sourires des ombres à moustaches, enregistre les murmures de la vitesse, la terreur minuscule, cherche sous des cendres froides les plus petits oiseaux, ceux qui ne ferment jamais leurs ailes, résiste au vent.

Paul Eluard n'est pas un « avant-gardiste » qui a changé de point de vue, étant gagné au réalisme socialiste. Il connaissait d'ailleurs le russe et n'a jamais daigné prendre une position officielle, toisant le réalisme socialiste de son mépris, alors qu'en même temps toute son activité s'est toujours inscrite dans le cadre « avant-gardiste ».

En 1935, dans l'article « Je parle de ce qui est bien », on lit un éloge significatif :

« Parmi les hommes qui ont le mieux prouvé leur vie et dont on ne pourra dire qu'ils ont passé sur la terre sans aussitôt penser qu'ils y restent, Pablo Picasso se situe parmi les plus grands.

Après s’être soumis le monde, il a eu le courage de se retourner contre lui-même, sûr qu’il était, non de vaincre mais de se trouvé à sa taille (…). Il a, au mépris des notions admises du réel objectif, rétabli le contact entre l’objet et celui qui le voit et qui, par conséquent le pense, il nous a redonné de la façon la plus audacieuse, la plus sublime, les preuves inséparables de l’existence de l’Homme et du monde. »

Au moment même où s'affirme le réalisme socialiste en URSS, Paul Eluard salue donc le « mépris des notions admises du réel objectif ». Toute son incessante activité se situe dans cette perspective.

En 1937, il publie, par exemple, « Les mains libres », illustrant avec ses poèmes des dessins de Man Ray. En 1939, il publie « Jeux vague la poupée », quatorze poèmes accompagnés de deux photos de Hans Bellmer. Dans ces deux cas, on est dans une démarche brutalement perverse, avec une apologie du sado-masochisme, de la perversion en général.

Voici comment en 1939 également, il expose ce qui lui plaît chez Charles Baudelaire, dans une préface à un choix de poèmes de cet auteur qu'il a lui-même effectué :

« [Citant Baudelaire] « Je ne conçois guère (mon cerveau serait-il un miroir ensorcelé?) un type de Beauté où il n'y ait du Malheur. » Ce goût du Malheur fait de Baudelaire un poète éminemment moderne, au même titre que Lautréamont et Rimbaud.

A une époque où le sens du mot bonheur se dégrade de jour en jour, jusqu'à devenir synonyme d'inconscience, ce goût fatal est la vertu surnaturelle de Baudelaire. Ce miroir ensorcelé ne s'embue pas. »

Après la guerre, il continuera tout pareillement ses activités de surréaliste. L'œuvre avec Hans Bellmer sera par exemple réédité en 1949, à 142 exemplaires dont 6 hors commerce et 15 en version luxe : ce type de publications confidentielles vise ni plus ni moins que la haute bourgeoisie et les artistes de la bohème.

Ce qui a rapproché Paul Eluard du Parti Communiste, c'est son engagement progressiste politiquement, notamment pour la République espagnole, par exemple avec Solidarité, recueil au profit de l'Espagne républicaine réalisé par Paul Eluard, Pablo Picasso, Joan Miro, André Masson, Yves Tanguy, John Bucland Wright, Husband et Stanley William Hayter, qui sont tous des auteurs de type surréaliste, abstrait, etc.

Il y a ensuite l'engagement contre l'occupant nazi, avec la participation à la Résistance. Paul Eluard se rend également en avril 1948 au Congrès pour la paix en 1948, ou encore à la fin mai 1949 en Grèce, où sur le mont Grammos, il vit avec les partisans pendant plusieurs jours, s'adressant aux soldats de l'armée réactionnaire depuis des tranchées, ses propos étant traduit en grec, diffusés par deux cents porte-voix.

Il était donc possible et nécessaire de discuter avec Paul Eluard, de faire front avec lui contre le fascisme, mais ses conceptions étaient décadentes, elles relevaient de la bourgeoisie s'effondrant, et il n'avait aucunement sa place dans un Parti Communiste digne de ce nom.

Ici, il faut comprendre comment le fascisme s'exprime tant à l'extrême-droite que dans l'ultra-gauche, une ultra-gauche dont vient justement Paul Eluard.

En 1925, Paul Eluard signait ainsi le manifeste surréaliste intitulé « La Révolution d’abord et toujours ! », où on lit des phrases grandiloquentes, anticapitalistes romantiques, comme :

« Nous sommes certainement des Barbares puisqu’une certaine forme de civilisation nous écœure.

Partout où règne la civilisation occidentale toutes attaches humaines ont cessé à l’exception de celles qui avaient pour raison d’être l’intérêt, « le dur paiement au comptant ». Depuis plus d’un siècle la dignité humaine est ravalée au rang de valeur d’échange.

Il est déjà injuste, il est monstrueux que qui ne possède pas soit asservi par qui possède, mais lorsque cette oppression dépasse le cadre d’un simple salaire à payer, et prend par exemple la forme de l’esclavage que la haute finance internationale fait peser sur les peuples, c’est une iniquité qu’aucun massacre ne parviendra à expier. »

En 1930, dans « Ralentir travaux », en collaboration avec André Breton et René Char, Paul Eluard définit ainsi l'activité artistique, clairement dans la logique décadente, ultra-individualiste :

« L'idée que l'on peut se faire en secret de la poésie ne limite pas forcément celle-ci. Mais comme les rêves inavouables elle risque de causer des troubles de mémoire et d'empêcher la formation régulière d'un monde supérieur à celui où l'oubli est utile à la conservation prudente de l'individu.

Il faut effacer le reflet de la personnalité pour que l'inspiration bondisse à tout jamais du miroir. Laissez les influences jouer librement, inventez ce qui a déjà été inventé, ce qui est hors de doute, ce qui est incroyable, donnez à la spontanéité sa valeur pure. Soyez celui à qui l'on parle et qui est entendu. Une seule vision, variée à l'infini.

Le poète est celui qui inspire bien plus que celui qui est inspiré. »

Cela alla, cependant, dans le contexte des années 1930, avec une mystification : celle d'assumer le communisme. En 1937, dans L'évidence poétique, Paul Eluard dit ainsi, dans un grand mélange idéologique absolument typique des futuristes russes, des cubistes tchèques, des surréalistes français, qui s'imaginent être l'aile artistique de la révolution prolétarienne :

« C’est ce bien, c’est ce beau asservis aux idées de propriété, de famille, de religion, de patrie, que nous combattons ensemble. Les poètes dignes de ce nom refusent, comme les prolétaires, d’être exploités.

La poésie véritable est incluse dans tout ce qui ne se conforme pas à cette morale qui, pour maintenir son ordre, son prestige, ne sait construire que des banques, des casernes, des prisons, des églises, des bordels.

La poésie véritable est incluse dans tout ce qui affranchit l’homme de ce bien épouvantable qui a le visage de la mort. Elle est aussi bien dans l’œuvre de Sade, de Marx ou de Picasso que dans celle de Rimbaud, de Lautréamont ou de Freud.

Elle est dans l’invention de la radio, dans l'exploit du Tchéliouskine, dans la révolution des Asturies, dans les grèves de France et de Belgique. Elle peut être aussi bien dans la froide nécessité, celle de connaître ou de mieux  manger, que dans le goût du merveilleux.

Depuis plus de cent ans, les poètes sont descendus des sommets sur lesquels ils se croyaient. Ils sont allés dans les rues, ils ont insulté leurs maîtres, ils n'ont plus de dieux, ils osent embrasser la beauté et l'amour sur la bouche, ils ont appris les chants de révolte de la foule malheureuse et, sans se rebuter, essaient de lui apprendre les leurs.

Peu leur importent les sarcasmes et les rires, ils y sont habitués, mais ils ont maintenant l'assurance de parler pour tous. Ils ont leur conscience pour eux. »

On comprend tout à fait qu'une fois dans le Parti Communiste, Eluard ait pu participer au renforcement du révisionnisme. Son soutien à Victor Hugo comme grande figure littéraire est une véritable agression à l'encontre du matérialisme dialectique, un soutien ouvert aux tendances anti-réaliste socialiste qui gangrenaient le Parti Communiste en Union Soviétique.

Si l'on veut d'ailleurs réellement comprendre impeccablement la nature social-démocrate du PCF, son basculement logique dans le révisionnisme, il suffit de lire le poème écrit par Eluard à l'occasion du 12e congrès du PCF, en avril 1950 :

Où en est-on à Gennevilliers
Où en est-on entre camarades
Et le Viet-Nam vient nous saluer
Dix étudiants légers et purs
Graves reflètent nos raisons
De vouloir abolir la honte

Thorez nous parle l'affection
La vérité moulent sa voix
Sa violence est de bonté
Sa clarté nous peint le possible
Tout le possible le bonheur
La paix si simple dans l'union

Thorez nous parle de justice
La France est le pays de justice
Il parle pour ceux qui travaillent
Pour ceux qui construisent la vie
Pour ceux qui tiennent dans leurs mains
La force d'assurer demain

La force d'être fraternels

Il en va de même pour « Joseph Staline », poème lu par Paul Eluard pour le film réalisé à l'occasion du 70e anniversaire de Staline, intitulé « L'homme que nous aimons le plus ».

Staline n'est pas compris comme une figure idéologique, mais comme l'URSS, en tant que force d'appui à l'esprit « social » qui devrait prédominer en France.

Staline est littéralement déminéralisé, il est un outil, une force d'appoint ; il ne représente rien sur le plan du contenu.

Les hommes surgissaient d’un lointain paysage
Ils avaient tous du cœur mais ils perdaient leurs forces
Ils s’embrumaient et rêvant d’or étaient de plomb
Les hommes surgissaient de leur enfance naine
Arriérés retardés ils adoraient les nuages
Misère charité leur paraissaient sacrées

Ô mes semblables morts anciens ou nés d’hier
Visages de santé qu’a vieillis l’esclavage
Vos besoins vous donnaient le désir d’être libres
Le désir d’être heureux le désir d’être forts
Forts avec la douceur d’une vitre très claire
Qui ne trouble pas l’onde où se reflète un frère

Et mille et mille frères ont porté Karl Marx
Et mille et mille frères ont porté Lénine
Et Staline pour nous est présent pour demain
Et Staline dissipe aujourd’hui le malheur
La confiance est le fruit de son cerveau d’amour
La grappe raisonnable tant elle est parfaite

Grâce à lui nous vivons sans connaître d’automne
L’horizon de Staline est toujours renaissant
Nous vivons sans douter et même au fond de l’ombre
Nous produisons la vie et réglons l’avenir
Il n’y a pas pour nous de jour sans lendemain
D’aurore sans midi de fraîcheur sans chaleur

Staline dans le coeur des hommes est un homme
Sous sa forme mortelle avec des cheveux gris
Brûlant d’un feu sanguin dans la vigne des hommes
Staline récompense les meilleurs des hommes
Et rend à leurs travaux la vertu du plaisir
Car travailler pour vivre est agir sur la vie

Car la vie et les hommes ont élu Staline
Pour figurer sur terre leurs espoirs sans bornes.

Paul Eluard a été une figure subjectiviste infiltrée dans le PCF ; son rôle a été particulièrement néfaste.