25 fév 2012

Il y a 40 ans, le 25 février 1972, le militant maoïste Pierre Overney était assassiné

Submitted by Anonyme (non vérifié)

Il y a 40 ans, le 25 février 1972, le militant maoïste Pierre Overney était abattu aux portes de l'usine Renault de Boulogne Billancourt, en banlieue parisienne. Une des plus grandes usines de France, une place-forte de la classe ouvrière, qui a été fermée en 1989 et détruite en 2005.

Et, en raison de la dimension de l'usine, à l'époque, c'était un lieu symbole de la bataille entre la Gauche Prolétarienne qui avait levé le drapeau de Mao Zedong et le Parti « Communiste » français qui, avec la CGT, maintenait la classe ouvrière dans le légalisme, le syndicalisme, l'électoralisme (voir ici les archives de la Gauche Prolétarienne - la Cause du Peuple).

La Gauche Prolétarienne, dont les révolutionnaires en France doivent se revendiquer avec fierté ; c'est une étape historique dans la tentative de développer le maoïsme, et d'ailleurs l'impact de la Gauche Prolétarienne s'étendra à toute l'Europe.

Et l'assassinat d'Overney est une date clef, car elle marque justement l'échec de la Gauche Prolétarienne ; le cortège funéraire de 120 000 personnes le 4 mars 1972, aboutissant au célèbre cimetière du Père-Lachaise, est considéré comme la dernière grande date du gauchisme né avec mai 1968.

La Gauche Prolétarienne aurait pourtant pu renverser cette défaite en victoire. Ainsi, le 8 mars 1972, la Gauche Prolétarienne organisa l'enlèvement de Robert Nogrette, chef-adjoint chargé des relations sociales à Billancourt, par l'intermédiaire de son embryon d'organisation clandestine pour la guerre des partisans : la Nouvelle Résistance Populaire (NRP).

Cependant, Nogrette fut libéré deux jours après ; la Gauche Prolétarienne refusa « l'engrenage », c'est-à-dire la Guerre Populaire. Par conséquent, elle se précipita dans l'auto-dissolution, la liquidation.

Une liquidation qui fut le fruit d'une énorme faiblesse idéologique dans la compréhension du maoïsme, réduit de plus en plus à une ligne de masse ouvertement spontanéiste, avec la négation de la dictature du prolétariat et du caractère scientifique de l'idéologie communiste.

Une liquidation à comparer, bien entendu, avec le Parti Communiste du Pérou qui lui inversement a assumé le maoïsme véritablement et donc réussi à réaliser le maoïsme dans la pratique. Le Parti Communiste du Pérou a réussi exactement là où la Gauche Prolétarienne a échoué.

La raison de cet échec tient bien entendu, principalement, à l'incompréhension du matérialisme dialectique, aboutissant à la négation du processus dialectique, de la confrontation idéologique, et donc à la soumission à l'anarchisme, au spontanéisme.

Une expression radicale de ce spontanéisme sera l'exécution de Tramoni, le 23 mars 1977 , revendiquée par les Noyaux Armés pour l'Autonomie Populaire (NAPAP). Un acte qui est composant historique de la résistance révolutionnaire totalement spontanéiste des années 1970, réalisé par des « post-maoïstes » – les « veuves Mao » - qui fusionnent avec le mouvement autonome, et dans un mix où naîtra l'autonomie offensive ainsi qu'Action Directe.

Action Directe revendiquera justement, en 1986, en tant que commando « Pierre Overney », l'exécution du PDG de Renault, Georges Besse, haut cadre dirigeant des entreprises publiques (et exécuté pour cette raison, ce qui ne sera pas compris en raison de la référence à Overney ramenant en effet à l'histoire de Renault).

Mais quand on lit les documents des NAPAP ou d'Action Directe, on reconnaît aisément un post-maoïsme largement ouvert à l'anarchisme, avec une dynamique anti-communiste très nette.

Ainsi, la mort de Pierre Overney a deux aspects : l'échec de la Gauche Prolétarienne d'un côté, marquant l'échec à installer l'idéologie maoïste en France comme base de la reconstruction d'un Parti Communiste authentique.

De l'autre une logique de « justice » prolongeant celle de la Gauche Prolétarienne et tout aussi idéaliste et « moraliste », qui ne débouchera que sur un effondrement complet avec l'élection du socialiste Mitterrand à la présidence en 1981.

Si l'on prolonge ce dernier moment, on arrive d'ailleurs à aujourd'hui. La CNT, le syndicat mi-syndicaliste-révolutionnaire mi-anarcho-syndicaliste ayant eu un succès important dans les années 1990, s'est en partie relancé sur les décombres de la Gauche Prolétarienne.

La Gauche Prolétarienne n'a poursuivi en rien son maoïsme ; ses militantEs et cadres sont passéEs en masse dans l'apolitisme, la réaction ou le spontanéisme syndicaliste.

Un exemple parlant est Dominique Grange, dont nous avions remis en ligne (en mp3) la chanson « les nouveaux partisans » chantée alors anonymement, et qui a totalement révisé l'histoire, comme nous le constations en février 2007 :

"Les Français se sont arrêtés au bord du gouffre." Voilà ce que dit Dominique Grange dans un interview à Rouge, l'organe de la LCR. Pas étonnant qu'elle invite Geismar!

Ni qu'elle reprenne "ses" chansons révolutionnaires des années 1970 alors qu'à l'époque, prenant comme modèle les gardes-rouges, elle abandonnait sa carrière de chanteuse pop pour devenir une combattante maoïste anonyme, au service du peuple.

Quand on pense (comme déjà dit) que sa bio présentée par le Monde Libertaire ne mentionne même pas le mot maoïste et qu'elle-même dit dans la revue anarchiste Barricata au sujet de son passé que "La Chine ne m’intéressait pas du tout. La Révolution culturelle, le «peuple d’un milliard de philosophes», ça ne faisait pas bondir les gens".

Du pur pipeau révisionniste que tout cela, de A à Z, à comparer avec son document (en ligne) "Un chant qui monte de la terre" (1970) et naturellement le mp3 du grand classique maoïste, Les Nouveaux Partisans...

La position de Grange - « J’aurais préférée ne pas faire ce détour... » - est la position traditionnelle des gens ayant été maoïstes, et ayant été happé par la contre-révolution, car la base idéologique du maoïsme en France était trop précaire – ce qui n'enlève rien au caractère positif et héroïque de la Gauche Prolétarienne pour tenter de lancer le processus.

La Gauche Prolétarienne a posé la base de la Guerre Populaire ; le document De la lutte violente des partisans est historique et d'une grande importance. Le PCMLM est d'ailleurs la première organisation à avoir remis en avant la Gauche Prolétarienne et sa culture, tout en exposant les limites historiques.

Mais la Gauche Prolétarienne a montré des limites historiques, qui appartiennent à un passé maintenant lointain et totalement coupé des masses populaires aujourd'hui, et si on regarde la Gauche Prolétarienne, c'est pour mieux regarder, au-delà, vers le Parti Communiste du Pérou et ses enseignements.

La Gauche Prolétarienne a échoué à reconstituer le Parti Communiste, elle a échoué à synthétiser le maoïsme, elle a échoué dans sa confrontation avec l'idéologie bourgeoise. Elle est une expérience du passé, marquée par un spontanéisme outrancier, parfois même ouvertement populiste; elle est une expérience du passé, reflet du niveau idéologique du communisme en France à un certain moment, avec ses forces et ses faiblesses.

Pierre Overney, notre camarade, est une flamme vivante de cette expérience historique; il faut honorer sa mémoire, ce qui ne peut être fait qu'en réalisant l'objectif initial de la Gauche Prolétarienne: synthétiser le maoïsme!

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