Le projet de taxe Tobin par Sarkozy
Submitted by Anonyme (non vérifié)Les altermondialistes en avaient fait leur cheval de bataille – et là Sarkozy demande à ce que cela soit appliqué !
Quelle étrange surprise la position de la taxe Tobin a été pour ceux qui n'ont pas compris comme nous la différence entre la bourgeoisie traditionnelle et la bourgeoisie impérialiste !
Car, somme toute, c'est logique.
En quoi consiste, en effet, la taxe dite Tobin ? Il s'agit d'appliquer sur certaines opérations financières, un taxe de l'ordre de 0,1%. Pas grand chose en soi, sauf que les sommes sont colossales...
Tobin est le nom de l'économiste qui avait lancé l'idée d'une telle taxe dans les années 1970, afin disait-il de limiter la spéculation financière.
L'idée est reprise par les altermondialistes, qui fondent à partir de la revue « Le Monde diplomatique » l'association ATTAC à la fin des années 1990.
ATTAC est un acronyme signifiant justement : « Association pour une taxe Tobin d'aide aux citoyens. »
Le sens a par la suite été modifié devant le succès de l'association (présente dans 38 pays désormais), en raison du fait que Tobin est un libéral et ne voulait pas s'associer au projet.
Voici ce qu'il disait dans une interview au journal Le Monde :
M. Tobin, vous êtes là tranquillement, imperturbablement assis au bord de ce lac, pendant que les opposants à la mondialisation en Europe font la révolution sous votre nom. Cela ne vous incite-t-il pas à quitter votre banc et ce jardin ?
Certainement pas. Je n'ai rien de commun avec les praticiens de cette révolution contre la "mondialisation".
L'organisation contestataire Attac a commencé par emprunter votre nom ; les opposants à la mondialisation réclament une taxe Tobin. N'est-ce pas pour vous aujourd'hui une satisfaction, trente ans après en avoir fait la proposition, que votreidée de taxe contre la spéculation sur les opérations de change trouve enfin des défenseurs ?
J'apprécie l'intérêt qu'on porte à mon idée, mais beaucoup de ces éloges ne viennent pas d'où il faut. Je suis économiste et, comme la plupart des économistes, je défends le libre échange. De plus, je soutiens le Fonds monétaire international (FMI), la Banque mondiale et l'Organisation mondiale du commerce (OMC), tout ce à quoi ces mouvements s'en prennent. On détourne mon nom.
ATTAC est donc devenu « l’Association pour la taxation des transactions financières et pour l’action citoyenne » et a connu un très grand succès.
ATTAC a en effet servi de laboratoire d'idées à la social-démocratie et aux révisionnistes du P« C »F, au point que le candidat socialiste à la présidentielle Lionel Jospin l'avait instauré dans son programme en 1995 et qu'en 2000 le parlement européen a repoussé une étude sur la faisabilité de la taxe (par 229 voix contre 223).
Mais si c'est un projet « de gauche », pourquoi Sarkozy est-il pour ? N'est-il pas un défenseur acharné du capital, refusant tout compromis du type social-démocrate ?
Eh bien, Sarkozy est une défenseur de tout le capital, mais il est l'homme de main de la bourgeoisie industrielle. Celle-ci entend conserver le statu quo, mais pour cela l'Etat bourgeois a besoin d'argent. D'où la taxe Tobin.
Ainsi, Nicolas Sarkozy affirme désormais vouloir mettre en place cette taxe et il est parlé de 55 Milliard d'Euros par an à dégager au profit de l’État (à partir de 2014).
Et évidemment, peine l'annonce faite de la mise en place de cette taxe, que des banquiers, courtiers en Bourse ou autres analystes financiers se précipitaient sur les ondes radios et sur internet pour s'y opposer, dire que cela était irréalisable, que cela va faire couler la France, etc.
Le président de l'association Paris Europlace, une association importante regroupant différents acteurs de la « place financière de Paris » tel que des banques, des intermédiaires financiers, des investisseurs ou des sociétés d'assurance, expliquait par exemple dans la presse : « si cette taxe était appliquée seulement en France, elle entraînerait inéluctablement une délocalisation des activités concernées des banques, sociétés d’assurance et sociétés de gestion, au profit des grandes places financières mondiales. »
Baudouin Prot, le président de BNP Paribas, l'une des principale banque française, affirme la même chose depuis le début de la semaine, de la même manière que des représentants de d'autres banques d'affaire.
Dominique De Villepin, homme déchu de la Bourgeoisie financière, s'est empressé de critiquer la mise en place de cette taxe par Nicolas Sarkozy.
Marine Le Pen pour sa part, autre représentante de la bourgeoisie financière, se dit « pour » mais considère que cela ne sera jamais appliqué au niveau européen, donc qu'elle est... contre !
Il y a là l'expression très nette d'une contradiction au sein de la bourgeoisie. ATTAC a donc tort d'expliquer, par la voix de son ancien président Jean-Marie Harribey, que Sarkozy serait un simple opportuniste :
« Pourquoi une telle volte-face ? La raison est bien évidement politicienne, nul ne peut en douter à quatre mois de l'élection présidentielle et à cinq des législatives. »
Car Sarkozy est bien d'accord pour que la bourgeoisie financière paye plus ! Et quand ce même ancien président d'ATTAC dit :
« Mais il faut bien comprendre qu'Attac défend la taxe Tobin dans le cadre de mesures plus vastes, qui permettraient la mise au pas et le contrôle démocratique des activités bancaires, à savoir :
- Le contrôle de la banque centrale et la socialisation des banques.
- La séparation entre les banques de dépôts, qui financent l'économie, et les banques d'affaires, qui servent à la spéculation.
- La mise au ban des paradis fiscaux, notamment via l'interdiction des filiales de banques dans ces paradis »
Il dit quelque chose d'acceptable par la bourgeoisie industrielle, qui ne comprend justement pas les banques ! La bourgeoisie traditionnelle veut le capitalisme partout, mais s'il ne doit rester qu'une forme de capitalisme, alors elle préfère la sienne !
Elle serait même prête à accepter la taxe générale sur les spéculations financières, proposé par diverses associations sous le sigle « Robin des Bois » (l'image de Robin des Bois est là comme si le seul le capital financier était en cause, et à l'origine de toute exploitation!).
Sauf qu'historiquement, c'est justement la bourgeoisie financière qui l'emporte, étant plus forte avec le processus de généralisation de grands monopoles et avec le fascisme et la guerre comme expression.
Sarkozy, avec la taxe Tobin appliqué non pas aux « grandes causes » (SIDA, « développement des pays du Sud », etc.) mais au renflouement des caisses de l’État bourgeois, tente de ralentir les échéances historiques...