Ravi Shankar, la culture au-delà des frontières
Submitted by Anonyme (non vérifié)Ravi Shankar, le grand musicien indien, est décédé hier 12 décembre 2012. Une triste nouvelle pour toutes les personnes respectant et aimant la culture, appréciant également la contribution de l'Inde.
Ravi Shankar a eu comme gourou Baba Khan Allauddin (1862-1972), l'un des plus grands artistes de la musique classique indienne, qui avait comme livres de chevet à la fois le Coran et la Bhagavad-Gita, vivant dans les traditions mixtes qui ont enrichi l'Inde.
Par conséquent, Ravi Shankar démenagea chez Allauddin Khan en 1938, pour étudier 7 ans dans un village isolé, laissant une vie qui était déjà internationale, pour ne pas dire cosmopolite, par la carrière artistique de ses parents, de Paris à Londres et Hollywood, rencontrant des artistes comme Duke Ellington, Louis Armstrong et Cole Porter. Ainsi, il est devenu le grand musicien que le monde connut vite par la suite, avec une carrière qui parle pour elle-même.
D'un côté, les activités de Ravi Shankar furent en convergence avec l'Etat semi-colonial, dans son aspect national: il a travaillé comme directeur musical pour la All India Radio à New Delhi de février 1949 à janvier 1956 ; il a même fondé là-bas l'Indian National Orchestra.
De l'autre côté, Ravi Shankar s'est installé pendant une période à Bombay, pour rejoindre la fameuse Indian People's Theatre Association, qui a eu une grande influence progressiste dans la culture indienne ; il a écrit la musique de la célèbre trilogie d'Apu de Satyajit Ray, donnant contribution à une grande oeuvre progressiste.
Ravi Shankar a ensuite prouvé que son travail tendait au mouvement universel de l'histoire. Il a incorporé des ragas de la musique carnatique indienne du sud dans ses performances, montrant qu'il n'était pas un Indien du nord chauvin,. Il a travaillé aussi, sans aucun préjugé ethnique qui aurait pu provenir de son arrière-plan brahmanique, avec le grand artiste de jazz John Coltrane, qui a été très influencé par lui.
Il a collaboré avec le violoniste Yehudi Menuhin, a influencé des artistes européens, comme George Harrison des Beatles, un véritable amoureux de la culture indienne, qui a organisé en août 1971 le concert historique pour le Bangladesh, auquel Ravi Shankar a participé. Cette influence peut être vu aussi dans les œuvres de The Byrds, de Brian Jones (dans les Rolling Stones) ou Robbie Krieger (dans les Doors).
Ravi Shankar a participé en 1958 au festival de musique des célébrations du dixième anniversaire de l'Organisation des Nations Unies et l'UNESCO à Paris, au Monterey Pop Festival en 1967 et au Festival de Woodstock en août 1969; il avait déjà une renommée internationale dans les années 1960.
Ravi Shankar avait voulu quitter le festival de Woodstock, lorsque Hendrix a brûlé sa guitare ; il a raconté: « Et puis il a fait cette chose avec son instrument, quand il a ouvert un bidon d'essence et brûlé sa guitare. Les gens sont devenus gagas devant cela, ils ont adoré. Mais pour moi, l'incendie de la guitare était le plus grand sacrilège possible. Je me suis enfui de là. Je leur ai dit que même si je devais payer une sorte de compensation pour ne plus avoir à jouer lors du festival, je ne pouvais juste pas le faire. »
Ravi Shankar a exprimé également sa déception au sujet de la perception américaine et ouest-européenne de l'Inde: « J'ai été extrêmement mécontent de la superficialité de tout cela [à Woodstock], en particulier la mauvaise information que le Dr. Timothy Leary et d'autres propageaient - que tout le monde en Inde prenaient des drogues. C'était un méli-mélo de Kama Sutra, de Tantra, de Yoga, de hasch et de LSD, alors que la vraie qualité spirituelle de notre musique a été presque entièrement perdue. »
En effet, la superficialité est toujours vivante de nos jours. Lors de la Conférence de solidarité avec la guerre populaire en Inde qui s'est tenue à Hambourg, le slogan « Lal Salaam » a été écrit sur une banderole, en... hindi! Alors que la guerre populaire est présente dans une vaste zone historiquement envahie par les forces aryennes dans le passé, là où les langues sont loin du hindi, qui est la langue officielle de l'État central... Sans oublier que de mettre les lettres dans l'alphabet hindi est sans aucun doute une insulte à la communauté culturelle musulmane de l'Inde du nord, où la langue est tout à fait la même que le hindi, mais dans l'alphabet arabe (c'est l'ourdou, le mot « salam » vient bien sûr de cette culture).
La complexité de l'Inde était bien connue de Ravi Shankar, c'est pourquoi son œuvre est pleine de mélange, de traversée culturelle, d'expérimentation, en particulier dans la question du rythme. Il accorde une place importante à la percussion, à l'ambiance d'une œuvre.
Ravi Shankar est en fait le grand représentant de l'Inde dans le grand rendez-vous de la musique classique européenne, de la pop anglo-américaine, du jazz afro-américain et de la musique indienne. Dans la musique indienne, il a joué un grand rôle aussi, présentant la réunion du style plus improvisé de l'Inde du Nord et de l'approche plus rigide du sud de l'Inde.
Ravi Shankar signifie la culture au-delà des frontières, il est un symbole de la confluence internationale des cultures nationales, leur synthèse. Ses travaux devraient être étudiés à l'école en France, pour faire comprendre la valeur universelle de la culture, afin d'élever le niveau culturel.
Mais bien sûr, cela ne peut se produire que dans une France socialiste, étant donné que pour les bourgeois Ravi Shankar n'était qu'un génie exotique qui a été intégré dans le divertissement occidental. Ravi Shankar, certes, a trahi ici la culture indienne en suivant des appels bourgeois, en particulier ceux des États-Unis. Il est devenu un membre l'élite indienne et du divertissement bourgeois dans les sociétés capitalistes.
Heureusement, il signifie plus que cela, et cet aspect doit être compris; Ravi Shankar est incontournable.