3 mai 2011

Qu’est-ce que Linux, qui a maintenant 20 ans ?

Submitted by Anonyme (non vérifié)

Il y a 20 ans Linus Torvalds commençait le développement du noyau Linux. En fait, mais c’est un détail, Linux sera réellement déposé dans sa version 0.01 sur les serveurs de son Université en Septembre 1991, mais c’est bien au mois d’Avril 1991 que ce jeune hacker a commencé le processus de production de Linux.

Ce qui compte par contre, comme nous le disons régulièrement, pour nous il s’agit d’un « marqueur culturel » important dans le monde d’aujourd’hui. En effet, alors que l’informatique et l’électronique font maintenant partie du quotidien des masses et sont devenues des composantes essentielles de la production, les tendances contradictoires qui les traversent ont un impact culturel important.

Donc qu’est-ce que Linux ?

Linux est un noyau de système d’exploitation. Un système d’exploitation c’est l’ensemble des programmes qui sert d’interface entre le matériel informatique (la mémoire, le microprocesseur, la
carte vidéo, etc.) et les programmes applicatifs (un jeu ou un traitement de texte par exemple).

Windows 7 par exemple est un système d’exploitation, Mac OS 10 aussi.

Linux est-il donc un système d’exploitation ? Non, en fait ce qu’a créé et que continue de développer Linux Torvalds et toute l’équipe qui travaille avec lui c’est le « noyau » d’un système d’exploitation.

Le noyau (« kernel » en anglais) d’un système d’exploitation, c’est le logiciel fondamental d’un système d’exploitation : celui qui gère les ressources matérielles de l’ordinateur, qui gère les logiciels (lancement des programmes, ordre d’exécution, etc.) et qui permet la communication entre les logiciels et le matériel.

Donc Linux est un gros logiciel. Mais en quoi son rôle a-t-il été important ?

Son importance réside dans l’esprit dans lequel Linus Torvalds l’a créé, et cet esprit se matérialise dans sa licence. En effet, le noyau Linux a été placé tout de suite dans un format de licence « libre » restrictive, la licence GPL (pour GNU Public Licence). En faisant cela, Linus Torvalds a permis que se développent des systèmes d’exploitation « libres. »

Avant la création de Linux, il y avait le projet GNU. Le projet GNU est une communauté de hackers réunie autour de Richard Stallman et dont le but était de produire un système d’exploitation totalement libre. Par « libre », il est entendu plusieurs choses :

- la liberté d’exécuter le programme, pour tous les usages,

- la liberté d’étudier le fonctionnement du programme et de l’adapter à ses besoins,

- la liberté de redistribuer des copies du programme (ce qui implique la possibilité aussi bien de donner que de vendre des copies),

- la liberté d’améliorer le programme et de distribuer ces améliorations au public, pour en faire profiter toute la communauté.

Comme on le voit, l’idée est assez simple : pouvoir étudier, copier, améliorer, redistribuer des programmes informatiques. En fait, cette idée de « logiciels libres » est la formalisation de l’esprit contestataire et collectiviste qui régnait dans les communautés hackers – principalement issues des universités californiennes.

L’objectif était de résister à la tendance de plus en plus monopolisatrice des entreprises de l’informatique et principalement de Microsoft et Apple qui commençaient à se développer et à phagocyter la marché.

Les licences d’utilisation ont été une arme extrêmement puissante pour le développement des monopoles capitalistes dans les domaines de l’électronique et de l’informatique.

En effet, en empêchant quiconque d’autres que leurs entreprises d’avoir accès aux codes des programmes informatiques, les trusts capitalistes bloquent volontairement le développement des forces de production et leur permettent ainsi de s’accaparer l’hégémonie sur tout une branche d’industrie. C’est ainsi qu’ont fonctionné Microsoft, Intel, Apple, Cisco, etc.

Donc, le projet GNU a développé un grand nombre de logiciels pouvant servir pour un système d’exploitation, il a donné un cadre légal aux logiciels libres avec la licence GPL et la Free Software Foundation, mais il n’a pas réussi à développer un noyau pour son système d’exploitation – ce qui est une tâche très lourde.

Ainsi, en plaçant son projet de noyau sous licence GPL, Linus Torvalds a pu libérer le projet GNU de cette tâche.

En moins d’un an après la mise à disposition du noyau Linux sont donc apparues les premières « distributions GNU/Linux ». C’est-à-dire des logiciels libres venant du projet GNU assemblés autour du noyau Linux.

Depuis 20 ans, ces systèmes n’ont cessé de se développer. Aujourd’hui il existe des dizaines de milliers de logiciels libres dans tous les domaines : logiciels de programmation, jeux vidéos, outils de bureautique, navigateurs internet, logiciels de traitement du son, etc.

Parmi les plus connus du grand public on peut citer le navigateur Firefox, le logiciel de PAO Gimp, la suite OpenOffice (devenu LibreOffice), le lecteur multimédia VLC. Le système d’exploitation Android qui est le plus répandu sur les smartphones est basé sur Linux, tout comme le logiciel qui fait tourner les Freebox.

Des dizaines de communautés de développeurs se sont créées pour développer des projets informatiques comme le noyau Linux, les dizaines de distributions Linux, des environnements de bureau, des langages de programmation, etc…

Autour de ces communautés de développeurs se sont ensuite regroupées des communautés d’utilisateurs qui aident les développeurs dans leurs travail (bénévoles pour beaucoup) en leur rapportant les bogues, en donnant leur avis, en organisant des « install parties » pour faire connaître le logiciel libre, etc.

Il est notoire que les premiers chat et les premiers forums ont été à l’origine créés et utilisés par les communautés de hackers, puis celles d’utilisateurs de logiciels libres pour débattre (parfois de manière virulente).

Évidemment, l’esprit le plus hégémonique qui domine dans les communautés du logiciel libre reste essentiellement social-démocrate, certaines des communautés les plus importantes se sont lancées dans une tentative de « capitalisme éthique » tout ce qu’il y a de plus idéaliste, d’autres sont totalement dépendantes du bon vouloir de milliardaires philanthropes.

Mais comme on le voit, l’aspect le plus important reste le côté fortement contre-culturel de ces communautés.

Ceci est dû à deux choses.

D’abord, par nature, elles s’affrontent directement aux monopoles capitalistes parmi les plus puissants qui ne ratent pas une occasion de tenter de briser la démarche du logiciel libre, d’enfoncer ou de racheter le moindre projet GPL, qui font tout pour que les distributions GNU/Linux ne se développent pas auprès du grand public.

Ces communautés demandent donc un niveau d’engagement militant assez élevé et repose sur le travail bénévole de la plupart de ceux qui y participent.

L’aspect démocratique saute ici aux yeux. Linus Torvalds explique cela de cette manière : « J’aime vraiment programmer et je veux rendre disponible mon travail pour que les autres puissent en profiter. Mais je pense vraiment que tout le « vous pouvez faire ce que vous voulez, mais vos améliorations doivent être disponibles de la même manière que le code d’origine » est très juste, et que c’est un très bon moyen de faire du développement. »

Voilà un état d’esprit permettant de progresser, de faire des sauts qualitatifs.

Inversement, en empêchant l’accès aux sources des programmes informatiques, les monopoles empêchent que quiconque puisse les étudier.

En faisant cela, ils maintiennent la séparation entre travail manuel et travail intellectuel ; ceux qui utilisent des outils informatiques ou électroniques pour produire des biens sont dépossédés de la compréhension du fonctionnement de ces outils.

Il est donc progressiste que dans les communautés du logiciel libre soit mise en avant une dimension pédagogique très forte et une démarche coopérative.

Utiliser et défendre les systèmes GNU/Linux, participer aux communautés du logiciel libre même à un petit niveau sont des devoirs pour quiconque se dit révolutionnaire aujourd’hui.

Il en va du refus de la domination tyrannique des monopoles, de la mise en commun des biens culturels et scientifiques au service de l’Humanité toute entière, de l’avancée dans la communauté universelle !

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