La collection «publique» d'Yvon Lambert
Submitted by Anonyme (non vérifié)C'est un cas d'école du coup de force post-moderne, de l'imposition par en haut d'une approche subjectiviste de la vie.
En apparence, on a un richissime galeriste qui « donne » à la population un petit musée, avec des œuvres d'art permettant de faire progresser la culture. En réalité, on a un bourgeois célébrant son ego en obligeant l'État à lui donner son propre musée, dont la substance en elle-même est l'accumulation subjectiviste, l'irrationnel propre à l'art contemporain.
Historiquement, Yvon Lambert, né en 1936, a justement fait fortune en tant que galeriste parisien à partir du milieu des années 1960, en contribuant à porter l'art contemporain comme idéologie de la bourgeoisie la plus moderne, c'est-à-dire celle portée surtout par le capital financier.
Il a commencé par le pop art et le minimalisme, avant de jouer un rôle clef dans l'explosion commerciale de l'art contemporain dans les années 1980, par l'intermédiaire des artistes décadents français Robert Combas et Jean-Charles Blais, ainsi que des Allemands Helmut Middendorf, Rainer Fetting et Bernd Zimmer. L'apogée fut alors bien entendu une galerie à New York, avec des artistes comme Christian Boltanski, Anselm Kiefer ou encore Joseph Kosuth.
Situé dans un hôtel particulier du XVIIIe siècle, l’hôtel de Caumont à Avignon, le nouveau « musée » – en réalité la collection façonnée par Yvon Lambert – a d'ailleurs tellement une logique militante qu'il y a un secteur réservé dans un second hôtel particulier pour une exposition temporaire. La première est consacrée à faire l'éloge, par l'art contemporain, du metteur en scène Patrice Chéreau, une figure très importante du post-modernisme dans le théâtre.
Il est révélateur que les deux bâtiments aient consisté auparavant en les facultés des lettres et des sciences humaines de l’Université, ainsi que l’Ecole des beaux-arts. On a ici une transformation de la base culturelle nationale, afin de répondre aux besoins de l'idéologie dominante, ou comme l'a parfaitement résumé Fleur Pellerin, ministre de la Culture :
« La culture est l'affaire de tous, elle peut accueillir des modes d'intervention innovants comme cette coopération entre l'État et le collectionneur Yvon Lambert. »
Ce n'est pas tout, cela va de soi : il y a au total 556 oeuvres dans la partie « musée », pour une valeur commerciale de 100 millions d'euros, le tout appartenant désormais au Fonds national d’art contemporain, mais de manière relative uniquement.
En effet, les oeuvres sont bloquées par contrat dans l'hôtel particulier et Yvon Lambert a bataillé pour non seulement l'extension à l'hôtel particulie voisin, mais également une rénovation, amenant quatre années de travaux, coûtant 14 millions d'euros à l'État et la municipalité retardant l'ouverture s'étant déroulée cette semaine seulement finalement.
Tout cela est véritablement exemplaire du triomphe du post-modernisme, avec même un anticapitalisme de grand bourgeois, Yvon Lambert ayant formulé des regrets sur la commercialisation récente dans l'art contemporain... comme si ce pseudo art était autre chose qu'un mélange de commerce et de subjectivisme, de placement financier et de mystique irrationnelle sur un art « indépendant » relevant de la « créativité » individuelle.