L'escroquerie Gesaffelstein
Submitted by Anonyme (non vérifié)Depuis plusieurs mois, il y a une montée en puissance d'une campagne médiatique au sujet de « Gesaffelstein », un artiste de musique électronique. Son album « Aleph » vient de sortir et toute une « hype » a été construite au sujet de ce qui devrait être un chef d'oeuvre de la part d'un artiste présenté comme mystérieux, avant-gardiste, tourmenté, à la pointe de l'électronique, etc.
Les « inrocks », la revue bobo et décadente, le présentait notamment ainsi :
« Nouveau prince de la techno française, Gesaffelstein a les yeux noirs, le visage pâle et un goût sans limite pour la techno martiale et oppressante. »
Or, tout cela n'a été qu'une escroquerie, d'autant plus grave que la musique de Gesaffelstein est un hold-up décadent sur toute une partie progressiste et très développée de la musique électronique.
Le nom de Gesaffelstein est savant mélange de deux mots : Gesamtkunstwerk, concept de Wagner d'oeuvre d'art total et surtout album du groupe Dopplereffekt, et Albert Einstein.
Cela a son importance, car Gesaffelstein pille littéralement justement la mouvance musicale à laquelle appartient Dopplereffekt, c'est-à-dire la musique appelée historiquement electro-indus ou encore funk industriel.
Les figures les plus connues de cette musique sont Depeche Mode, Front Line Assembly, Nitzer Ebb, DAF, Front 242, KMFDM, Skinny Puppy, Cabaret Voltaire, Test Dept, New Order, Kraftwerk, SPK, And one, Ministry, etc.
Or, cette musique a une particularité : elle se veut, pour la plupart de ces artistes, ouvertement progressiste. Les textes sont presque toujours socialement critiques, avec souvent une très grande radicalité.
La musique utilise le principe des « collages » afin de posséder une dimension ouvertement progressiste, de type clairement expressionniste, soit en mode paranoïaque anti-système d'oppression, soit en mode bande sonore d'une émeute.
La Techno, qui s'est développée à Detroit par opposition à la House de Chicago, est fondamentalement proche de cette démarche en quête d'un son tourmenté et « underground », mais sur une base « techno » par contre, et non pas « electro-indus » dans la scène gothique au sens très large.
Et là arrive Gesaffelstein, qui monte une escroquerie. Il reprend la démarche, les sons, l'ambiance, mais pas le contenu, et il apparaît comme « nouveau » avec une musique qui existait déjà dans les années 1990...
Les « critiques » saluent ainsi le génie et sa musique géniale qui serait « noire », « martiale », « oppressante », etc., tout en expliquant sans y voir de contradictions qu'on a des sons des années 1990, industriels voire new wave...
Mais tout cela n'a de sens que parce que depuis une dizaine d'années, toute une frange de la scène techno française a découvert la ville de Berlin et sa techno de type Detroit, découvrant qu'il y avait un autre horizon que l'hégémonie de la House dans la culture musicale techno française, malgré les poches de résistance d'une musique violente et « sale » (hard-tek, hardcore, qu'on retrouvait dans les free parties ou bien encore dans des grandes soirées organisées, surtout dans le nord de la France et la Belgique).
Gesaffelstein est la pointe de cette démarche, cependant dans une logique de récupération par les bobos d'une culture expressionniste.
Et quand une culture expressionniste est récupérée et vidée de son contenu alternatif, cela donne quelque chose de fasciste. Gesaffelstein se situe ouvertement dans cette tendance, avec une idéologie du glauque ; les vidéos et les titres des chansons sont racoleuses dans la violence et la brutalité.
On a ainsi, post-modernisme le plus complet, sa chanson intitulée « Viol » qui a été reprise en 2012 pour les publicités à la télévision de la voiture Citroën DS4 et du rouge à lèvre Givenchy, dans une vidéo post-moderne...
Voilà le vrai fond de la démarche de Gesffelstein : permettre les attitudes post-modernes. Voici un compte-rendu d'une soirée parisienne par « Les inrocks » :
« Nouveau tyran de la techno française, Gesaffelstein sait manier la puissance et la séduction. La nuit dernière, il nous a mis une baffe au Social Club (…).
Les coups de 2h ont sonné quand “Gesa” se lance dans une bonne heure de techno comme on l’en sait capable : du son brut, sec et froid, en noir et blanc, faisant plus dans le contraste que dans la nuance, plus dans la provoc que dans la simple agressivité. Gesaffelstein joue avec le public, se moque de lui, le maltraite avec des breaks abruptes et des virages imprévisibles. Il pousse le son, les basses, la puissance tant qu’il peut. Il fait cracher le sound system, va tester ses limites, fait péter le son et nos nerfs avec. Gesaffestein donne du plaisir quoi qu’il en coûte. Faire le mal, abandonner tout respect, être brutal et malpoli ? Soit, tant que règnent les ténèbres de l’efficacité. »
La blague, c'est également déjà l'accusation de plagiat. La chanson Nameless ressemble effectivement à s'y méprendre à Rain of Petals de l'artiste chilien Visonia, qui a justement travaillé avec Dopplerefekkt...
Quand on entend les deux chansons, on voit que Gesaffelstein ne fait que décaler les tonalités... On peut retrouver le même principe avec une chanson du film Requiem for a dream (ici cette chanson, là celle de Gesaffelstein), ou encore un emprunt au jeu de guerre Call of Duty: World at War – Russian URA Battlecry (ici l'extrait du jeu, là la chanson de Gesaffelstein).
C'est exemplaire : ce qui se passe par contre chez Gesaffelstein, c'est que sa musique reprend cette position sonore, mais sans aucun contenu. L'album n'a d'ailleurs aucune cohérence musicale, passant d'un style à un autre sans continuité, le tout dans un format single pour satisfaire la machine à sous des labels de musique.
On a donc la même prétention que le dernier Daft Punk (Random Acess Memories), sauf que justement dans ce cas précis, il y avait une tentative ouverte de « synthétiser » l'atmosphère musicale disco – symphonique pour la développer, alors que chez Gesaffelstein, on est dans le collage de choses relevant déjà du collage...
Cela donne du collage de collages, sans âme aucune, du rebelle sans cause, du pur baroque pour satisfaire une musique techno servant à divertir de manière déchirée, tourmentée, reflet d'une époque décadente.