Selon le matérialisme dialectique, il n'y a ni « cause », ni « conséquence », mais la transformation. La mort de Hugo Chàvez n'a donc pas « causé » une situation nouvelle, mais c'est un fait historique qui est aussi une étape dans un processus de transformation du Mouvement Communiste International qui se déplace vers davantage de complexité.

Bien sûr, c'est davantage le cas dans des pays liés d'une manière ou d'une autre à la question du bolivarisme. Tous les pays d'Amérique du Sud sont concernés, mais le bolivarisme est l'idéologie d'une faction capitaliste bureaucratique tournée non pas dans le sens des États-Unis, mais de quelques autres puissances impérialistes et expansionnistes (Russie, Chine, etc.).

Mais la France est également concernée: si la France est d'un côté en concurrence impérialiste avec les Etats-Unis impérialistes, elle est de l'autre côté également un des ses partenaires, et la partie la plus agressive de la bourgeoisie veut mettre fin à ce partenariat, afin de passer à un axe Moscou - Berlin - Paris.

C'est pourquoi la majorité de l'extrême-droite appréciait Hugo Chàvez, et c'est pourquoi le « Front de Gauche » - avec le Parti Communiste révisionniste, mais aussi Jean-Luc Mélenchon, leader populiste (11,1% l'an dernier aux élections présidentielles) – a totalement soutenu Hugo Chàvez.

Ce qui apparaît ici est la vieille question: l'impérialisme est-il un « système global », qui est unifié? C'est la conception guévariste classique, qui nie la dimension contre-révolutionnaire du révisionnisme.

Ou y a-t-il une concurrence impérialiste? Et c'est la conception maoïste classique.

Les réactions des organisations anciennement « maoïstes » en Inde et au Népal

Il est intéressant de noter que les organisations qui soutenaient la révolution de Nouvelle Démocratie, mais sont passées aux accords de paix, à la négation de la guerre populaire, ont toutes salué Hugo Chàvez.

En Inde, deux organismes prétendent suivre l'héritage de la Guerre Populaire déclenchée au début des années 1970, alors qu'elles nient la Guerre Populaire.

C'est le cas du « CPI (ML) Liberation », qui « pleure la mort du président vénézuélien Hugo Chavez, et salue son héritage de lutte contre les politiques néolibérales et l'impérialisme américain. »

C'est aussi le cas du « CPI-ML » (Red Star), qui explique que « Chavez est venu avec les politiques s'opposant à l'impérialisme et rejetant les multinationales du Venezuela. Son exemple a inspiré une série de soulèvements anti-impérialistes en Amérique latine, qui ont porté au pouvoir des forces anti-impérialistes dans de nombreux pays là-bas. »

Au Népal, on trouve aussi le Parti Communiste unifié du Népal (maoïste) ; le Premier ministre népalais Baburam Bhattarai, a participé à une cérémonie pour Hugo Chàvez, le saluant comme un exemple.

De son côté Ram Karki, qui est son chef du département international, a parlé d'une perte pour la cause du socialisme du 21e siècle.

Tout ceci n'est pas une surprise: l'idéologie bureaucratique d'une faction capitaliste ne peut pas être critiquée par ceux qui agissent précisément de la même manière.

La position d'Odio de Clase

Le collectif Odio de Clase a pris en une semaine deux points de vue qui diffèrent radicalement du maoïsme. Ce collectif d'Espagne a rejeté le prachandisme, mais a formulé deux positions qui le rejoignent:

a) La première étape a été l'annonce par ce collectif, au début du mois de mars, qu'il a décidé de considérer la Syrie comme une « nation opprimée », qui doit être soutenue dans son ensemble contre l'agression impérialiste.

Le collectif Odio de Clase, expliquant cela, a reconnu que ce n'était pas le point de vue commun des maoïstes, sa position était « à contre-courant de la majorité des organisations maoïstes. »

b) La seconde a été le soutien à Hugo Chàvez lorsque son décès a été annoncé. Le collectif Odio de Clase a estimé que « Chàvez a également eu des aspects progressistes et a fait face à l'impérialisme. »

Le collectif Odio de Clase a également attaqué le Parti Communiste d’Équateur - Comité de Reconstruction comme étant des « trotskystes » jouant le rôle de « cinquième colonne de la réaction » en considérant Hugo Chàvez comme un fasciste.

Le collectif Odio de Clase a ainsi expliqué que « Chàvez pour les pauvres du Venezuela est une amélioration, ce qui est nié par les sectaires illuminés. »

Le problème ici est facile à comprendre. La ligne « anti-impérialiste » du collectif Odio de Clase ne rejette pas ici que la position du Parti Communiste d’Équateur - Comité de Reconstruction - elle rejette également la position classique du maoïsme sur le péronisme, le khomeynisme, le kémalisme, le bolivarisme, etc.

Une fois qu'est ouverte la porte de soutenir une tendance « anti-impérialiste », alors il n'y a pas de place pour la Guerre Populaire.

Chaque Guerre Populaire qui a commencé dans le monde, des Philippines au Pérou, de la Turquie au Bangladesh, a été fondée sur la considération que le pays opprimé était, par nature, faisant face au fascisme.

Rejeter que les pays opprimés sont des pays fascistes - un fascisme bien sûr très différent de la version qui peut exister dans les pays impérialistes - signifie rejeter la stratégie de libération dans le pays opprimé, contre le capitalisme bureaucratique et le féodalisme !

Le document du PCE - CR

Le 11 mars, le Parti Communiste d’Équateur - Comité de Reconstruction a publié un document appelé « Combattre ou défendre le Chavisme: la lutte entre marxisme et révisionnisme »

Selon le PCE – CR, « la lutte contre le régime fasciste de Chàvez / Maduro au Venezuela s'est directement déplacée au sein du mouvement communiste et révolutionnaire international, c'est une lutte entre marxisme et révisionnisme.

Dans cette lutte, les communistes et les révolutionnaires ne peuvent pas céder un pouce, parce que défendre Chàvez depuis les positions du hoxhaisme, du trotskysme, de l'anarchisme, du prachandisme, etc. ce n'est ni rare ni inquiétant, mais si certains s'auto-dénommant maoïstes prétendent défendre le processus fasciste-corporatiste de Chàvez / Maduro au Venezuela supposément depuis des positions « maoïstes », cela ne peut pas être permis, c'est-à-dire que nous devons lutter contre le nouveau révisionnisme, qui est maoïste en paroles et opportuniste dans les faits. »

Le PCE - CR expliqua alors la connexion du Venezuela à la Russie, critiquant également la position du Parti Communiste maoïste d'Italie pour sa considération erronée au sujet de Hugo Chàvez: « avec un aussi faible niveau idéologique – politique, le PCm d'Italie a pour objectif de mener la reconstitution du MRI ? »

Il note que la position erronée Parti Communiste des Philippines peut mener la guerre populaire là-bas à sa défaite ; il rejette la position du Collectif Odio de Clase.

Le PCE - CR considère également que:

Depuis la ligne rouge du maoïsme, une poignée de partis communistes et d'organisations révolutionnaires se sont prononcés pour un combat ouvert contre le régime de Chávez, le caractérisant comme fasciste et pion de l'impérialisme, et en faveur de la révolution démocratique de nouveau type au Venezuela ; ces déclarations n'ont pas été faites seulement maintenant, elles font partie de la ligne stratégique révolutionnaire de ces dits partis.

Dans cette direction se sont prononcés le Parti Communiste Marxiste-Léniniste-Maoïste de France, le Parti Communiste du Pérou, le Parti communiste d'Équateur - Sol Rojo, l'Organisation des Ouvriers d'Afghanistan Marxiste-Léniniste-Maoïste, principalement Maoïste, le Parti communiste d'Équateur – Comité de Reconstruction, et d'autres organisations de Turquie et du Bangladesh.

Un tournant pour les maoïstes à travers le monde?

La situation actuelle peut être un tournant pour les maoïstes à travers le monde.

Le Parti Communiste maoïste d'Italie tente de reconstruire une internationale maoïste, sur la base du centrisme ; en rejetant la conception du capitalisme bureaucratique, il prouve une fois de plus que son niveau idéologique est faible, parce que cette question est fondamentale.

Et cela signifie qu'une nouvelle « internationale » formée en vertu de son initiative ne contiendrait pas la conception maoïste de capitalisme bureaucratique - ce serait directement révisionniste.

De l'autre côté, le collectif Odio de Clase était une composante de la position anti-centriste.

En saluant même le Parti Communiste maoïste d'Italie pour sa position sur Hugo Chàvez, le collectif Odio de Clase a pratiqué une sorte de suicide politique, car il ne pouvait pas ne pas savoir que ce soutien à la principale force centriste ne pourrait pas être acceptée par les révolutionnaires authentiques.

Il n'est pas possible de rejeter le Parti Communiste maoïste d'Italie comme centriste d'un côté, puis d'en faire l'éloge.

Nous devons savoir maintenant les positions des organisations anti-centristes, en particulier de la Unión Obrera Comunista (MLM) de Colombie.

Mais rappelons aussi que ce parti a pris une position correcte dans un document avec le Partido Comunista del Ecuador – Sol Rojo et le Partido Comunista (Marxista Leninista) Panamá, dans une déclaration commune contre le sommet des Amériques:

http://lesmaterialistes.com/pce-sr-uoc-mlm-pcmlp-declaration-commune-contre-sommet-ameriques

Atteindre de telles victoires implique une lutte intransigeante contre l'opportunisme des faux partis communistes, des révisionnistes et des opportunistes de tous poils, qui détournent les masses vers le parlementarisme, les compromettent avec la fausse démocratie des exploiteurs, dans l'illusion de prendre possession de l’État réactionnaire sans la détruire, avec l'appui du faux socialisme des gouvernements de Chavez au Venezuela, de Correa en Equateur et de Morales en Bolivie, cachant leur rôle servile au vieil État réactionnaire, et l'utilisation féroce de leur pouvoir armé contre le peuple et les véritables révolutionnaires, pour maintenir la domination impérialiste semi-coloniale, d'assurer la dictature de classe des exploiteurs, et de préserver leur privilège de vivre dans l'exploitation du travail des masses.