Sorti en 1931 en Allemagne, M le maudit est « l'autre » grand film de Fritz Lang, avec Metropolis sorti quelques années auparavant. Les deux films ont en commun d'avoir un scénario écrit par Thea von Harbou, qui rejoindra les rangs nazis, et les deux films reflètent fidèlement l'esprit anti-populaire du fascisme.

Film haletant et brillant, dans un esprit post-expressionniste, M le maudit n'en est pas moins un film sordide, traitant d'un assassin d'enfants pourchassé par la pègre dérangée par les actions de la police pour le trouver.

Le peuple est présenté comme passif et stupide, en proie aisée à l'hystérie ; le film reprend des affaires de meurtre en série en Allemagne à la même époque. La société oscille entre anarchie et État policier, police et pègre encadrant une société troublée économiquement et culturellement.

Le film est présenté aujourd'hui comme... s'opposant au fascisme, alors que de fait en 1931 il est évident que son scénario, tout comme celui de Métropolis, appelle à une « régénération » fasciste de la société.

Le meurtrier lui-même est présenté comme un simple « individu » en proie au « mal » :

« Toujours, je dois aller par les rues, et toujours je sens qu'il y a quelqu'un derrière moi. Et c'est moi-même ! (…) quelquefois c'est pour moi comme si je courais moi-même derrière moi ! Je veux me fuir moi-même mais je n'y arrive pas! Je ne peux pas m'échapper ! (…) quand je fais ça, je ne sais plus rien… Ensuite je me retrouve devant une affiche et je lis ce que j'ai fait, et je lis. J'ai fait cela ? »

Film incontournable de par sa vivacité, M le maudit est la démonstration de comment une société en perdition et victime de la fascisation peut puiser dans ses ressources culturelles pour entraîner dans une mobilisation culturelle réactionnaire par l'intermédiaire du cinéma vulgaire, sordide, policier.