30 nov 2011

Le laboratoire scientifique de Mars

Submitted by Anonyme (non vérifié)

 

Le 26 novembre 2011 à 10h02, le vaisseau spatial contenant le laboratoire scientifique de Mars décollait à Cape Canaveral en Floride.

La NASA présente cette mission comme la plus innovante de ces dernières années (éclipsant par là même le projet européen Galileo). Et il est vrai que le dispositif est impressionnant.

Le laboratoire scientifique de Mars va voyager huit mois jusqu'à sa destination, parcourant ainsi quelques 567 millions de kilomètres (soit un peu plus de 14 000 fois le tour de la Terre au niveau de l'équateur). Le vaisseau spatial va d'abord être placé sur l'orbite de la Terre pour, dans un deuxième temps, être envoyé vers Mars. Une fois arrivé dans l'atmosphère martienne, un parachute va être déployé et, 500 mètres avant le contact avec le sol, des rétrofusées se déclenchent pour faire atterrir Curiosity en toute sécurité.

 
Curiosity constitue le cœur de la mission : un robot de la taille d'une voiture qui se déplace grâce à six roues motrices et qui contient toute une station scientifique. En effet, il est composé de pas moins de 11 instruments de pointe dont l'objectif est la détection de conditions favorables à la vie microbienne. 
 
Pour pouvoir procéder aux analyses, Curiosity dispose d'un bras articulé, muni d'une foreuse et d'une pelle, qui prélève les échantillons du sol martien. Ces échantillons sont ensuite réduits en poudre, tamisés et stockés à l'intérieur du robot.
 
 
 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voici plus en détail les 11 instruments de Curiosity.

* Trois appareils photos.

1. La Mastcam, un duo d'appareils photos située sur la « tête » de Curiosity. La Mastcam prendra des clichés et des vidéos en couleur du sol martien.

 

 

2. Le MAHLI, « Mars Hand Lens Imager », un appareil photo situé sur le bras de Curiosity qui permet d'identifier les minéraux des roches martiennes. Les images sont prises de très près, à la manière d'un microscope, et deux flashs différents sont utilisés pour repérer certains minéraux indiquant une présence antérieure d'eau.

 

 

 

 

3. Le MARDI, « Mars Descent Imager », photographie le site d'atterrissage en continu lors la descente de Curiosity dans l'atmosphère.

 

 

* Quatres spectromètres (dans ce genre de mission, le spectromètre permet d'obtenir la composition d'une roche).

 

 

4. L'APXS, « Alpha Particle X-Ray Spectrometer », un spectromètre à rayons X et à particules alpha situé sur le bras de Curiosity. L'APXS identifie la composition de la roche martienne par contact. Lorsque les rayons X et les particules alpha interagissent avec les atomes de la roche, de l'énergie est dégagée et celle-ci peut-être mesurée grâce aux détecteurs, chaque type de composant générant un type particulier d'énergie.

 

 

 

5. La ChemCam, un appareil photo combiné à un laser situé dans la « tête » de Curiosity. Le laser permet de déterminer les composants à une distance de 1 à 9 mètres. Grâce à cette capacité d'analyse à distance, la ChemCam sera capable d'identifier rapidement la roche étudiée, ses composants ainsi que la quantité de chacun de ses composants. Il sera ainsi possible de décider si le site de prélèvement est intéressant ou s'il vaut mieux chercher ailleurs.

L'appareil photo fournit une assistance visuelle et permet, si besoin est, la rotation de l'ensemble de la « tête » pour obtenir une meilleure vue.

6. Le CheMin, « Chemistry and Mineralogy X-Ray Diffraction Instrument », un instrument de chimie et de minéralogie qui va permettre l'identification et la mesure de la quantité des divers minéraux du sol martien. La spécificité de cet appareil est, entre autres, de donner l'agencement des atomes dans le prélèvement.

 

7. Le SAM, « Sample Analysis at Mars », un ensemble d'outil d'analyse situé dans le corps de Curiosity. Les échantillons récupérés par le bras sont stockés dans ce dispositif dont l'objectif est de rechercher divers composés de carbone, dont le méthane. Certains des instruments vont également permettre la détection d'hydrogène, d'oxygène et d'azote. Tous ces composants étant essentiels dans l'apparition de la vie, les éventuelles quantités relevées seraient déterminantes pour prouver la présence de vie microbienne dans le passé.

 

 

* Deux détecteurs de radiation.

8. Le RAD, « Radiation Assessment Detector », est un détecteur de radiation à la surface martienne. Il va évaluer la dangerosité de l'environnement pour une éventuelle vie microbienne. Mais l'objectif de ce relevé est également la préparation d'une future exploration par des êtres humains.

 

 

9. Le DAN, « Dynamic Albedo of Neutrons », un détecteur de neutrons à l'intérieur du sol martien (jusqu'à un mètre de profondeur). Si l'eau est présente, l'activité des neutrons va être modifié à cause de l'hydrogène contenu dans l'eau.

* Un ensemble de capteurs environnementaux.

10. La REMS, « Rover Environmental Monitoring Station », une station météorologique qui effectuera des mesures quotidiennes et saisonnières de pression atmosphérique, d'humidité, de radiation ultra-violette, de vitesse et de direction du vent, de température de l'air et de température du sol autour du robot. Les deux petites perches que l'on voit sur les photos sont situées sur le « cou » de Curiosity.

* Un ensemble de capteurs atmosphériques.

11. Le MEDLI, « Mars Science Laboratory Entry Descent and Landing Instrument », un ensemble d'instruments analysant les conditions dans lesquelles robot traverse l'atmosphère. Cet ensemble est composé de deux outils. Le MEADS, « Mars Entry Atmospheric Data System », qui récolte des données notamment sur la pression atmosphérique à l'intérieur de la capsule de protection de la chaleur. Le MISP, « Integrated Sensor Plugs », mesure la température au fur et à mesure de l'avancée dans l'atmosphère.

Tout cela va permettre d'acquérir des connaissances précises car il faut savoir que, selon les prédictions, la température lorsqu'un vaisseau pénètre dans l'atmosphère de Mars est environ trois fois plus élevée que dans l'atmosphère terrestre. Il est même prévu que le système de protection thermale brûle durant l'entrée dans l'atmosphère.

Là encore, les connaissances emmagasinées serviront à une future exploration humaine.

On l'aura compris, c'est un laboratoire complet que la NASA a décidé d'envoyer sur Mars. Les échantillons relevés par Curiosity ne sont pas destinés à être ramenés sur Terre, c'est pourquoi un tel arsenal est déployé.

Curiosity est d'ailleurs hors norme : par rapport aux missions précédentes à destination de Mars, le poids total des instruments est 10 fois plus important, Curiosity lui-même est deux fois plus long et cinq fois plus lourd.

Le but de la mission, outre le fait de confirmer la présence d'eau, est de pousser plus loin la découverte d'autres composants nécessaires à la vie et notamment de rechercher les éléments nécessaires à la vie sur Terre : le carbone, l'hydrogène, l'azote, l'oxygène, le phosphore et le sulfure. Les 11 instruments vont donc mesurer en détail le climat et la géologie martiennes.

Le deuxième grand objectif est de récolter un maximum d'informations afin de préparer une future exploration humaine (aujourd'hui à l'état de projet uniquement). Les données relevées sur la température et la pression juste avant l'atterrissage, la radioactivité et le climat de Mars seront des données primordiales pour cette éventuelle mission.

Par conséquent, cette mission du laboratoire scientifique de Mars constitue une avancée majeure pour l'exploration humaine par delà l'orbite terrestre.

Pour remplir tous ces objectifs, Curiosity va se déplacer aux alentours d'un point précis : le cratère de Gale. Il est prévu que le robot atterrisse au pied d'une montagne située dans ce cratère, le 6 août 2012. La précision avec laquelle Curiosity va atterrir constitue une autre innovation dans la mesure où l'atterrissage, relativement aux missions précédentes, devrait être beaucoup moins hasardeux.

Pourquoi avoir choisi le cratère de Gale ?

Le cratère de Gale a un diamètre de 154 kilomètres avec, en son milieu, une montagne de sédiments de cinq kilomètres de haut qui montre des couches de couleurs différentes. L'équipe de recherche va donc disposer d'images de l'intérieur du cratère qui constitue pour les géologues un livre d'histoire de Mars.

De plus, des observations précédentes ont montré la présence d'eau, de traces d'argile et de sulfate faisant de ce site une cible privilégiée dans la recherche de signes de conditions favorables à la vie.

Lorsque Curiosity aura rejoint le cratère de Gale, il va explorer les alentours pour totaliser un voyage d'un peu plus de 19 kilomètres. Ce voyage durera une année martienne, l'équivalent d'environ deux années terrestres.

Toutes les informations prélevées seront transmises régulièrement sur Terre grâce à un important système de télécommunications. Dans un premier temps, la communication se fait par bande Ultra hautes fréquences (technologie similaire à celle utilisée pour la télévision). Puis, elle sera réalisée par l'intermédiaire deux sondes spatiales américaines déjà présentes sur l'orbite de Mars. Curiosity possède également deux antennes permettant la communication directe avec la Terre.

Ce système de communication va également permettre à Curiosity de recevoir des informations de l'équipe scientifique présente sur Terre. En effet, si le robot possède un ordinateur central et un programme informatique qui lui permet de se déplacer de manière autonome en évitant les dangers, l'équipe scientifique envoie tous les jours une séquence d'instructions qui guide ce déplacement autonome. L'équipe envoie également des " upgrades " (des améliorations des systèmes informatiques).

Dans la présentation des technologies utilisées, la NASA insiste également sur le fait qu'elle possède tout un programme de préservation de la planète Mars. Ainsi, les « costumes de lapin » portés par l'équipe scientifique sont destinés à minimiser les contaminants provenant de l'être humain. D'une manière générale, une attention particulière au nettoyage et à la stérilisation du vaisseau spatial visant à supprimer les bactéries présentes.

La NASA explique qu'il y a une raison simple à tout cela : « on ne voudrait pas aller sur Mars et "découvrir" la vie – seulement pour se rendre compte plus tard que c'est nous qui l'avons amené ! Les scientifiques veulent également étudier la planète et toute vie dans sa "forme originale immaculée" ».

Dans ce but, les scientifiques nettoient fréquemment la surface du vaisseau avec une solution alcoolique. L'ordinateur principal et les autres composants électroniques de Curiosity sont, quant à eux, fermés hermétiquement et des filtres spéciaux ont été mis en place pour garder les microbes à l'intérieur du système.

Deux nouveaux systèmes vont encore plus loin et détectent des molécules associées aux microbes.

Cependant, cet ensemble de précautions qu'on nous présente ne fait jamais référence à une autre source potentielle de pollution : le générateur d'énergie de Curiosity. Lorsqu'on consulte les documents mis à notre disposition, on apprend que la source d'énergie est un « générateur thermoélectrique à radio-isotopes ». Une recherche rapide permet de voir que le terme radio-isotope est en réalité une contraction de radioactivité et de isotope. Autrement dit, la source d'énergie est nucléaire, bien que ce mot ne soit jamais employé. Il est cependant précisé que l'énergie est fournie par la « décomposition naturelle » du Plutonium 238 dont la demi-vie est d'environ 88 années.

La raison avancée à l'utilisation d'une source d'énergie nucléaire est qu'il fallait une source d'énergie capable d'avoir une longévité plus importante (au minimum 14 ans), des sites d'atterrissage plus variés, plus de chaleur et plus d'énergie que dans les missions limitées par l'énergie solaire. De plus, l'énergie procurée par cette source nucléaire l'est en continu, alors que la production d'énergie solaire s'interrompt la nuit tombée. La taille du générateur est également plus petite et le poids plus léger. La NASA explique donc que l'énergie nucléaire permet un accès plus vaste à Mars, une plus grande mobilité et plus de flexibilité opérationnelle.

La NASA insiste sur les précautions avec cette source d'énergie et notamment travailler avec d'autres agences fédérales. Toutefois, on peut rapidement se poser des questions lorsqu'on sait que les deux derniers robots envoyés sont toujours sur le sol martien. De plus, lorsqu'on cherche sur le site de communication de la NASA, on ne trouve nulle trace d'une éventuelle récupération du robot. On peut donc en conclure qu'il n'a pas été planifié de le récupérer.

La NASA détaille toutes les procédures mises en place pour nettoyer l'appareil avant son lancement mais il est destiné à rester sur Mars avec des éléments radioactifs à son bord !

On constate donc que la technologie déployée sur cette mission est tout simplement impressionnante, rassemblant un ensemble d'instruments à la pointe de la technologie. Mais on trouve une énorme incohérence : cette mission ayant pour but d'explorer les signes de vie sur Mars envisage d'y laisser Curiosity alors même qu'il contient un générateur nucléaire, technologie de mort.

La raison avancée pour la préservation de Mars traduit cette ambiguïté. En effet, tout le projet montre une envie brûlante de découvrir une trace de vie mais c'est la découverte scientifique qui semble importante, bien plus que la vie elle-même.

Et cela n'est pas un hasard. La course à la technologie focalisée sur la fierté de pouvoir présenter au reste du monde les dernières avancées réalisées montre bien la société impérialiste dans laquelle nous nous trouvons.

Nous disions en effet que si Marx expliquait que « au moulin à eau correspond la société féodale, et au moulin à vapeur la société bourgeoise. On doit ajouter que la centrale atomique correspond à la société impérialiste ».

C'est tout à fait de cela dont on parle ici, de cette société où la concurrence pousse à abandonner les uns après les autres des robots sur Mars, à polluer une planète sur laquelle nous n'avons même pas encore posé un orteil !

Toutefois, Lénine disait : « l'impérialisme est un capitalisme agonisant, qui marque la transition vers le socialisme : le monopole qui surgit du capitalisme, c'est déjà l'agonie du capitalisme, le début de sa transition vers le socialisme ».

Et on peut remarquer des signes de cette transition : si la NASA ne cesse de vanter les mérites de Curiosity, le niveau atteint par une telle technologie rend nécessaire la collaboration au niveau mondial : la station météorologique (la REMS) est fournie par l'Espagne, le détecteur de neutrons (le DAN) par la Russie, une partie de l'analyseur d'échantillon par la France, le spectromètre à rayons X et particules alpha (l'APXS) par le Canada.

Il y a là une contradiction évidente. Alors que les pays impérialistes sont rentrés dans une concurrence féroce, l'exploration de l'univers, de par les forces qu'ils demandent, impose la coopération.

De plus, la NASA se justifie tellement d'utiliser l'énergie nucléaire qu'elle semble mal à l'aise à cette idée. Probablement le souvenir de Fukushima qui plane dans les esprits...

Sous le socialisme, la technologie sera cohérente avec les propos tenus.

Et si les technologies ne peuvent pas réaliser les objectifs fixés tout de suite, alors nous mettrons en branle toute la capacité d'innovation dont sont capables les scientifiques et nous attendrons qu'ils arrivent à développer une nouvelle technologie. Par exemple, on ne cesse de nous ressasser que l'énergie solaire n'est pas capable de mener à bien cette mission d'exploration de Mars, mais le temps a-t-il été pris pour développer efficacement une telle technologie ? Toutes les forces ont-elles été concentrées pour faire progresser l'énergie solaire ?

Nous sommes les enfants du soleil et nous devons le devenir !

 

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