Fermeture de Thomson Angers : la classe ouvrière victime des monopoles
Submitted by Anonyme (non vérifié)Cette semaine, l'usine Thomson à Angers a été placée en liquidation judiciaire. C'est-à-dire que l'usine doit fermer et les 350 personnes y travaillant être licenciées. C'est une usine de plus qui complète la longue série de fermetures industrielles en cours en France depuis plusieurs années.
Comme toujours, cela constitue un drame pour les prolétaires victimes, avec des conséquences psychologiques importantes pour des ouvrières et ouvriers qui sentent la misère se profiler.
L'usine, dans laquelle étaient fabriqués des décodeurs, appartient au groupe Technicolor. C'est le nouveau nom rafraîchi du groupe monopoliste Thomson, pilier de l'impérialisme français. La fermeture de l'usine, après le démantèlement de ses activités industrielles, est le résultat de la course des monopoles au profit, de leur gigantesque pouvoir sur la société et de la férocité du capital financier pour dégager des masses énormes de plus-value.
Ce qui se passe à Angers est en soi très simple et est typique de la manifestation de la crise générale du capitalisme dans les centres impérialistes en 2012.
L'usine, dans laquelle travaillaient 3000 personnes il y a plusieurs années, n'embauchait plus que 350 personnes. Elle est était le dernier site de production du groupe Technicolor en Europe. Les impérialistes estiment que la production industrielle est moins rentable en France, alors ils organisent la délocalisation des activités productives hors du territoire national.
Officiellement, l'usine Thomson Angers, et donc le groupe Technicolor, serait la victime impuissante de l’arrêt des commandes de « Livebox » par Orange (groupe France Telecom). Mais en réalité, c'est une véritable planification concertée de démantèlement de l’appareil productif qui a lieu (depuis de nombreuses années).
Les groupes monopolistes français ne sont pas unilatéralement séparés les uns des autres. Ils forment un bloc multiforme constitutif de l'impérialisme français (et en interaction plus ou moins fortes avec les autres impérialismes). Ainsi, ce sont les même personnes qui peuvent être désignées à tour de rôle pour diriger ces groupes :
- Didier Lombard, membre du conseil d'administration du groupe Technicolor, a été PDG de France Telecom de 2005 à début 2011 ; il succédait à Thierry Breton qui, avant d'être PDG de France Telecom en 2002, était le PDG de Thomson (Technicolor) depuis 1997 ! Et le PDG de Thomson de 2004 à début 2008, Frank E. Dangeard, était avant cela aussi chez France Telecom, en tant que Directeur Général adjoint. Il est aujourd'hui administrateur de Calyon, la banque d'investissement du Credit Agricole, l'un des principaux monopoles banquiers français.
- Frédéric Rose, l'actuel Directeur Général de Technicolor, ancien président du Conseil d’administration, a été membre du Comité Exécutif d’Alcatel-Lucent, un puissant trust impérialiste français, considéré comme le deuxième équipementier télécoms et réseaux mondiaux.
- Denis Ranque, l'actuel président du Conseil d'Administration, est également membre des Conseils d’Administration du groupe monopoliste Saint-Gobain, de la CMA-CGM (Compagnie maritime d'affrètement - Compagnie générale maritime, 3ème groupe mondial du transport maritime de conteneurs), du Fonds Stratégique d’Investissement, créé par l'État pour emprunter sur les marchés financiers au profit d'autres entreprises, etc.
On le retrouve également à la présidence du Cercle de l'Industrie, groupe d'influence où sont représentés les principaux monopoles impérialistes français : Rhône-Poulenc, Lafarge, Pechiney, L'Oréal, Renault, Total, etc.
Un groupe monopoliste aussi important que Technicolor ne fonctionne pas comme une simple entreprise qui serait perdue seule dans l'enfer de la loi du marché et de la concurrence capitaliste. C'est un pilier essentiel de l'impérialisme français qui fonctionne selon un mouvement général de développement impérialiste : un développement qui est de plus en plus agressif et contraire aux intérêts des masses populaires à mesure que s'intensifie la crise capitaliste.
En arrière-plan de ce développement, il y a le capital financier qui met la pression pour que les monopoles accumulent toujours plus et plus vite. C'est à l'issue de l’assemblée générale des actionnaires en janvier 2010 qu'avait été prise la décision que le groupe Thomson prenne le nom de sa filiale Technicolor (une société hollywoodienne). Cela correspondait à une réorientation stratégique du groupe vers des secteurs jugés plus rentables, impulsée en conformité avec un plan de restructuration de la dette énorme du groupe auprès de grandes banques (3 milliards d’euros).
Les « dettes » sont un moyen efficace pour le capital financier d'avoir le contrôle sur la production. Dans le cas de Technicolor, les banques « acceptaient » d’échanger en capital une partie de la dette de Thomson. C'est-à-dire qu'elles ré-impulsaient l'activité du groupe, mais en en prenant encore plus possession.
« Concentration de la production avec, comme conséquence, les monopoles ; fusion ou interpénétration des banques et de l'industrie, voilà l'histoire de la formation du capital financier et le contenu de cette notion. » Lénine.
Ce mouvement de réorientation d'une partie du groupe Thomson sous l'impulsion du capital financier était en cours depuis bien avant le changement de nom en 2010. Ce mouvement avait d'abord profité d'une recapitalisation (1,8 milliard d’euros) par l’État (par Dominique Strauss-Kahn) en 1997, permettant la privatisation et l'entrée en bourse du groupe. Ensuite, l’activité s'est petit à petit réorientée avec un jeux de « fusions-acquisitions », de cessations d'activités et de rachats de filiales.
C'est à mesure de ce développement orienté vers la recherche de plus-values massives et rapides que le groupe Thomson, du moins dans sa partie « grand public », « multimedia », s'est petit à petit séparé de ses grosses activités industrielles – et donc avec de milliers d'ouvrières et d'ouvriers.
Si l'usine Thomson Angers doit fermer aujourd'hui, c'est que cela correspond aux plans des impérialistes qui imposent leur volonté aux masses.
Odile Coquereau, la porte parole de l'intersyndicale de l'usine angevine expliquait : « Technicolor a décidé de se débarrasser de son site. En choisissant la voie judiciaire, elle s'est désengagée de ses responsabilités et pense s'exonérer de ses obligations sociales et financières. C'est immoral, car Thomson Angers n'était pas du tout autonome de Technicolor. C'est comme une mère qui abandonne sa fille. Technicolor n'a pas laissé les moyens à l'usine de subsister et n'a pas envisagé sa reconversion.
Cela ne répond à aucune morale digne certes, mais cela est parfaitement logique à l'époque de l'impérialisme triomphant. Cela est pleinement conforme à la nature des monopoles que d'essayer de concentrer toute l'activité et d'étouffer toute possibilité de développement hors de son emprise. Car si Technicolor a fait couler l'usine de Angers, c'est tout justement pour ne pas qu'elle puisse être autonome, mener son activité et même servir une activité concurrente.
La classe ouvrière, tant qu'elle ne se saisit pas d'elle même, tant qu'elle reste prisonnière de l'idéologie bourgeoise, est condamnée à être la victime impuissante des monopoles impérialistes.
A notre époque, le capitalisme monopoliste d’État, c'est-à-dire le mouvement général des monopoles (dont les banques) qui fusionnent directement avec l’État français pour ne former qu'un seul bloc de développement impérialiste français, se renforce tout en étant de plus en plus fragile.
Cela signifie qu'il forme un mouvement contradictoire qui sera toujours plus agressif, tentant de soumettre toujours plus le mouvement même de la vie à ses intérêts ; les masses, les animaux et la nature elle-même sont les victimes l'agression impérialiste.
La crise capitaliste se renforce d'autant plus que la bourgeoisie est incapable de comprendre le capitalisme, car elle rejette le matérialisme dialectique.
L'exemple de Technicolor est typique de cette dynamique économique impérialiste, qui cherchent à s'orienter vers des activités « tertiaires », marketing, « design », etc. tout en « délaissant » les secteurs directement productifs – en les reléguant en fait à un rôle de sous-traitance dans les pays dominés. Le problème pour la bourgeoisie, c'est que seul la production ouvrière est la source de la plus-value, le reste des secteurs ne formant que des montages commerciaux pour faire circuler la plus-value. L'exploitation des prolétaires des pays dominés ne suffit pas à alimenter les appétits impérialistes.
En France, la classe ouvrière ne doit pas avoir à choisir entre l'exploitation dans les usines ou bien la misère produite par la crise. Pour se libérer des chaînes impérialistes, elle doit abattre les puissants monopoles, socialiser toute la production entre ses mains et décider de son développement en harmonie avec la biosphère.
Cela sera la seule issue pour faire face définitivement à la puissance des monopoles. Cela nécessitera une lutte terrible, longue et difficile : une lutte pour faire triompher la science, une lutte pour de se débarrasser de l'idéologie et de la culture bourgeoise de soumission de la nature, une lutte pour réprimer matériellement la bourgeoisie. C'est tout le sens de la Guerre Populaire, seule perspective d'avenir pour la classe ouvrière victime des monopoles.