La manifestation de ce dimanche 26 mai contre le mariage pour les personnes homosexuelles a une caractéristique essentielle : elle rentre dans le cadre de la grande offensive du Vatican.

Bien entendu, toutes les manifestations, ainsi que le mouvement contre le mariage pour les gays et les lesbiennes en général, se retrouvent alignées sur les valeurs du Vatican. Cependant, cette fois, c'est différent : l'alignement est complet.

Ainsi, tout récemment, le nouveau pape a procédé à des canonisations, d'une Colombienne, d'une Mexicaine et de 800 Italiens martyrisés pour avoir refusé d'embrasser l'islam. A la fin de la messe à ce sujet (devant une grande foule à Rome), il a tenu un discours où il a appelé à la lutte pour la reconnaissance « juridique de l'embryon », ainsi que « la sacralité de la vie ».

Voyons bien ici la dimension militante agressive des canonisations, même s'il faut noter l'importance du fait qu'il s'agisse ici de la première « sainte » colombienne et de la seconde au Mexique, et que les deux ont fondé des congrégations féminines.

Rappelons ici brièvement ce que le pape a dit le 5 mai 2012 dans son discours, une semaine avant la canonisation : « L’amour pour la Vierge est une des caractéristiques de la piété populaire, qui demande à être valorisée et bien orientée. »

C'est très important : quand on suit le matérialisme historique, on voit très facilement que le culte de la Vierge Marie est appelée à prendre une place prépondérante, prédominante, dans l'Eglise catholique romaine.

Cela est inévitable afin de renforcer le mysticisme militant d'un côté, mais aussi pour renforcer la dimension « sociale » de l'autre. Il y a quelques jours, le pape dénonçait le « culte de l'argent », « la dictature de l'économie », affirmant que « L'argent doit servir, il ne doit pas gouverner. »

C'est un discours anti-capitaliste romantique classique, ciblant dixit le pape une « nouvelle tyrannie, invisible et parfois virtuelle », « l'autonomie absolue des marchés et de la spéculation financière ».

Il va de soi qu'en France, depuis Charles Péguy et son socialisme chrétien, on est très habitué à ce discours démocrate-chrétien, porté par Victor Hugo avant Charles Péguy et par la suite par Le Monde – Télérama – Le Monde diplomatique – La vie (qui appartiennent à une seule et même structure). Avec cela en arrière-plan, regardons comment le discours du pape est conforme à la lutte en France menée par l'Eglise catholique autour de la question de la PMA et de la GPA. Voici ce qu'il a dit précisément lors de la canonisation :

Je salue les participants à la « Marche pour la vie » qui a eu lieu ce matin à Rome et j’invite à maintenir vive l’attention de tous sur le thème si important du respect pour la vie humaine dès le moment de sa conception.

À ce propos, j’ai plaisir à rappeler également la pétition qui se tient aujourd’hui dans de nombreuses paroisses italiennes, afin de soutenir l’initiative européenne « Un de nous », pour garantir une protection juridique à l’embryon, en protégeant chaque être humain dès le premier instant de son existence. Un moment spécial pour ceux qui ont à cœur la défense du caractère sacré de la vie sera la « Journée d’Evangelium vitæ », qui aura lieu ici au Vatican, dans le cadre de l’Année de la foi, les 15 et 16 juin prochains.

Ce soutien à une « marche » est une allusion politique directe aux « marches » en France.

Le personnel de l'Eglise est censée assumer une position militante ; c'est exactement comme le pape Pie X qui avait, au début du 20ème siècle, exigé un serment anti-moderne.

Voilà pourquoi le mouvement contre le droit au mariage pour les personnes homosexuelles va tendre de plus en plus à un discours anti-moderne : l'Eglise catholique assimile la mobilisation afin d'asseoir ses propres structures.

C'est cela que n'ont pas compris les groupes nationalistes, à part bien entendu l'Action française, qui s'est toujours placée dans le mouvement et jamais vraiment en marge. Nous sommes en France : le fascisme structuré s'affirmant dans les années futures sera inéluctablement d'orientation maurassienne, fondé sur les conceptions de Charles Maurras.

Le catholicisme social est en train de se réaffirmer en s'appuyant sur la critique idéaliste de la décadence impérialiste, en se proposant comme pseudo nouveau humanisme socialisant prenant le relais de l'existentialisme qui, depuis les années 1960, a l'hégémonie culturelle et idéologique en France.