Proudhon et le « socialisme français » - 2de partie : une vision du monde contre et pour la propriété
Submitted by Anonyme (non vérifié)Pierre-Joseph Proudhon est en quelque sorte quelqu'un admettant les thèses de Jean-Jacques Rousseau, mais en étant confronté à la réalité du capitalisme conquérant. Sa démarche est donc simple, voire franchement simpliste : l'organisation naturelle a été « perdue » en raison de la propriété, dont le féodalisme est une variante. Le capitalisme, quant à lui, est une accentuation de ce phénomène de « déperdition ».
Voici comment il exprime sa démarche :
« L'humanité dans son ensemble est la réalité poursuivie par le génie social sous le nom mystique de Dieu. Ce phénomène de la raison collective, espèce de mirage dans lequel l'humanité, se contemplant elle-même, se prend pour un être extérieur et transcendant qui la regarde et préside à ses destinées, cette illusion de la conscience, disons-nous, a été analysée et expliquée ; et c'est désormais reculer dans la science que de reproduire l'hypothèse théologique.
Il faut s'attacher uniquement à la société, à l'homme. Dieu en religion, l'État en politique, la Propriété en économie, telle est la triple forme sous laquelle l'humanité, devenue étrangère à elle-même, n'a cessé de se déchirer de ses propres mains, et qu'elle doit aujourd'hui rejeter. »
(Système des contradictions économiques ou Philosophie de la misère)
Quand on voit cela, on se dit que Pierre-Joseph Proudhon est un rousseauiste du 19e siècle, regrettant le bon sauvage isolé et autonome. Ainsi, Pierre-Joseph Proudhon est connu pour avoir formulé que « la propriété, c'est le vol ».
Cependant, il n'est pas pour autant contre la propriété, plus précisément la petite propriété. C'est contradictoire : après avoir dit que la propriété c'était le vol, Pierre-Joseph Proudhon a érigé toute une idéologie de défense de la petite propriété.
C'est en fait le point de vue de l'artisan, qui perd sa position privilégiée en raison du développement des forces productives, et qui exprime la nostalgie de l'égalité qui aurait régné par le passé, « égalité » qui n'est le masque d'une situation stable, protégé, le cycle production-consommation se reproduisant de manière très simple.
Pierre-Joseph Proudhon a été incapable d'arriver au point de vue prolétarien, revendiquant le collectivisme ; d'ailleurs, il a été un fervent critique du communisme et de la socialisation de la propriété.
Par conséquent, Pierre-Joseph Proudhon a développé un anticapitalisme romantique, une idéologie où la propriété « absolue » est la source des problèmes, et bien entendu l'antisémitisme lui sera un outil fondamental pour « justifier » sa conception.
Voici comment Pierre-Joseph Proudhon exprime sa nostalgie toute romantique :
« N'est-il pas évident que nous ne vivons point, les uns ni les autres, de la propriété ? Nous vivons d'un fait plus grand que la propriété, d'un principe supérieur à la propriété : nous vivons de la circulation. Comme la circulation du sang est la fonction mère et motrice du corps humain, ainsi la circulation des produits est la fonction mère et motrice du corps social. Quant à la propriété, elle est submergée, transformée, perdue dans cette circulation (…).
La propriété, dont on voudrait faire la base des institutions nouvelles, la propriété n'est rien par elle-même. Ce n'est plus qu'un privilège sur la circulation, comme un péage établi sur une rivière ; un reste de féodalité. »
(Organisation du crédit et de la circulation et solution du problème social sans impôt, sans emprunt)
Telle est la critique de Pierre-Joseph Proudhon: la propriété est selon lui le vecteur d'une forme d'esclavage des individus.
Pierre-Joseph Proudhon exerce une critique en apparence radicale, et allant très loin dans la mise en avant de l'individu. Ses thèmes sont Dieu, l’État et la propriété en tant qu'obstacles à l'individu, et cela a fait de lui le premier grand théoricien de l'anarchisme.
Mais la solution proposée par Pierre-Joseph Proudhon, c'est la propriété elle-même. En ce sens, sa conception ne relève pas du tout du socialisme, mais bien de ce que sera le fascisme.
En France, le fascisme qui se constituera avec l'Action française s'appuie sur Pierre-Joseph Proudhon ; telle est l'origine du slogan « la monarchie, c'est l'anarchie plus un » : le roi est le garant de la répartition égalitaire de la propriété, cette dernière ne pouvant devenir absolue justement grâce au roi, garant de l'équilibre.