OCML-VP: des thèses syndicalistes révolutionnaires en contradiction absolue avec le maoïsme
Submitted by Anonyme (non vérifié)Aujourd'hui, alors que Besancenot annonce dans un quotidien bourgeois populiste comme "Le Parisien" la disparition dans un futur proche de sa propre organisation, nous avons besoin de clarté sur certains points.
Et notamment sur le fait que "sans théorie, pas de mouvement révolutionnaire", ce qui signifie que les maoïstes n'accordent aucune valeur révolutionnaire à la formation d'un parti "de l'extrême-gauche" rassemblant des adhérents "anti-capitalistes".
Voilà pourquoi nous voulons présenter brièvement ici les différences très concrètes existant entre le maoïsme et l'Organisation Communiste Marxiste-Léniniste Voie Prolétarienne (OCML-VP), qui publie le journal Partisan.
Elle est parfois, à tort, qualifiée de "maoïste", ce qui cause un grand tort aux maoïstes et de plus ne correspond absolument pas à l'idéologie de l'OCML-VP. Voyons ici pourquoi.
a)"Accumulation de force" et syndicalisme révolutionnaire
Pour l'OCML-VP l'activité syndicale est un grand principe; selon cette organisation : "Les révolutionnaires doivent donc montrer que les sections syndicales doivent au contraire être des outils de lutte de classe, d'organisation indépendante des travailleurs, de construction d'un rapport de forces favorable aux travailleurs.
Ensuite les révolutionnaires ont pour tâche de montrer que le syndicalisme n'est pas suffisant, qu'on ne peut se limiter aux luttes de boîte, qu'il faut aussi s'intéresser à toutes les luttes sociales qui traversent la société, et que l'organisation politique est nécessaire."
Pour l'OCML-VP, il faut a) faire adhérer les travailleurs au syndicat sur le principe des luttes futures à mener, b) partant de là, élargir la prise de positions du syndicat; c) amener les travailleurs au niveau de l'OCML-VP.
Cette conception repose sur une conception économique de la lutte, et aussi purement et simplement sur le fait qu'un travail est plus ou moins possible dans tel ou tel syndicat, vu qui plus est que les syndicats ont une marge de manoeuvre par rapport aux fédérations.
Pour les maoïstes, une telle position revient à du fétichisme du travail local effectué, ce n'est en rien du bolchevisme. Où est l'agitation? Où est la propagande? Où est le programme communiste?
Pour parer à cette critique inévitable et tenter de la disqualifier comme "gauchiste", l'OCML-VP propage alors l'idée comme quoi il y aura "un jour", lorsque la combativité grandira, une "recomposition syndicale".
Voilà pourquoi le blog "Où va la CGT?" répertorie les initiatives allant dans un sens combattif.
Il s'agit d'une sorte de grand mécano où tout s'emboîte: le militant fait un travail syndical, le syndicat se "gauchise" sur les positions de société et certains membres rejoignent l'organisation, lors des mouvements de masse le syndicat acquière une position forte et permet une réorganisation syndicale générale en prenant comme modèle le travail fait jusqu'ici.
Il va de soi qu'il s'agit d'un plan de travail totalement opposé aux enseignements de Lénine. Le Parti est censé prendre les initiatives politiques, et là il n'y a rien de tout cela: ce n'est rien d'autre que de l'accumulation de forces de type trotskyste.
La base organisationnelle de l'OCML-VP est d'ailleurs totalement anti-idéologique, exactement comme celle des trotskystes qui misent dessus pour "recruter" de manière "indirecte": il faut "s'implanter dans les entreprises et les quartiers ouvriers et populaires", il faut "défendre les droits et les acquis de la classe ouvrière, et les élargir", il faut lutter "contre le réformisme ancien ou nouveau pour l'unité des travailleurs exploités, avec ou sans travail", avec comme axes de travail la réduction du temps de travail (32, 30 heures...), la lutte contre l'intérim et l'intermittence, la retraite à 55 ans à taux plein, etc. (Thèses du Congrès d'avril 2004).
Il n'y ainsi aucune prise en compte de la crise capitaliste, de l'inéluctabilité de la tendance à la guerre et de la mise sous pression toujours accélérée des masses populaires, sans même parler du fascisme; il s'agit de fait d'un plan totalement idéaliste.
b)Légalisme et électoralisme
L'OCML-VP a, en tant qu'organisation, appelé à voter pour Mitterrand aux élections présidentielles de 1981.
De la même manière, l'OCML-VP a systématiquement appelé à voter "Lutte Ouvrière" aux élections.
Peut-on être maoïste et avoir voté Mitterrand en 1981? Peut-on être maoïste et systématiquement appeler à voter pour les trotskystes de "Lutte Ouvrière"?
La réponse est non: on ne le peut pas, car le maoïsme enseigne qu'il faut savoir compter sur ses propres forces; de la même manière, on ne peut pas prétendre être l'avant-garde ou vouloir contribuer à sa construction et de l'autre côté faire du suivisme en soutenant la social-démocratie et le trotskysme, ennemis jurés de la classe ouvrière.
Le problème tient à ce que l'OCML-VP est en quête perpétuelle de "légitimité", ce qui passe par les élections, même si elle appelle à ne pas considérer celles-ci positivement.
Voilà pourquoi en février 1993 on pouvait lire dans le journal Partisan : "Dans tous les cas, nous les [=les gens] invitons à participer aux réunions électorales, plus particulièrement du PCF, de l'extrême-gauche et des écolos".
L'OCML-VP n'a naturellement pas cette "position" par bonté d'âme, elle le fait simplement pour faire avancer la "politisation"; néanmoins, c'est une position ridicule, qui montre à quel point l'OCML-VP ne croit pas en sa propre idéologie.
Pour comprendre ce choix stratégique, il faut voir que depuis de nombreuses années, l'OCML-VP érige le MLPD [Parti marxiste- léniniste d'Allemagne] en modèle. Il s'agit d'une organisation des années 1970 passée du marxisme-léninisme à la "pensée prolétarienne" et s'étant maintenue comme l'une des principales organisations d'extrême-gauche en Allemagne, malgré son profond isolement.
La ligne du MLPD est en fait de faire cavalier seul pour les élections en apparaissant comme le seul véritable représentant des travailleurs; le MLPD dispose en effet d'un pactole de plusieurs millions d'euros, de locaux en durs, de diverses entreprises, etc., tout ce patrimoine étant construit à partir des acquis des années 1960-1970.
Ses campagnes mettent les dirigeants en avant, avec leurs propres sites internets, leurs biographies, etc.; le site de l'organisation propose même la météo et des conseils pour le programme télé, etc.
Le public visé est l'aristocratie ouvrière qui aime le légalisme et les bonnes autoroutes allemandes où on peut rouler en mercedes sans limitation de vitesse; le MLPD est depuis trente années le modèle absolument opposé de toute l'extrême-gauche des maisons occupées, des "blacks blocks", de l'affrontement avec les institutions, etc.
Le MLPD est en fait à l'Allemagne ce qu'est "Lutte Ouvrière" à la France, ou le "PTB" à la Belgique.
Le MLPD est donc le véritable modèle de VP, c'est une ligne véritable; dans sa salutation du 3 septembre 2004, l'OCML-VP affirme que "le mouvement de lutte des travailleurs et ouvriers allemands contre le plan Hartz IV est exemplaire. C'est un encouragement pour la lutte de tous les travailleurs en Europe et particulièrement en France."
Partisan de l'été 2005 affirme: "Allemagne, la crise politique ouverte du gouvernement: une chance pour les marxistes-léninistes!"
Il va de soi que c'est de la politique-fiction: personne en France ne sait vraiment ce qui s'est passé et se passe en Allemagne; qui plus est ce mouvement "exemplaire" a été purement syndical et n'a en rien triomphé.
Mais le MLPD ayant jeté toutes ses forces dans la bataille et selon sa logique associant luttes syndicales et élections, l'OCML-VP prend le modèle au pied de la lettre.
Voilà pourquoi il y a le blog "Où va la CGT?", qui vise à appuyer des initiatives au sein de la CGT, voilà pourquoi on peut lire dans Partisan: "Partout où les militants de Voie Prolétarienne travaillent, la plupart des travailleurs les plus combatifs sont syndiqués, ou se syndiquent au cours de leur politisation.
Les sections syndicales des boîtes sont souvent, il est vrai, dirigés par des réformistes (par exemple ceux du PCF) qui visent uniquement à négocier avec la direction, par l'intermédiaire d'une lutte si nécessaire.
Il n'empêche que ces sections syndicales s'opposent au patronat. Et la présence des militants révolutionnaires dans ces sections syndicales est un excellent outil pour faire entendre une autre voix et politiser les travailleurs les plus combatifs autour d'eux".
Les trotskystes ne disent pas autre chose. Il s'agit d'une croyance en les syndicats qui est à l'exact opposé du maoïsme, lequel part du principe comme quoi "on a raison de se révolter".
Il n'est pas étonnant qu'à la victoire du "non" au référendum la Constitution européenne, l'OCML-VP ait été d'un triomphalisme éhonté: "La défaite du Oui est un camouflet pour l'UMP et le PS, une revanche des obscurs et des sans grades. Elle est l'expression d'un ras-le-bol populaire, après des années de sacrifices au nom de la soit-disant nécessité économique, c'est-à-dire le capitalisme" (éditorial de Partisan de l'été 2005).
Comme on le voit, il s'agit de pur populisme, typique du syndicalisme révolutionnaire que défend au fond l'OCML-VP. D'ailleurs, le Parti est considéré comme un simple "organisme" regroupant les militants, jamais comme l'avant-garde de la révolution possédant l'idéologie authentique de la classe et guidant les masses dans la lutte de classes.
S'il y a bien une figure haïe par l'OCML-VP, c'est ainsi Staline, justement parce qu'il symbolise le Parti Communiste clair comme le verre et dur comme l'acier.
Et, d'ailleurs, l'OCML-VP a une histoire n'ayant rien à voir avec celle des maoïstes de par le monde.
c)Sur le plan international, l'OCML-VP n'a jamais fait partie du mouvement maoïste
L'OCML-VP est née à la fin des années 1970.
Elle s'est fondée sur le principe qu'il faut remettre en question les "dogmes" et sur une base de refus de la violence existant à l'époque: « Portée par les petits-bourgeois révoltés, tenants de l'excitation minoritaire, de l'action par le fait, elle [ la lutte armée ] exprime un mépris profond de la classe ouvrière, qu'elle s'appelle anarchie, terrorisme ou autonomie. (...) Le terrorisme est l'enfant de la crise ET de la trahison des «partis communistes ». Il tire le mouvement ouvrier en arrière - pour le ramener au temps de la bande à Bonnot.» (« Pour une violence révolutionnaire », 1979)
Refusant la violence révolutionnaire et se maintenant à travers cette période, l'OCML-VP a subsisté et ne doit ainsi son prestige d'organisation qu'au fait que pendant toutes les années 1980, elle a été la seule organisation à se revendiquer de Mao Zedong.
Mais l'OCML-VP ne s'est jamais définie comme "maoïste": en tant qu'organisation elle fait depuis longtemps partie de l'ICMLPO (Conférence internationale des partis et organisations marxistes- léninistes), regroupement dans lequel on retrouve le MLPD et de nombreux groupes qui tous refusent le maoïsme comme troisième étape du marxisme.
L'OCML-VP n'a jamais mis en avant le regroupement maoïste international qu'a été, durant les années 1980-1990, le Mouvement Révolutionnaire Internationaliste (MRI).
Le MRI s'est défini comme marxiste-léniniste-maoïste, tel n'a jamais été le cas de l'OCML-VP, dont le nom comprend les mots "marxiste-léniniste", et montre bien que pour elle le maoïsme n'est pas la troisième étape du marxisme.
Cela ne veut pas dire que l'OCML-VP n'a jamais joué sur l'ambiguité. Ainsi, dans sa propre plate-forme politique faite au début des années 1990, on peut lire: "La Guerre Populaire dirigée par le Parti Communiste du Pérou montre le chemin à reprendre vers le communisme, et la voie d'une libération véritable pour les peuples dominés.
Le soutien au PCP, même s'il s'accompagne de certaines critiques secondaires, est aujourd'hui une délimitation importante pour les révolutionnaires du monde entier."
Une délimitation! En pratique, l'OCML-VP n'a soutenu que tout à fait épisodiquement l'organisation Sol Pérou de France et le Mouvement Populaire Pérou - France qui ont soutenu la guerre populaire; en fait on peut même dire que depuis la publication de la plate-forme de l'OCML-VP, le soutien politique à la guerre populaire au Pérou et au PCP a littéralement disparu!
Là encore il s'agissait UNIQUEMENT d'une question de prestige; l'OCML-VP a parlé de la guerre populaire au Pérou, mais uniquement quand elle pouvait en profiter.
Pareillement, elle n'a jamais fait un pas en direction des importantes organisations révolutionnaires de Turquie présentes en France, dont certaines étaient pourtant membres du mouvement marxiste-léniniste-maoïste sur le plan international, au même titre que le Parti Communiste du Pérou.
De la même manière, l'OCML-VP joue sur les mots, utilisent parfois dans une même déclaration les termes interchangeables de "marxisme", "marxisme-léninisme", "maoïsme"; on a un excellent exemple de cela dans la lettre de l'OCML-VP au Comité National pour l'Unification du Mouvement Communiste en France qui rassemble des organisations marxistes-léninistes: l'OCML-VP y dit que "Bien que les questions idéologiques et théoriques ne soient pas considérées comme un préalable, elles nous paraissent pourtant avoir conduit à ne pas s'adresser à nous, parce que maoïstes, lors de la constitution du CNU." (30 juin 2007)
C'est très subtil parce que l'OCML-VP ne dit pas qu'elle est "maoïste", elle le dit sans le dire en disant que d'autres le diraient! Pour preuve, dans les lettres au CNU on ne trouve pas de références au maoïsme, seulement au "marxisme-léninisme".
Voilà la vérité sur l'OCML-VP. Il s'agit d'une organisation qui a simplement "survécu" dans les années 1980-1990. Elle n'a pas fait avancer la connaissance scientifique de la classe ouvrière et elle n'a jamais contribué à l'adoption sur le plan international du marxisme-léninisme-maoïsme.
Voilà pourquoi en France les maoïstes, dans toutes les années 1980- 1990, et ce quelles qu'aient été leurs divergences à ce moment là, n'ont JAMAIS considéré un tant soit peu positivement l'OCML-VP.
L'OCML-VP n'est pas maoïste, ne l'a jamais été, et les maoïstes ont toujours considéré cette organisation comme quasiment trotskyste.
Voilà pourquoi aujourd'hui, l'OCML-VP se montre très certainement - comme Arlette Laguiller et Lutte Ouvrière-, attentive à l'appel d'Olivier Besancenot: gageons que l'OCML-VP aura toute sa place dans un "courant" au sein de ce "grand parti anticapitaliste".
Pour le PCMLM, août 2007.