6 oct 2013

Le Qatar Prix de l’Arc de Triomphe comme symbole de la symbiose avec une fraction de la bourgeoisie française

Submitted by Anonyme (non vérifié)

Hier et aujourd'hui a lieu le « Qatar Prix de l'Arc de Triomphe » à l'hippodrome de Longchamp, situé entre le richissime 16e arrondissement de Paris et le Bois de Boulogne. L'entrée est d'ailleurs gratuite pour les « femmes chapeautées » !

60.000 spectateurs sont présents, 1 milliard de téléspectateurs regardent : cela devient un phénomène culturel d'importance.

Et il n'y a pas qu'une course, mais treize dont huit finales mondiales, aux noms évocateurs : Qatar Prix Chaudenay, Qatar Prix Daniel Wildenstein, Qatar Prix de Royallieu, Qatar Prix Dollar, Qatar Total Arabian Trophy des Juments, Prix Qatar Racing and equestrian Club, Prix Horse Racing Abroad, Prix Barzan, Qatar Prix de l'Abbaye de Longchamp, Total Prix Marcel Boussac - Criterium des pouliches, Qatar Prix Jean-Luc Lagardère (Grand Criterium), Prix de l'Opéra Longines, Qatar Arabian World Cup sponsorisée par Qatar Petroleum International, Qatar Prix de la Forêt, Qatar Prix du Cadran, Qatar Grand Handicap des Milers et donc le fameux Qatar Prix de l'Arc de Triomphe.

Ce dernier prix, le plus prestigieux, est d'ailleurs la course sur le gazon la plus richement dotée au monde (4,8 millions d'euros d’allocations, dont plus de 2,7 millions pour le vainqueur). Bien entendu, la course la plus dotée au monde est la Dubai World Cup, avec 7,4 millions d'euros.

Cependant, l'argent ne compte pas vraiment, car les haras sont possédés par des multimillionnaires, tel le fameux Aga Khan, dirigeant religieux des Ismaéliens, ou bien sûr les Qataris, qui investissent massivement ces toutes dernières années, comme avec l'achat du haras de Bouquetot à Clarbec (Calvados).

Le tout est une question d'amusement et de prestige : on reconnaît bien là la décadence de la grande bourgeoisie, qui n'hésite par ailleurs pas à « tricher » pour gagner. On a ainsi des programmes de reproduction coûtant une fortune, afin de faire en sorte que la balance penche de son côté, et naturellement ces derniers temps toute une série de scandales de dopages.

Ce choix des courses hippiques témoigne cependant également de la construction par le Qatar d'une idéologie liée à la France impérialiste. Les « nouveaux riches » du Qatar semi-féodal semi-colonial et expansionniste se tournent vers la France pour un partenariat en « symbiose. »

D'où les achats des hôtels parisiens de luxe Royal Monceau, Hyatt Regency Paris Étoile (anciennement Concorde Lafayette), comme des Majestic et Martinez à Cannes, d'un centre de conférences dit « de l'avenur Kléber » à deux pas des Champs-Elysées, ou d'hôtels particuliers : celui d'Evreux sur la luxueuse place Vendôme à Paris et le fameux hôtel Lambert sur la luxueuse île parisienne Saint-Louis (voir: L'incendie de l'hôtel Lambert : une catastrophe culturelle).

Bien entendu, la fraction de la bourgeoisie française concernée n'est pas celle qui a Marine Le Pen comme représentant. C'est au contraire une fraction historiquement liée à l'UDF et au RPR, c'est-à-dire des gaullistes traditionnels et une partie de la bourgeoisie industrielle entendant profiter d'un appui dans le domaine de la finance par les Qataris.

De qui parle-t-on ? De certains monopoles, avec des gens comme Christophe de Margerie, le PDG de Total qui dispose d'un réseau solide au Qatar, Arnaud Lagardère (du groupe Lagardère), Marwan Lahoud qui est le directeur général délégué à la stratégie et au marketing d'EADS, ou encore Xavier Huillard qui est PDG de Vinci.

Le Qatar a d'ailleurs des actions en pagaille dans ces monopoles : 12,83 % chez Lagardère, 5,6 % chez Vinci, moins de 5 % chez EADS, 1,59 % chez Vivendi, 1 % chez LVMH, environ 4 % chez Total...

De gaullistes « traditionnels », comme Michèle Alliot-Marie, ancienne ministre de la Défense et des Affaires étrangères, qui lors du sommet de Doha en mai 2013 a même déjeuné avec l'émir, ou encore Dominique de Villepin, dont le cabinet d'avocat d'affaires a parmi ses principaux clients l'émirat du Qatar, alors que lui-même siège au conseil d'administration de l'autorité qatarie des musées.

De socialistes, comme l'avocat Jean-Pierre Mignard (et codirecteur de la rédaction du journal Témoignage chrétien), un proche de François Hollande, ou encore l'ancien ministre des Affaires étrangères Hubert Védrine.

De gens d'idéologie de type UDF, conservateurs de centre-droit, comme l'ancien « communiste » Maurice Leroy ou bien sûr Nicolas Sarkozy, qui historiquement n'a jamais été un « facho » mais un modernisateur de type Balladur ou plus exactement Giscard d'Estaing.

Au sommet de Doha de mai 2013 étaient également présents François Fillon (comme invité d'honneur), Patrick Devedjian, Patrick Balkany, Eric Woerth...

Mais on trouve aussi des électrons libres, comme l'ancien judoka Djamel Bouras qui vit même à Doha et conseille le régime dans le domaine du sport, ou encore le producteur de cinéma Luc Besson.

Et rappelons que les impôts sont organisés de manière favorable aux investissements qataris : « les biens situés hors de France d’un citoyen du Qatar résidant en France n’entrent pas dans l’assiette de l’impôt de solidarité sur la fortune pour une période de cinq ans après qu’il soit devenu résident français », tout comme il n'y a pas d'impôt sur les plus-values tous les investissements immobiliers réalisés dans l’Hexagone par « l’État du Qatar ou ses entités publiques. »

Les récents propos de Marine Le Pen contre le Qatar est ainsi à comprendre comme une bataille au sein de la bourgeoisie elle-même (voir : Le triomphe de Merkel, Marine Le Pen contre la fraction pro-Qatar et Fillon chez Poutine contre les USA). Ne pas voir cela c'est ne pas comprendre comment et pourquoi le fascisme se développe.

A part le PCMLM qui a une analyse matérialiste historique, le fascisme est considéré comme un nationalisme pro-dictature, ce qui est faux : le fascisme c'est la prise du pouvoir par les éléments les plus réactionnaires de la bourgeoisie. C'est le sens des appels à un « coup d’État » chargé de remettre de l'ordre, c'est-à-dire en fait de porter au pouvoir la fraction la plus agressive de la bourgeoisie.

La question du Qatar a donc une importance très grande, puisque la bourgeoisie « traditionnelle », alliée aux gaullistes « traditionnels » et aux « modernistes » socialistes, veut un travail en commun avec le Qatar...

Alors que la fraction la plus agressive, elle, n'entend pas s'encombrer d'une symbiose avec le Qatar et son appui financier. On ne peut assister ici qu'à des retournements de situation, des conflits, des ruptures, dans un sens comme dans un autre, qui mettent à jour les contradictions au sein même de la bourgeoisie.

Mots clés: 
Rubriques: