Dans une lettre ouverte aux dirigeants de Total datant du 10 octobre, Marine Le Pen s'indigne du fait que le groupe pétrolier n'ait pas payé d'impôts sur les sociétés en France en 2009 malgré ses profits gigantesques : «[...] le groupe Total, comme d’autres groupes du CAC 40, ne paie pas un euro d’impôt sur les sociétés en France, utilisant notamment pour cela le dispositif du bénéfice mondial consolidé. »

L'intention de Marine Le Pen est d'affirmer son « indignation » devant la « situation scandaleuse » des « très grandes entreprises » qui ne « contribuent pas à l'effort de solidarité nationale ».

Mais cette lettre ouverte à Total n'est qu'un pur exercice de style populiste. Tout en faisant mine de défendre les PME françaises « soumises à un impôt sur les sociétés très lourd » et de dénoncer la soif de profit des grandes sociétés, Marine Le Pen sait bien, en juriste aguerrie, que ses vociférations ne l'engagent strictement à rien.

En effet Total a renoncé à utiliser le dispositif fiscal des "bénéfices mondiaux consolidés" en juillet dernier. Et ce même dispositif, qui a permis à Total de ne pas payer d'impôts en France en 2009, vient d'être supprimé en septembre 2011... Pour dénoncer ces "avantages fiscaux", Marine Le Pen attend le moment de leur suppression!

Elle oublie aussi de préciser que le régime des "bénéfices mondiaux consolidés" permettait au groupe Total de s'acquitter de tous ses impôts sur les sociétés en France, plutôt que d'en payer une part aux états dans lesquels il détient des filiales.

Ce dispositif dénoncé bien tardivement par Marine Le Pen n'a donc qu'une incidence marginale sur le pourcentage d'impôts que Total paie sur ses bénéfices. Par contre ce régime fiscal détermine la part de ces impôts revenant à l'état Français, et la part revenant aux États dont Total exploite les ressources pétrolières.

Sous couvert d' « antilibéralisme », Marine Le Pen joue parfaitement son rôle habituel, qui consiste à se mettre au service de l'impérialisme français. Car il ne faut pas être dupes, il ne s'agit pas de faire payer plus d'impôts à Total... Cette rhétorique de justice fiscale dissimule en fait une seule exigence : que Total paie plus d'impôts à l'État français et moins d'impôts dans les 28 États où le groupe possède des moyens de production (Norvège, Angola, Nigeria, RDC, Royaume-Uni, Gabon, Lybie, Birmanie, etc...).

Pour Marine Le Pen il n'est pas question de toucher au profit des grandes entreprises : le véritable programme économique du Front National, c'est au contraire le maintient du taux de profit moyen des grands groupes français. Pour compenser le manque à gagner induit par la crise, l'État français doit donc chercher des ressources ailleurs et disputer à d'autres États leurs revenus fiscaux.

Le programme de Marine Le Pen est populiste, il est « social » en paroles, mais nationaliste dans l'esprit et agressivement impérialiste dans les faits. Tel est le point de vue du PCMLM.