14 fév 2012

24h après la nuit de révolte en Grèce : l'impuissance objective causée par un faible niveau de conscience et de culture communistes

Submitted by Anonyme (non vérifié)

Les très violentes émeutes en Grèce du 12 février sont passées. Qu'ont-elles été ? Une insurrection ? Non, évidemment. Elles n'ont d'ailleurs pas été une expression de force, mais bien une terrible expression de faiblesse, et c'est pour cela qu'elles n'ont pas été écrasées dans le sang.

 

Car 100 000 personnes allant dans les rues pour protester jusqu'à la violence, cela ne donne pas 45 bâtiments incendiés sans qu'il n'y ait de morts et se transformer en processus insurrectionnel, à moins que l’État bourgeois ne maîtrise le processus.

 

Il n'y a eu d'ailleurs « que » 54 personnes blessées du côté manifestantEs, 68 du côté policiers, et 67 personnes arrêtées. Ces derniers chiffres parlent d'eux-mêmes : une nuit d'émeute à Berlin le 1er mai peut avoir le même résultat avec quelques milliers de personnes, alors que les conditions sont bien plus extrêmes en Grèce.

 

Pourquoi cela ? Parce que l’État accepte cela plutôt que de voir apparaître quelque chose d'autres que la spontanéité.

 

Une fois la nuit d'émeutes passée, que reste-t-il comme alternative politique ? Rien, à part le gouvernement bourgeois ou bien le coup d’État militaire.

 

Les masses soutiennent la rébellion, mais que reste-t-il comme culture après la nuit ? Rien, rien pour occuper le jour.

 

Rien, à part les mesures d'austérité votées pour recevoir de l'eurogroupe et du FMI une aide de 130 milliards – dont les 2/3 pour rembourser pas pour des aides-, mesures qui passent par une réduction de 22 % du salaire minimum et de 32 % pour les moins de 25 ans, ne réforme de la sécurité sociale, une baisse des retraites...

 

Rien à part un « Parti Communiste de Grèce » (KKE) révisionniste et jouant la carte du « sérieux » et du légal comme le Parti « communiste » français révisionniste en 1968.

 

Rien à part des anarchistes à la démarche insurectionnaliste sans perspectives aucunes. Des anarchistes de Grèce se demandaient hier :

 

« La question à présent reste la suite des événements : l’armée dans les rues ? Deuxième journée d’insurrection ? Putsch fasciste ? Terreur répressive ? »

 

Ce qui est absurde, car aussi extrêmement violents qu'ont été les affrontements en Grèce, il n'y avait pas le vieil État face aux masses révolutionnaires, mais face à des masses prises au piège et en rage.

 

Il n'y a en effet en Grèce pas d’effervescence révolutionnaire, il n'y a pas la culture communiste suintant de la société, il n'y a pas de Parti Communiste se synthétisant, il n'y a pas l'idéologie qui est assumée et comprise.

 

Bien sûr, du point de vue spontanéiste, ce qu'il y a suffit largement. Mais du point de vue du matérialise dialectique, la situation est incorrecte, contradictoire entre une catastrophe objective du capitalisme et une faiblesse dramatique de l'idéologie communiste.

 

En Grèce, il n'y a pas d'option révolutionnaire, ce qui domine idéologiquement et culturellement, c'est le rejet de la « finance », des « Allemands », de « l'oligarchie », des « vendus » à l'Union européenne, etc.

 

L'ennemi est considéré comme extérieur, avec une poignée de traîtres intérieurs. On est là encore très loin du communisme.

 

L'ambiance est au traumatisme, ce qui traumatise par rebonds les commentateurs bourgeois, comme ici un journaliste du point :

 

« Cela donne lieu à des scènes que l'on espérait ne plus jamais voir dans nos pays prospères : des fermiers qui viennent à Athènes ou à Salonique distribuer à prix coûtant, quand ce n'est pas gratuitement, les produits que les citadins n'arrivent plus à acheter, provoquant d'ailleurs de véritables émeutes parmi les affamés.

 

Des enfants, dans leurs salles de classe, ne quittant plus leurs anoraks et leurs bonnets parce que la diminution de 55 % des crédits de l'éducation, conjuguée à la hausse des taxes sur le fioul, oblige les directeurs d'école à arrêter de chauffer leurs locaux.

 

Des dizaines de jeunes gens qui errent sans but apparent dans les rues des villes, parce que plus de 25 % d'entre eux sont au chômage dans un pays de 11 millions d'habitants, dont on estime aujourd'hui que moins de 4 millions ont un emploi. »

 

Dans ce schéma, la bourgeoisie n'aura pas de mal à reprendre le dessus, jusqu'à la force la plus brutale. Et il n'y aura pas besoin de terreur généralisée, car c'est sous la forme de « l'ordre » qu'apparaîtra la réaction, et elle aura un large assentiment.

 

Naturellement, si la révolte l'emportait, cela serait mieux, peut-on penser de manière romantique– sauf que les lois historiques correspondent au principe dialectique, et que seule la révolution a un sens.

 

Et que donc la formidable énergie débauchée en Grèce risque de se retourner en son contraire, et ce rapidement.

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