30 mar 2013

Où en est la libération de la femme en France ? (2) Le féminisme social-démocrate

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Il existe aujourd'hui différents courants dans le féminisme : le féminisme social-démocrate, le féminisme queer et le féminisme matérialiste ayant évolué en lesbianisme séparatiste.

Le féminisme social-démocrate actuel reprend le concept du genre comme point central de son « idéologie » pour mener ses mobilisations réformistes.

Le féminisme social-démocrate a ainsi vu naître cette année une nouvelle mobilisation pour le 8 mars : « Mettez du Rouge ». Elle prétend lutter contre l'agression et le viol des femmes en demandant à des hommes de se prendre en photo en portant du rouge à lèvre.

Ce projet ridicule reflète bien ce qu'est le féminisme social-démocrate aujourd'hui en France : un féminisme sans fondement idéologique qui soulève certes des problèmes graves mais qui ne peut qu'apporter des solutions réformistes et démesurément dérisoires et individualistes.

Si cette mobilisation n'est liée à aucune organisation féministe et donc à aucune réflexion théorique, que des hommes mettent du rouge à lèvres fait clairement référence au concept de genre d'une manière qui se voudrait subversive et ludique ; ce dont on peut douter même sans analyse idéologique : l'utilisation de rouge à lèvres bien rouge pour symboliser le soutien à des femmes agressées ou violées est pernicieuse, car elle réduit l'image de la femme à un de ses soi-disant attributs caractéristiques et, en allant plus loin, évoquant quand même le fait que ce sont les femmes qui le cherchent en s'habillant de manière provocante.

Elle fait clairement référence au concept de genre, car ce denier pose l'idée que les identités féminines et masculines ne sont que des constructions sociales indépendantes du sexe biologique. Une mobilisation comme « Mettez du Rouge » correspond donc à l'application de ce postulat, le but étant alors de « détruire » ces identités, notamment en les renversant, ici le temps d'une photo. C'est exactement sur la même vague d'inversion des identités que surfent les immondes publicités d'adopteunmec.com.

On pourrait croire que le féminisme social-démocrate plus organisé pousse l'analyse un peu plus loin mais en réalité, ce n'est pas le cas.

Parmi les associations progressistes et ouvertement réformistes les plus connues, la plus intéressante est probablement Osez Le Féminisme (mettons de côté ici La Barbe, summum de l'organisation sans aucune idéologie et aux actions complétement ineptes et les Chiennes de garde dont les actions se focalisent plus sur les insultes publiques sexistes et autres violences symboliques même s'il leur arrive de rejoindre des revendications plus globales).

Si on ne peut pas reprocher à cette association de ne pas être progressiste au sens strict : refus de la GPA (Gestation Pour Autrui), lutte contre la prostitution, soutien à la reconnaissance du droit au mariage pour les personnes homosexuelles, revendication de l'égalité des salaires, etc., on ne peut que voir la dimension petite-bourgeoise des actions de cette association : envoi d'un carton rouge à Brice Hortefeux face au constat de l'augmentation du nombre de femmes agressées sur la voie publique en 2010, réjouissance de voir une femme de plus rentrer au Conseil Constitutionnel ou encore soutien aux actions des Femen, reflet d'une petite-bourgeoise protestataire narcissique et bornée aux happenings ridicules.

L'analyse que fait Osez Le Féminisme de la question de la femme est elle aussi révélatrice de ses propres limites. En effet, on constate rapidement que l'association instille l'idéalisme et l'anti-marxisme et, au final, retire les armes idéologiques dont la femme a besoin pour se libérer.

Reprenons par exemple la campagne Osez Le Clito. Si l'intention pourrait être louable : parler de la sexualité féminine aujourd'hui toujours aussi méconnue, même chez une grande partie des couples des milieux progressistes, la façon dont la campagne est menée est tout à fait individualiste. Elle aborde en effet la question sous l'angle unique des plaisirs individuels. Cette dimension individuelle ressort particulièrement dans la conclusion : « L'émancipation sexuelle, c'est l'émancipation tout court ! ».

Et bien non ! L'émancipation sexuelle n'est pas l'émancipation tout court !  C'est horriblement réducteur de limiter l'émancipation de la femme à son émancipation sexuelle. Mais, au delà de ce réductionnisme, c'est surtout le reflet de l'anti-marxisme dont nous parlions précédemment.

En effet, en 1973 déjà, des femmes françaises avaient publié un texte sur la libération des femmes après un voyage en Chine. Une partie de leur étude porte sur la sexualité. Elles en viennent à la conclusion que l'émancipation sexuelle ne peut avoir lieu en brisant le seul cadre des relations sexuelles.

Seule la modification des rapports de production le peut. Elles étayent leur affirmation par des applications issues de l'expérience soviétique et chinoise.

A l'inverse, ce genre d'« égarement » vers des combats faussement libérateurs tel que celui pour une unique émancipation sexuelle qui conduirait à la libération de la femme sont des signes révélateurs de l'influence du concept de genre et de la sclérose qu'il engendre dans les milieux féministes de manière générale.

Le concept du genre, qui, de par son histoire, est lié à l'opposition au matérialisme dialectique, contient les germes de la destruction du mouvement qu'il est censé contribuer à construire.

Ainsi, les associations social-démocrates noyées dans ce concept rassemblent des femmes qui cherchent à s'organiser mais qui finissent par retomber dans des luttes qui ne dépasseront jamais le cadre individualiste dans lequel elles s'inscrivent.

Prenons un autre exemple : Osez Le Féminisme défend l'idée que l'école doit être « l’un des leviers fondamentaux pour inverser la tendance sexiste de notre société ».

Par sa dimension réformiste, le féminisme social-démocrate ne peut avoir de vision globale de la solution à apporter et découpe la lutte contre le sexisme en domaines indépendants au sein desquels un changement va pouvoir s'opérer indépendamment des autres domaines.

Dans le cas de l'éducation, la solution proposée est donc d'inculquer les bonnes pratiques aux enfants et, à côté, éventuellement de lutter contre le sexisme au travail et contre le sexisme dans le rue, etc, etc. Les phénomènes sont ainsi séparés et regroupés artificiellement sous le concept du genre. Le système capitaliste, lui, n'est pas attaqué ou n'est attaqué que de manière romantique.

Isoler les problèmes, donner des solutions individuelle sans chercher à avoir de vision plus globale ne permettront pas aux femmes luttant pour leur libération d'aller bien loin.

Pire, se borner à vouloir utiliser et défendre le concept du genre finit par mener à une forme de conservatisme. Ce conservatisme vient de l'incapacité à voir la vacuité de toute idéologie liée à ce concept.

Les revendications au départ progressistes d'associations comme Osez Le Féminisme peinent à toucher les masses, à assumer la culture et la science et se jettent dans des luttes qui ne sont que des leurres, des luttes qui n'ont rien à voir avec les réelles luttes à mener pour permettre la libération de la femme.

Le genre est lié à une vision du monde petite-bourgeoise et individualiste. Et les féministes social-démocrates se jettent à corps perdus sur ce concept, faisant apparaître leur nature de classe, elle-même petite-bourgeoise et individualiste. Mais elles ne sont pas les seules.

Nous verrons que le queer, qui prétend lutter contre les genres en prônant leur déconstruction par l'adoption de comportements sexuels marginaux, veut se donner une image beaucoup plus sulfureuse mais qui, en réalité, n'atteint pas le statut de culture subversive : les bases du queer sont finalement exactement les mêmes que celles du féminisme social-démocrate, mais poussées à l'extrême.

 

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