13 oct 2017

Indymédia Grenoble et l'OCLCTIC

Submitted by Anonyme (non vérifié)

C'est une affaire qui agite l'ensemble des médias anarchistes depuis trois semaines et son contenu est particulièrement révélateur de l'apolitisme anarchiste d'un côté, du radicalisme sans perspectives de l'autre.

Tout commence avec l'incendie organisée d'un garage et d'un entrepôt de 2000 m² adjacent à la caserne de gendarmerie de Grenoble, dans la nuit du 20 au 21 septembre 2017. Le choix de la date de l'action a été effectué afin de coller au début du procès des gens accusés d'avoir incendié une voiture de police avec des policiers dedans, à Paris quai de Valmy en mai 2016.

Les « nocturnes » qui ont mené cette action d'esprit anarchiste ont alors envoyé leur communiqué à Indymedia Grenoble, qui l'a publié.

L'affaire commence alors avec un email envoyé par l'Office Central de Lutte contre la Criminalité liée aux Technologies de l’Information et de la Communication. L'OCLCTIC exige le retrait du communiqué, sans quoi il y aura accusation de terrorisme et déréférencement du site.

Voici le document.

Date : Thu, 21 Sep 2017 20:00:34 +0200
From : DCPJ SDLCODF OCLCTIC LISTE interieur.gouv.fr>
To : abuse@indymedia.org
Subject : [OCLCTIC] - Notification demande de retrait de contenus illicites
Bonjour,
L’Office Central de Lutte contre la Criminalité liée aux Technologies de l’Information et de la Communication (OCLCTIC) a constaté la présence de contenus qui contrevient aux dispositions de l’article 421-2-5 du code pénal : provocation à des actes de terrorisme ou apologie de tels actes.
Ces contenus sont visibles aux adresses suivantes : /
/T2017092108623//- https://grenoble.indymedia.org/2017-09-21-solidarite-incendiaire
Des éléments techniques laissent à penser que vous êtes l’hébergeur des contenus.
En conséquence, et conformément à l’alinéa 1 de l’article 6-1 de la L.C.E.N, nous vous demandons de retirer ces contenus.
En l’absence d retrait de ces contenus dans un délai de vingt-quatre heures, nous pourrons mettre en œuvre les procédures de blocage et de dé-référencement prévues par les textes suivant :
- Article 6-1 de la loi N°2004-575 du 21 juin 2004 modifiée pour la confiance dans l’économie numérique, tel que modifié par l’article 12 de la loi N°2014-1353 du 13 novembre 2014 renforçant les dispositions relatives à la lutte contre le terrorisme
- Décret N°2015-125 du 5 février 2015 relatif au blocage des sites provoquant à des actes de terrorisme ou en faisant l’apologie et des sites diffusant des images et représentations de mineurs à caractère pornographique
- Décret N°2015-253 du 4 mars 2015 relatif au dé-référencement des sites provoquant à des actes de terrorisme ou en faisant l’apologie et des sites diffusant des images et représentations de mineurs à caractère pornographique/
Merci de votre coopération.

Liens vers la liste des articles : Le PartiJuridiquement, c'est bien entendu du bricolage : soit il s'agit d'une apologie de terrorisme et c'est condamnable de toutes façons, soit ce n'en est pas.

L’État organise ici un « coup de pression » en jouant sur la zone grise du déréférencement du site, mesure administrative qui ne tiendrait pas une seconde en cas de protestation juridique bien organisée, ni face au droit bourgeois lui-même parce que c'est du bricolage, ni dans l'opinion publique qui sait que c'est l'islamisme qui est visé par les mesures.

Tout cela demanderait par contre d'avoir un esprit politique, d'être prêt à dénoncer l'interdiction par l’État d'une expression politique bien définie.

Or, l'anarchisme n'est cependant pas une expression politique bien définie, mais un magma protestataire, d'orientation petite-bourgeoise. Cela est volontaire et velléitaire, comme le montre l'initiative d'hier, d'aller à quelques dizaines tenter de troubler par la force le Congrès annuel des grands DRH qui se déroulait au bois de Boulogne. Résultat : quelques voitures brûlées, 41 arrestations.

Indymédia Grenoble a donc cédé et retirer le communiqué de revendications, tout comme Indymédia Nantes, appelant par contre à exprimer une solidarité face à la censure.

Indymédia Lille l'a par contre laissé, d'autres médias alternatifs l'ont repris et on trouve de toutes façons le communiqué sur des médias institutionnels, comme BFM-TV ou Le Dauphiné Libéré.

Liens vers les articles sur les recommandations militantesCe qui montre bien que le « coup de pression » de l'OCLCTIC n'en était qu'un. Et ce qui montre surtout que l'anarchisme ne parvient pas à faire de la politique, de par son essence petite-bourgeoise.

L'anarchisme ne raisonne qu'en « oppression », il ne voit pas la nature de l'Etat, dont la substance est le rapport entre les classes. Il ne peut pas arriver à une lecture politique.

Il s'agit par conséquent d'une contestation diffuse, revendicative mais sans aucune perspective communiste, sans perspective révolutionnaire. Incapable d'y arriver, l'anarchisme dit d'ailleurs que toute politique est forcément réformiste, cela afin de lui-même se prétendre « révolutionnaire ».

Mais il n'est qu'une agitation – contestation de l’intérieur même du cadre posé par l’État bourgeois. Il n'y a pas l'idée de faire de la politique pour mobiliser les masses dans le sens de la révolution.

Lien vers le dossier : Le Parti et la Guerre PopulaireIl n'y a pas la capacité politique de dire « non » à l’État, il n'y a que l'éternel contournement de celui-ci, par incapacité petite-bourgeoise à se passer d'un État qui existe sur le fondement de la contradiction prolétariat / bourgeoisie.

D'ailleurs, quel intérêt même d'incendier des voitures de la gendarmerie, hors contexte d'insurrection, si ce n'est pour dire : « gendarmes, soyez différents, plus gentils ? » Les gens qui ont commis cette action s'imaginent insurectionnalistes, en pratique c'est du réformisme violent.

Cela n'a rien à voir avec la nécessaire politique révolutionnaire.

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