La bourgeoisie célèbre l'écrivain fasciste Céline
Submitted by Anonyme (non vérifié)L'écrivain fasciste Louis-Ferdinand Céline figure sur le catalogue des célébrations 2011, à l'occasion des 50 ans de sa mort.
Le discours hypocrite de la bourgeoisie sur Céline est désormais connu et maintes fois rabaché : "Certes, Céline a été à un moment de sa vie violemment antisémite - et il faut le condamner - mais il n'en demeure pas moins un immense écrivain qui a révolutionné la littérature avec "Voyage au bout de la nuit" et "Mort à crédit"... (on a droit généralement ici à une litanie sur le fait qu'il y a eu un "avant" et un "après" Céline)".
Le "professeur émérite à la Sorbonne" Henri Godard, qui est le signataire de la préface, explique ainsi:
«Doit-on, peut-on célébrer Céline? Les objections sont trop évidentes. Il a été l'homme d'un antisémitisme virulent (…). Mais il est aussi l'auteur d'une œuvre romanesque dont il est devenu commun de dire qu'avec celle de Proust elle domine le roman français de la première moitié du XXe siècle.»
Est-ce vrai? Non, c'est totalement faux. L'opinion publique célébrait alors Henri Barbusse, et pas Céline! Céline et Proust sont inversement deux auteurs nombrilistes, totalement décadents, expressions de l'idéalisme parasitant toute la pensée. Proust et Céline sont les représentants de la littérature qui échoue à se réaliser autrement que dans le culte de soi-même, dans l'individualisme monomaniaque, dans la décadence.
Evidemment, la bourgeoisie se célébrant, même et surtout dans la décadence, ne saurait admettre cela. La petite présentation de Céline dans le livret des célébrations 2011 ne déroge pas à la règle. La bourgeoisie empêche toute compréhension matérialiste en dépeignant Céline sous les traits d'un "génie" tourmenté par le mal, ce qui lui confère opportunément le cachet indélébile d' "artiste maudit". Le côté "artiste maudit" permet d'attirer les dandy bourgeois en mal de "sensations", fascinés par la misanthropie de Céline, signe de ceux qui se sentent supérieurs et dans lesquels ils aiment se reconnaître (car eux aussi se veulent "à part").
Selon le discours dominant de la bourgeoisie, le formidable style de Céline se serait mis au service de chefs d'oeuvre ("Voyage au bout de la nuit", "Mort à crédit") avant de sombrer dans un antisémitisme "hystérique", puis de retrouver de la hauteur après guerre avec "D'un château l'autre".
Bien évidemment, tout ceci est faux, faux parce qu'anti-matérialiste.
En effet, d'un point de vue matérialiste, le style n'existe pas en lui-même mais en tant que matérialisation d'idées, d'une vision du monde. Voilà pourquoi le PCMLM s'attache à étudier la dimension culturelle du mouvement fasciste.
Ainsi, Céline, dans "Voyage au bout de la nuit" ou "Mort à crédit" est déjà un fasciste, et c'est justement son style qui relève indéniablement du fascisme. Le style de Céline consiste à mélanger tirades de vulgarité et langage "recherché" qui s'unisse en un tout cohérent.
C'est la dialectique du fascisme, d'un côté le nihilisme (vulgarité assumée), d'un autre côté l'élitisme (volonté de se montrer "supérieur"). Les longues tirades vulgaires de Céline sont fréquemment entrecoupées de points de suspension ou de points d'exclamations, ce qui traduit la volonté de ne rien construire, de ne surtout pas apparaître comme excessivement cohérent et logique, même quand les phrases sont intelligibles.
Il s'agit ici d'une posture éminemment fasciste qui entend se dérober à la matière (ce qui est bien sûr impossible) et faire du style pour le style, comme les bourgeois qui aiment s'écouter parler.
Céline l'écrit d'ailleurs clairement dans Mea Culpa (1936) son pamphlet contre l'URSS de l'époque de Staline :
"Rabaisser l'Homme à la matière, c'est la loi secrète, nouvelle, implacable... Quand on mélange au hasard deux sangs, l'un pauvre, l'autre riche, on n'enrichit jamais le pauvre, on appauvrit toujours le riche... Tout ce qui aide à fourvoyer la masse abrutie par les louanges est bienvenu. Quand les ruses ne suffisent plus, quand le système fait explosion, alors recours à la trique ! à la mitrailleuse ! aux bonbonnes !..."
Ce passage montre bien que Céline, plutôt que de lutte de classes, s'intéresse à l'unité de sang, de "race" qu'il s'agit de ne pas affaiblir. De même, la révolution est réduite à un bain de sang à visée coercitif, ce qui correspond à la misanthropie nihiliste du personnage et de son dédain pour le peuple et le pouvoir qu'il exerce. On lit ainsi plus loin :
"La grande prétention au bonheur, voilà l'énorme imposture ! C'est elle qui complique toute la vie ! Qui rend les gens si venimeux, crapules, imbuvables. Y a pas de bonheur dans l'existence, y a que des malheurs plus ou moins grands, plus ou moins tardifs, éclatants, secrets, différés, sournois..."
Et c'est justement toute cette vision anti-matérialiste de Céline que la bourgeoisie défend dans le livret des célébrations 2011 en évoquant sa "découverte des réalités de l'URSS".
Corrélatif du style, les thème abordés et les idées exprimées dans "Voyage au bout de la nuit" (1932) sont eux aussi typiques du fascisme. Par exemple, cet extrait montre bien l'alliance du style saccadé et d'une thématique du fascisme, à savoir ici l'affirmation de la virilité face à d'autres hommes qui en sont dépourvus (et qui ne sont pas vraiment des hommes) :
"Ils m’horripilaient tous à la fin ces ratés, ces enculés, ces soushommes. « Foutez-moi le camp tous ! que je leur ai répondu ; c’est la jalousie qui vous fait baver et voilà tout ! S’ils me font crever les Américains, on le verra bien ! Mais ce qu’il y a de certain, c’est que tous autant que vous êtes, c’est rien qu’un petit four que vous avez entre les jambes et encore un bien mou !"
Dans la même veine patriarcale, Céline adopte une logique anti-faible :
"Souvent les personnes délicates c'est des personnes qui peuvent pas jouir"
(Mort à crédit).
Pour Céline, le rapport à la sexualité est évidemment une mécanique répondant aux pulsion masculines qui aide à se sentir en vie et donc, la prostitution occupe une place tout à fait légitime :
"Comme nous lisions nombre de journaux cochons à notre hôtel, on en connaissait des trucs et des adresses pour baiser dans Paris ! [...] Il subsiste en vous toujours un petit peu de curiosité de réserve pour le côté du derrière. On se dit qu’il ne vous apprendra plus rien le derrière, qu’on a plus une minute à perdre à son sujet, et puis on recommence encore une fois cependant rien que pour en avoir le coeur net qu’il est bien vide et on apprend tout de même quelque chose de neuf à son égard et ça suffit pour vous remettre en train d’optimisme.
On se reprend, on pense plus clairement qu’avant, on se remet à espérer alors qu’on espérait plus du tout et fatalement on y retourne au derrière pour le même prix. En somme, toujours des découvertes dans un vagin pour tous les âges"
("Voyage au bout de la nuit").
Il faut donc bien comprendre que les pamphlets antisémites de Céline ne constituent pas une rupture mais un développement de sa pensée qui, en tant que matière, se transforme avec l'époque.
Etant donné que, comme dans les années 30, nous connaissons aujourd'hui une progression du fascisme bénéficiant de la crise générale du capitalisme, les propos d'un Céline recoupent ceux d'un Soral (entre autres) :
"J’ai rien de spécial contre les Juifs en tant que juifs, je veux dire simplement truands comme tout le monde, bipèdes à la quête de leur soupe... Ils me gênent pas du tout. Un Juif ça vaut peut-être un Breton, sur le tas, à égalité, un Auvergnat, un franc-canaque, un "enfant de Marie"... C’est possible... Mais c’est contre le racisme juif que je me révolte, que je suis méchant, que je bouille, ça jusqu’au tréfonds de mon benouze !... Je vocifère ! Je tonitrue ! Ils hurlent bien eux aux racistes ! Ils arrêtent jamais ! Aux abominables pogroms ! Aux persécutions séculaires ! C’est leur alibi gigantesque ! C’est la grande tarte ! Leur crème ! On me retirera pas du tronc qu’ils ont dû drôlement les chercher les persécutions ! Foutre bite !"
(Céline, "Bagatelles pour un massacre", 1937) ;
"Quand avec un Français, Juif sioniste, tu commences à dire “y a peut être des problèmes qui viennent de chez vous. Vous avez peut-être fait quelques erreurs. Ce n'est pas systématiquement la faute de l'autre, totalement, si personne ne peut vous blairer partout où vous mettez les pieds.” Parce qu'en gros c'est à peu près ça leur histoire, tu vois. Ça fait quand même 2500 ans, où chaque fois où ils mettent les pieds quelque part, au bout de cinquante ans ils se font dérouiller. Il faut se dire, c'est bizarre ! C'est que tout le monde a toujours tort, sauf eux".
(Alain Soral en 2004).
Le style de Céline, mélange de vulgarité se complaisant dans sa saleté et de traits "raffinés", est en vérité facilement imitable par un dandy en révolte contre le monde moderne, dévoré par la misanthropie et se rêvant en génie incompris.
Et c'est parce qu'il est facilement imitable qu'il est imité, comme chez Nabe par exemple. On retrouve donc chez Nabe le même ton saccadé et la brutalité patriarcale de type fasciste, comme on peut le voir par exemple sur cette vidéo.
Pareil ferveur s'observe chez des anonymes qui n'en finissent pas d'imiter Céline. Deux exemples du même internaute sur deux sites différents :
"Putain, vive la solitude, oublier tous ces fous, ces dingues, ces raffoleurs de merde... qu'ils crèvent de leur libéralisme gangréneux et des maîtres du libéralisme.
Pourriture, y a pas d'amis, Marcel Aymé, Gen Paul, tous des traîtres, et ne parlons même pas des autres, foutre de gens, foutre de crasses humaines, de merdes sur pattes. Femmes, hommes, tous des rats jouisseurs, crevards, salauds en tutus.
Nique leurs ancêtres.
Nique leur vie.
VIVE CELINE, au-de là de sa mort. Son esprit est toujours là, je lui parle moi à Céline"
"Y a plus que l'imaginaire, c'est tout, se faire une liberté dans l'imaginaire" ; "Bah oui ! c'est comme ça, c'est presque tout le vingtième siècle, et puis c'est rien, tout le monde vaque sur la route, marinant les mêmes saloperies, bien domestiqués tant qu'y a travail, tunes, et divertissements pas chers, et puis possibilité de niquer à droite et à gauche... mais si ça tournait au vinaigre, à l'enculerie à queue d'éléphant, je suis sûr que certains trouveraient Céline carré dans le verbe, carrément photographe du genre humain !...".
Céline n'est pas un génie qui s'est "égaré" dans l'antisémitisme comme voudrait le faire croire la bourgeoisie. Céline était un fasciste dès "Voyage au bout de la nuit". Son style, fait d'éructations vulgaires qui se veulent élégantes, est fasciste. La trajectoire de Céline est celle d'un fasciste à son époque.
A bas l'imaginaire bourgeois, idéalisme nombriliste en quête de paradis artificiels et célébrant la misanthropie.
Vive le matérialisme dialectique, affirmant le besoin de communisme et d'harmonie avec la biosphère!