Il y a 50 ans Khrouchtchev lisait son « rapport secret » et donnait naissance au conflit entre le révisionnisme moderne et les communistes authentiques
Submitted by Anonyme (non vérifié)Un spectre hante le monde, celui de Joseph Staline.
Car Staline n'a pas seulement été un symbole du communisme, ennemi juré du capitalisme, il est également un autre symbole : celui de l'opposition complète au libéralisme. Que l'on s'oppose à la concurrence, que l'on planifie et l'anathème petit-bourgeois tombe: « stalinien! »
« Stalinien » est devenu synonyme d'une personne autoritaire et unilatérale, intervenant là où il ne devrait pas le faire. Le terme de « stalinien » a ainsi été utilisé à toutes les sauces par la bourgeoisie, jusqu'à l'absurde.
Mais pas seulement pour la bourgeoisie. Quelle crédibilité ont ainsi les trotskystes qui accusent le « Parti communiste français » d'être stalinien alors que non seulement ils veulent s'allier avec ce parti, mais qu'en plus ce parti a rejeté Staline depuis des dizaines et des dizaines d'années?
Quelle crédibilité ont les anarchistes qui caricaturent Staline pour ne pas montrer aux masses qu'ils abhorrent également Lénine, Marx, Engels?
Dans l'imagerie folkorique anarcho-trotskyste, les « staliniens » sont les contre-révolutionnaires qui ont empêché leurs idéologies de triompher.
Les « staliniens » sont la cause de tous leurs maux, et peu importe si ces « staliniens » s'avèrent idéologiquement partisans ou opposés à Staline.
Tout est dans le fantasme, un fantasme qui a une source bien précise : le rapport secret de Kroutchtchev.
Ce rapport a été « secret » car il a été totalement caché aux masses d'URSS.
Il a par la suite même été totalement nié par la direction soviétique, alors que les Etats-Unis d'Amérique l'imprimaient un mois après et le diffusaient dans le monde entier.
Ce qui amènera la situation cocasse de partis communistes d'Europe niant ce rapport et l'attribuant à la CIA.
Ce n'est qu'en 1988 que le PC d'URSS reconnaîtra que le rapport secret a bien existé!
Ce rapport a donc été lu lors d'une réunion secrète le soir du dernier jour du 20ème congrès du Parti communiste d'URSS, après que ce congrès se soit terminé.
Commencé le 14 février 1956 et se terminant le 24 février, il y a 50 ans, le congrès n'a pas contenu une seule critique de Staline.
De la même manière, alors qu'il affirme en pratique le contraire économiquement et politiquement que le 19ème congrès, auquel a participé Staline, le 20ème congrès ne critique pas ce congrès précèdent.
Le seul aspect critique tient dans une phrase tiré du rapport politique de Kroutchtchev affirmant que « Ces derniers temps dans le Parti, la direction collective et la démocratie dans la société, les lois de l'URSS ont été très souvent blessées. »
C'est donc le soir du 24, alors que le congrès est terminé, que Kroutchtchev lit un « rapport secret » intitulé « Sur le culte de la personnalité et ses conséquences », lecture faite au nom de l'ensemble du comité central élu au 20ème congrès.
Il va de soi que le comité central venant d'être élu ne pouvait rédiger ce document aussi rapidement; Kroutchtchev a attendu le moment favorable pour pouvoir le faire. De la même manière, Kroutchtchev en a profité pendant les trois années passées depuis la mort de Staline pour renouveler au maximum les postes importants et mettre brutalement de côté des figures historiques comme Béria, Molotov, Kaganovitch.
Le document affirme que Staline a mené une répression inutile, qui tenait uniquement à son caractère personnel.
Selon le rapport, il n'y avait plus de classes ennemies en URSS au moment où est formé le concept d'« ennemi du peuple » (attribué faussement à Staline) ; l'ensemble des répressions menées n'a tenu qu'au caractère malade, « hystérique », « nerveux », « paranoïaque », etc. de Staline.
De même, Staline n'aurait rien géré durant la guerre avec l'Allemagne hitlérienne car il était démoralisé, la rupture avec la Yougoslavie de Tito tenait à son caractère, Staline n'aurait connu la réalité de la Russie que par les films, il aurait planifié les plans militaires sur une mappemonde, etc. etc.
Toutefois, selon Kroutchtchev, Staline pensait faire le bien des gens, « Selon lui ces actes servaient les intérêts du Parti, des masses travailleuses, la fondation des conquêtes de la révolution. C'est là qu'est la grande tragédie! »
Une précaution oratoire que Kroutchtchev ne pouvait éviter, lui qui comptait procéder pas à pas.
Car il va de soi que ces accusations visant à faire d'un homme un « bouc émissaire » ne consiste qu'en une manoeuvre politique.
Quiconque connaît l'histoire de l'URSS sait que toutes les décisions politiques et économiques prises par le PC d'URSS peuvent être largement connues par les documents des différents congrès, que ce soit le conflit avec les Koulaks ou la critique du trotskysme. Contrairement aux arguments fantasmatiques des trotskystes, Staline ne niait pas leur existence, mais au contraire n'a jamais cessé d'en parler et d'être le premier à expliquer ouvertement leurs thèses et à y répondre.
Si Kroutchtchev agit ainsi, c'est pour dépolitiser la question de Staline, car il est opposé au système en vigueur en URSS.
Il est un partisan du capitalisme et ses partisans doivent conquérir un par un les postes de direction en URSS, tout en endormant les masses.
Voilà pourquoi le rapport a été secret.
Ce n'est d'ailleurs qu'au 22ème congrès, en octobre 1961, que Kroutchtchev osera publiquement attaquer Staline, pour faire passer un changement du programme du Parti ainsi que la réhabilitation des partisans du capitalisme combattus à l'époque de Staline.
Ce n'est ainsi que 5 ans après le rapport secret que Kroutchtchev osera faire enlever le corps de Staline du mausolée de Lénine.
Le nom de Staline disparaît alors, il n'est plus mentionné dans les livres, il n'est cité nul part, même pas pour l'histoire de la seconde guerre mondiale impérialiste.
Staline disparaît, devenu le synonyme de quelque chose rejeté à la fois par l'URSS de Kroutchtchev et le monde capitaliste.
Cela fait 50 ans, et pourtant la petite-bourgeoisie anarchiste et trotskyste considère encore des gens comme Robert Hue ou Marie-Georges Buffet comme des « staliniens » !
Mais il en est qui à l'époque se sont opposés à ce rejet de Staline. N'apprenant que par la bande les nouvelles conceptions de Kroutchtchev, ils sont « apparemment » d'abord allés dans son sens, tout en soulignant la signification historique de Staline.
Le premier document à réaffirmer que Staline a été un grand communiste vient le 5 avril 1956 du Parti communiste de Chine et s'intitule « A propos de l'expérience historique de la dictature du prolétariat », suivi le 29 décembre 1956 du document « Encore une fois sur l'expérience historique de la dictature du prolétariat. »
Mais les documents émettent de nombreuses critiques de Staline, allant apparemment sur certains points dans le même sens que Kroutchtchev.
Cette position est la même que celle qui sera défendu par le Parti du Travail d'Albanie (PTA) en 1960.
Jusque-là le PTA avait été le seul Parti communiste à ne pas participer à la critique de Staline.
Ainsi, lors d'une réunion des 87 Partis communistes et ouvriers le discours de son dirigeant Enver Hoxha le 16 novembre 1960 réaffirme que Staline a été un grand communiste, même si le culte de la personnalité est une déviation qu'il faut critiquer.
Cela signifie que lorsque Kroutchtchev mène sa grande attaque contre Staline, aucun Parti n'a compris la profondeur et la signification de cette attaque.
Les deux seuls partis qui ont critiqué Kroutchtchev, le PC de Chine et le PTA, ont tout d'abord accepté le concept de « culte de la personnalité » et la critique de Staline, même s'ils considéraient que Staline avait été un grand communiste.
Ni le PC de Chine ni le PTA n'ont au départ mené une lutte correcte contre ce qui a été un phénomène nouveau et qui a été appelé le révisionnisme moderne.
Il faudra de nombreuses analyses et critiques de la position soviétique pour qu'une critique profonde du révisionnisme moderne apparaisse.
C'est ce que les médias bourgeois ont appelé le conflit sino-soviétique et qui a pris le nom dans le mouvement communiste international de « grande polémique. »
Cette « grande polémique » a pu être lancé grâce aux nombreuses critiques faites par les communistes de Chine, par toute une série de documents : Prolétaires de tous les pays, unissons-nous contre l'ennemi commun (15 décembre 1962) ; Les divergences entre le camarade Togliatti et nous (31 décembre 1962) ; Léninisme et révisionnisme moderne (5 janvier 1963) ; Unissons-nous sous la bannière des déclarations de Moscou (27 janvier 1963) ; D'où proviennent les divergences : réponse à Maurice Thorez (27 février 1963) ; Encore une fois sur les divergences entre le camarade Togliatti et nous (4 mars 1963) ; Commentaires sur les déclarations du PC des Etats-Unis (8 mars 1963) ; Le miroir des révisionnistes (9 mars 1963) ; La vérité sur l'alliance de la direction du PCUS avec l'Inde contre la Chine (2 novembre 1963).
La position du PC de Chine va obliger la direction soviétique à réagir par le long texte intitulé "Propositions concernant la ligne générale du mouvement communiste internationale ", que les communistes de Chine ont rejeté par une lettre en 25 points.
Le PCUS répondit de manière brutale à cette critique, amenant une réponse du PC de Chine par un communiqué le 15 août 1963, puis par une série de textes : Les divergences entre la direction du PCUS et nous - leur origine et leur évolution (6 septembre 1963) ; Sur la question de Staline (13 septembre 1963) ; La Yougoslavie est-elle un pays socialiste? (26 septembre 1963) ; Des défenseurs du néo-colonialisme (22 octobre 1963) ; Deux lignes différentes dans la question de la guerre et de la paix (19 novembre 1963) ; Deux politiques de coexistence pacifique diamétralement opposés (12 décembre 1963) ; Les dirigeants du PCUS sont les plus grands scissionnistes de notre temps (14 février 1964) ; La révolution prolétarienne et le révisionnisme de Khrouchtchev (31 mars 1964) ; Le pseudo-communisme de Khrouchtchev et les leçons historiques qu'il donne au monde (14 juillet 1964).
Cette critique s'approfondira par la suite avec d'autres documents comme Le triomphe du léninisme (22 avril 1965) ; Luttons jusqu'au bout contre le révisionnisme khrouchtchevien (14 juin 1965) ; De l'unité d'action de la nouvelle direction du PCUS (11 novembre 1965) ; Les dirigeants du PCUS traîtres aux deux déclarations de Moscou (30 décembre 1965).
Le but étant de rallier la gauche de ces PC, tous en proie à une lutte entre deux lignes et donc considérés comme pas encore totalement révisionnistes.
Un autre aspect était l'espoir de stimuler les masses d'URSS et du monde attachées à Staline contre le révisionnisme.
Comprendre cela est très important si l'on veut comprendre comment aujourd'hui certains s'appuient sur cette critique insuffisante du départ, et cette critique éducative de la suite, pour passer en contrebande leur propre idéologie et eux-mêmes attaquer Staline tout en prétendant défendre Mao Zedong.
Il y a une énorme différence entre la position chinoise de la fin des années 1950 et du début des années 1960, où est encore tenté d'influer sur la position soviétique, et les années suivantes où le PC de Chine considère qu'il y a eu en URSS une restauration du capitalisme et que désormais l'URSS est un Etat fasciste, du type hitlérien, selon les propres mots de Mao Zedong.
Il n'est de fait aucunement possible de s'appuyer sur les premiers documents pour avoir une position correcte concernant Staline ou l'URSS; il faut pour cela se fonder sur une analyse approfondie qui n'est apparue qu'après, avec la conception du révisionnisme moderne et du « social-impérialisme » russe.
Une preuve fondamentale de cela est la position concernant la Yougoslavie. Au départ, les documents chinois considèrent qu'effectivement Staline a joué un rôle négatif dans la rupture de l'URSS avec la Yougoslavie. Par la suite, les documents chinois expliqueront qu'au contraire, la critique de la Yougoslavie était correcte et que l'URSS prend précisément la même voie.
La Yougoslavie titiste n'a jamais pratique la révolution agraire et Khrouchtchev veut justement abandonner les collectivisations menées à l'époque de Staline, les entreprises yougoslaves sont autonomes (autogérés) et en concurrence et c'est le modèle pour Khrouchtchev etc. etc.
Comprendre cela est d'une grande importance pour saisir la signification de deux déviations fondamentales à ce sujet.
La première consiste à se contenter d'une critique superficielle de Khrouchtchev, s'appuyant simplement sur les premiers textes chinois.
Cela a été le cas de tous les marxistes-léninistes qui ont défendu la position chinoise mais ne connaissaient rien à l'économie politique; ces gens-là sont tous tombés dans le marais social-démocrate ou dans l'anti-communisme, sous prétexte d'anti-soviétisme.
Cela a particulièrement été le cas en France.
La seconde consiste à nier l'approfondissement de la critique du révisionnisme moderne et à rejeter tout caractère marxiste à ceux qui n'ont pas immédiatement critiqué Khrouchtchev sur une base totalement correcte. Cela a été la position du PT d'Albanie, qui dès la mort de Mao a accusé celui-ci d'avoir eu en fait une critique de Staline proche de la conception de Khrouchtchev.
S'appuyant sur les textes de la fin des années 1950, le PT d'Albanie a pu entraîner beaucoup de gens sincères avec lui.
Puis, toute une partie de ces gens sincères se sont aperçus qu'en fait le PT d'Albanie n'avait pas lui non plus critiqué Khrouchtchev au moment où celui-ci avait critiqué Staline.
Ces marxistes-léninistes ont alors considéré que le PTA avait été révisionniste aussi.
C'est pourquoi ceux qu'on appelle encore « pro-albanais » aujourd'hui ne se revendiquent pas de l'Albanie, mais seulement de l'URSS de Lénine et de Staline.
Le marxisme-léninisme-maoïsme considère que ces deux déviations aboutissent à un même résultat : la négation de l'oeuvre de Joseph Staline.
Dans la première déviation, Staline est un sous-Mao, par conséquent son oeuvre peut s'effacer; dans la seconde déviation, Staline devient une icône et ses écrits sont compris en-dehors de tout aspect historique.
Nous pensons que les camarades sincères défendant la première conception devraient sérieusement se confronter à l'histoire du bolchévisme, car quiconque connaît la profondeur de la critique, sur le plan de l'économie politique, du trotskysme et du boukharinisme, connaît la signification des apports de Staline à la théorie communiste.
La vérité est que ceux qui nient les apports de Staline et ne veulent voir en lui qu'un « accident » entre Lénine et Mao sont des renégats, qui tentent de faire de Mao un « ultra-démocrate ».
C'est par exemple ce que fait en 2006 le PC révolutionnaire des USA, qui considère que Mao a inventé de nouvelles formes démocratiques, parce que Staline ne l'était pas et Lénine après tout pas tant que cela, etc. etc.
En fait, ces révisionnistes là transposent les principes de la « démocratie nouvelle » - la révolution anti-impérialiste et anti-féodale dans un pays opprimé - à un contexte capitaliste qui n'a rien à voir. Ils font ainsi de Mao un petit-bourgeois progressiste ultra-démocrate et rejettent de plus en plus Staline, présenté contre un contre-modèle.
De fait, cette conception a été celle de quasiment tous les marxistes-léninistes qui en France ont considéré positivement Mao Zedong.
Et cette vision des choses a également été celle qui justement refusaient l'ultra démocratisme, qui ont alors nié tout caractère prolétarien à Mao Zedong. Ces gens-là, partisans de la seconde déviation, se sont coupés eux-mêmes l'herbe sous le pied, ils s'empêchent eux-mêmes de critiquer à fond le révisionnisme moderne.
Mao n'est en effet pas un ultra-démocrate. On ne peut pas comprendre le révisionnisme moderne ni voir que Staline aboutit à Mao si l'on ne comprend pas cela.
Intéressons-nous donc à ce point et voyons pourquoi Mao est le digne successeur de Staline.
Prenons les thèses qui rejettent cela :
a) Mao Zedong n'aurait pas réellement été marxiste; ses conceptions n'auraient pas été scientifiques et il n'aurait été qu'un théoricien populiste.
b) La conception du Parti communiste selon Mao ne serait pas conforme aux thèses de Lénine; Mao aurait prôné l'existence permanente de plusieurs lignes en son sein et considéré que le Parti était celui de plusieurs classes sociales en même temps.
Étudions ces thèses.
La première affirmation est que Mao Zedong n'aurait pas été marxiste. Il ne pouvait pas l'être car sa manière de concevoir la science était incorrecte : Mao serait un populiste; il rejetterait les principes de « lois universelles » au profit d'un pragmatisme populiste, proche de la conception révisionniste soviétique de « l'Etat du peuple tout entier ».
Est ainsi souvent critiqué la conception suivant de Mao Zedong :
« Dans toute activité pratique de notre Parti, une direction juste doit se fonder sur le principe suivant: partir des masses pour retourner aux masses.
Cela signifie qu'il faut recueillir les idées des masses (qui sont dispersées, non systématiques), les concentrer (en idées généralisées et systématisées, après étude), puis aller de nouveau dans les masses pour les diffuser et les expliquer, faire en sorte que les masses les assimilent, y adhèrent fermement et les traduisent en action, et vérifier dans l'action même des masses la justesse de ces idées.
Puis, il faut encore une fois concentrer les idées des masses et les leur retransmettre pour qu'elles soient mises résolument en pratique. Et le même processus se poursuivra indéfiniment, ces idées devenant toujours plus justes, plus vivantes et plus riches.
Voilà la théorie marxiste de la connaissance. » («A propos des méthodes de direction»)
Pour ceux qui critiquent Mao cette thèse est erronée, car elle nie le principe scientifique d'une loi valable tout le temps et qui ne peut être connu que par la pratique scientifique, pas par l'accumulation d'expériences. Le document « marxiste-léniniste » intitulé « Du Parti de Thorez à la pensée de Mao » cite à ce sujet une phrase de Marx :
Il est paradoxal aussi de dire que la Terre tourne autour du Soleil et que l'eau se compose de deux gaz très inflammables.
Les vérités scientifiques sont toujours paradoxales lorsqu'on les soumet au contrôle de l'expérience de tous les jours qui ne saisit que l'apparence trompeuse des choses. (Salaire, Prix et Profit)
Mao n'aurait donc pas eu une véritable démarche scientifique, il serait un « matérialiste vulgaire », un partisan obtus de l'expérience brute, directe.
Pourtant, en réalité, cette conception mise en avant n'est pas scientifique, parce qu'elle tente de faire croire que la connaissance scientifique n'a rien à voir avec la réalité.
Marx a raison de dire que les vérités scientifiques sont « paradoxales » par rapport à l'apparence trompeuse des choses, mais cela ne veut nullement dire qu'une connaissance particulière s'oppose à la connaissance scientifique générale. Mao Zedong a très clairement souligné cela :
« En examinant une question, le marxiste doit voir le tout aussi bien que les parties.
Une grenouille, dans un puits, disait que «le ciel n'est pas plus grand que la bouche du puits. »
Cela est inexact, puisque le ciel n'est pas limité aux dimensions de la bouche du puits. Si elle avait dit «une partie du ciel est de la dimension de la bouche du puits», elle aurait dit vrai, parce que cela est conforme à la réalité. » (La Tactique de la lutte contre l'impérialisme japonais)
Ainsi, Mao Zedong n'a jamais considéré qu'une connaissance partielle ou particulière suffisait pour être scientifique.
Ce qu'il a dit est que cette connaissance est un début nécessaire, car la science a besoin de se confronter à la matière, sans quoi elle est idéalisme. Il reprend donc bien la conception de Lénine, pour qui :
« Pour connaître réellement un objet, il faut embrasser et étudier tous ses aspects, toutes ses liaisons et "médiations".
Nous n'y arriverons jamais intégralement, mais la nécessité de considérer tous les aspects nous garde des erreurs et de l'engourdissement. » (A nouveau les syndicats, la situation actuelle et les erreurs de Trotski et Boukharine)
Cette affirmation de Lénine contredit la thèse des idéologues pour qui la science a une connaissance « totale » des objets et ne s'appuie pas sur des « connaissances partielles. »
Ces gens ne comprennent en fait pas qu'« il y a de l'absolu dans le relatif » (Lénine, A propos de la dialectique) car ils rejettent le fait que la dialectique est la loi universelle.
Ils rejettent la thèse selon laquelle « La vie est donc également une contradiction qui, présente dans les choses et les processus eux-mêmes, se pose et se résout constamment. » (Engels, L'anti-Dühring)
Leur conception est idéaliste : ils pensent que le monde ne bouge pas et qu'il peut exister une connaissance « totale », équivalente à celle d'un dieu comme celui des religions juive, chrétienne ou musulmane.
Dans leur conception, l'Histoire n'existe pas; la science existe « abstraitement. »
Voilà pourquoi ils considèrent également Mao comme un populiste.
Pour eux l'histoire de la révolution c'est l'histoire de la « science marxiste »; voilà également pourquoi les « marxistes-léninistes » critiquant Mao Zedong sont divisés en de multiples sectes et opposés aux pratiques « populistes » comme la guerre populaire, la violence révolutionnaire en général, etc.
Si l'on considère que Mao a tort d'être un populiste, il est inévitable également qu'on rejette les principes de Mao concernant l'organisation des masses dans le socialisme.
La critique est ici que Mao se serait opposé à un Parti communiste monolithique.
Selon la critique, Mao Zedong considère que tout a deux aspects et qu'ainsi dans le Parti communiste il est normal qu'il y ait des marxistes et des non marxistes, des représentants de la classe ouvrière et des représentants opposés à la classe ouvrière, des gens corrects et des gens incorrects, des gens sincères et des gens non sincères, etc.
Cette conception n'étant pas conforme aux enseignements de Lénine et de Staline, la conception de Mao serait donc bien populiste et aucunement marxiste-léniniste.
Or, il va de soi que ces accusations sont une déformation complète des thèses de Mao.
En effet, Mao n'a jamais dit qu'il était une bonne chose qu'il y ait des éléments non marxistes dans le Parti communiste ni qu'une ligne contre-révolutionnaire puisse se développer. Il constate par contre que de tels phénomènes sont inévitables historiquement et qu'il faut donc, non pas les nier, mais les comprendre pour les combattre correctement lorsqu'ils apparaissent.
S'ils appliquaient leur raisonnement nihiliste jusqu'au bout, les « marxistes-léninistes » devraient alors critiquer Staline parce que dans le Parti il y avait Trotsky, Boukharine, Zinoviev, etc.
Ou encore critiquer Lénine parce qu'il y avait dans le Parti il y avait des éléments menchéviks, etc. etc.
La vérité est que la bataille pour la ligne rouge contre la ligne noire au sein du Parti forme l'histoire même du Parti communiste, car celui-ci se bat pour le nouveau et contre l'ancien.
Le point de vue de Mao est que :
« A mon avis, se prétendre omniscient et omnipotent comme le Bon Dieu serait présomptueux.
Quelle est donc l'attitude à prendre vis-à-vis d'un camarade fautif?
Il faut procéder à une analyse, adopter une méthode dialectique et non métaphysique.
La métaphysique - le dogmatisme - a prévalu pendant un temps dans notre Parti, ses tenants ont cherché à supprimer tous ceux qu'ils détestaient.
Plus tard, nous avons réfuté le dogmatisme et assimilé progressivement un peu plus de dialectique. Le concept fondamental de la dialectique, c'est l'unité des contraires.
Ce concept reconnu, que faut-il faire à l'égard d'un camarade fautif?
En premier lieu, il faut mener la lutte contre lui, de façon à le débarrasser de toutes ses idées erronées.
En second lieu, il faut tout aussi bien l'aider. En bref, et la lutte et l'aide.
Nous devons être animés de bonnes intentions et l'aider à se corriger pour qu'il s'en tire.
Cependant, à l'égard de gens d'une autre catégorie, notre attitude est différente.
Envers des individus comme Trotski ou comme, en Chine, Tchen Tou-sieou, Tchang Kouo-tao et Kao Kang, il ne peut être question de les aider, car ils sont incorrigibles.
Et de même des Hitler, des Tchiang Kaï-chek et des tsars: on ne peut faire autrement que de les abattre, car, eux et nous, nous nous excluons absolument.
En ce sens, ils ne présentent qu'un seul aspect, et non deux. » (La méthode dialectique pour assurer l'unité du Parti)
Une autre critique affirme que pour Mao le Parti est celui de différentes couches sociales. On lui reproche ici des phrases comme :
« Pour faire la révolution, il faut qu'il y ait un parti révolutionnaire.
Sans un parti révolutionnaire, sans un parti fondé sur la théorie révolutionnaire marxiste-léniniste et le style révolutionnaire marxiste-léniniste, il est impossible de conduire la classe ouvrière et les grandes masses populaires à la victoire dans leur lutte contre l'impérialisme et ses valets. » (Forces révolutionnaires du monde entier, unissez-vous, combattez l'agression impérialiste!)
Parce que pour les « marxistes-léninistes », Mao assimile la « classe ouvrière » aux « masses populaires ».
Mais dans ce cas, pourquoi ne reprochent-ils pas à Lénine d'avoir sur le drapeau rouge non pas simplement le marteau, symbole de la classe ouvrière, mais également la faucille, symbole de la paysannerie?
D'autres avancent alors l'argument selon lequel Mao aurait accepté l'existence d'autres partis en Chine populaire.
Ils citent alors d'habitude le passage du document « De la juste solution des contradictions au sein du peuple » :
« Quant à savoir si les partis démocratiques pourront exister durant une longue période, cela n'est pas simplement déterminé par le seul désir du Parti communiste, cela est aussi fonction du comportement des partis démocratiques et partant de la confiance qu'ils se voient accorder par le peuple. [...] Le contrôle mutuel n'est naturellement pas unilatéral : le Parti communiste peut contrôler les partis démocratiques, et ceux-ci peuvent aussi contrôler le Parti communiste. »
En faisant cela, ils omettent naturellement le fait que Mao précise bien que ce « contrôle » correspond à six critères définis extrêmement précisément, critères affirmant explicitement qu'il fallait renforcer la direction exercée par le Parti Communiste, la construction du socialisme, etc.
Il ne s'agit donc en aucun cas d'une soumission à des partis démocratiques considérés comme des égaux du Parti communiste, mais seulement d'une politique d'ouverture à des classes sociales n'étant pas encore opposées au socialisme au stade où il en était à ce moment là.
Certains reconnaissent ce fait, mais disent que Mao a eu tort de croire que ces « partis démocratiques » accepteraient de construire le socialisme.
Ce point de vue est également erroné, car cette position concerne uniquement la période appelée « Démocratie nouvelle », où il s'agit d'écraser le féodalisme et l'impérialisme.
Mao Zedong dit explicitement dans « La démocratie nouvelle » : « Cette république de démocratie nouvelle sera différente des républiques capitalistes de l'ancien type européen et américain, à dictature bourgeoise, qui représente la vieille forme, déjà périmée, de la démocratie; d'autre part, elle sera différente aussi de la république socialiste du type soviétique, à dictature prolétarienne. »
Mao dit également très précisément : « C'est une forme pour une période donnée de l'histoire, donc une forme transitoire, mais une forme nécessaire, indispensable. »
On reproche à Mao d'accepter l'existence d'autres partis représentant d'autres classes que la classe ouvrière et la paysannerie, mais le fait est que ces classes existaient encore et n'étaient pas des ennemis de la révolution démocratique.
La Chine populaire n'avait pas encore atteint le niveau de la dictature du prolétariat où il n'y a plus que deux classes principales et fondamentalement antagoniques.
Le fait est que cette conception a été considérée comme juste par Staline lui-même, que ce principe de la « démocratie populaire » a été appliqué dans l'ensemble des pays de l'Est libérés du fascisme en 1945, que le manuel d'économie politique soviétique explique au début des années 1950 qu'il y a justement plusieurs degrés d'avancée dans le socialisme, selon les classes encore en présence et le degré de socialisation.
La Chine populaire a très clairement été présenté dans le manuel comme un pays socialiste et on y trouve de longues citations de Mao Zedong.
Le fait est qu'à l'initiative soviétique des discussions bilatérales ont eu lieu à la fin 1949 et le début 1950 entre le PC d'Union Soviétique et le PC de Chine, en présence de Staline et de Mao. Le PCUS en a-t-il conclu qu'il fallait critiquer la Chine populaire? Non.
Non seulement la Chine populaire n'a pas été critiqué, mais les oeuvres principales de Mao Zedong ont été publié en URSS puis en Europe.
Pourtant, si l'on considère comme vrai ces propos de Mao au sujet de Staline, cela a été un processus difficile : « Pendant les combats il a à moitié cru en nous et à moitié douté. Lorsque nous avons gagné, il avait le soupçon que notre victoire serait une victoire à la Tito et lors des années 1949 et 1950, nous avons été soumis à une forte pression. »
Cette citation de Mao Zedong provient du tome 5 de ses oeuvres, édité après sa mort et dont la plupart des textes sont posthumes et pour beaucoup modifiés par Deng Xiaoping. Mais dans le cas où cela a été vrai que Staline doutait du PC de Chine, chose restant à prouver car il n'existe aucun document du PC d'Union Soviétique étayant cela, le fait est qu'à la suite des discussions de 1949-1950 (où Staline et Mao Zedong étaient eux-mêmes présents!), aucune critique du PC de Chine n'a été faite par Staline et le PC d'Union Soviétique.
Certains critiquent également le principe de « pensée Mao Zedong » élaboré par le PC de Chine, principe affirmant que la pensée Mao Zedong a été l'application concrète du marxisme-léninisme à la Chine. Pour eux cela ne serait pas « marxiste-léniniste ».
Mais ce principe a été mis en avant au 7ème congrès du PC de Chine en.... 1945.
Cela signifie que le PC d'Union Soviétique connaissait ce principe et ne l'a jamais critiqué!
Tout cela montre bien qu'opposer Staline et Mao Zedong n'a aucun sens historique !
L'histoire ne peut pas être refaite.
Staline a commis des erreurs, mais ces erreurs sont secondaires, elles font partie du patrimoine de la première tentative de construire le socialisme, elles n'ont qu'une importance minime comparé au reste, qui est une composante inébranlable du marxisme-léninisme-maoïsme.
Mao a toujours reconnu être le disciple de Marx, Engels, Lénine et Staline.
Que ce soit lorsqu'il a affirmé que « Nous sommes reconnaissants à Marx et Engels, à Lénine et Staline qui nous ont donné des armes.
Ces armes ne sont pas des mitrailleuses, mais le marxisme-léninisme. », ou bien lorsque Staline a été défendu comme un grand communiste, un classique, par le Parti communiste de Chine.
Staline ! Voilà un nom qui fait trembler la bourgeoisie, et non pas parce que c'est une icône à afficher en tenue de militaire dans une chambre, mais parce que son histoire va du cambriolage de banques pour le Parti à la révolution de 1917, des écrits pour le Parti jusqu'à la fondation du concept de marxisme-léninisme, de la construction du socialisme jusqu'à la victoire sur le nazisme, de la critique de Trotsky à celle de Tito, de la liquidation des koulaks jusqu'à celle de tous les contre-révolutionnaires.
Non, Staline n'est pas mort, il vit dans notre combat et son spectre hantera la bourgeoisie jusqu'à sa disparition complète sous les coups de l'histoire!
Pour le PCMLM, février 2006.