17 avr 2012

Marine Le Pen assume ses traditions réactionnaires anticommunistes

Submitted by Anonyme (non vérifié)

La ligne de Marine Le Pen la semaine dernière a consisté en la mise en avant tactique de valeurs de droites dures, très réactionnaires, critiquant notamment la « folie » des communistes. Non pas que ces valeurs n’existaient pas avant, mais elles pouvaient apparaître comme secondaires par rapport à la mise en avant d’un discours soi-disant « social » pour attirer les masses populaires.

Cela avait entretenu une certaine confusion, qui va clairement dans le sens du fascisme, au point que certains commentateurs bourgeois ont pu en arriver à se demander si Marine Le Pen ne serait pas « de gauche ». Ce fut le cas par exemple sur le site souverainiste causeur.fr cette semaine de la part de Frédéric Rouvillois, professeur de droit constitutionnel à Paris Descartes et s’intéressant « tout particulièrement à l’histoire des idées et des mentalités ».

Pour comprendre les apparentes oscillations politiques de Marine Le Pen, tantôt vers la gauche, tantôt bien à droite, il faut comprendre qu’elles sont constitutives de son idéologie et qu’elles sont tout à fait logiques.

 

La politique de Marine Le Pen depuis sa prise du pouvoir dans le FN consiste précisément à faire le ménage dans l’arène politique française et bouleverser les normes bourgeoises traditionnelles qui prédominent encore. Elle expliquait bien cela cette semaine, dans le Courrier Picard où elle répondait à la question de savoir s’il elle était toujours d’extrême-droite :

« Mon rôle est de faire émerger la vrai fracture qui, en réalité, traverse la France entre les mondialistes et les nationaux. Et dans les nationaux, il y a effectivement des gens qui viennent de la droite et de la gauche ». 

Effectivement Marine Le Pen n’est pas à proprement parler d'extrême-droite, puisqu’elle s’inscrit dans une dynamique fasciste. La différence consiste en ce que l’extrême-droite a un simple rôle de polarisateur à droite dans le cadre de la démocratie bourgeoise, tandis que le fascisme consiste en la prise du pouvoir directe par la bourgeoisie impérialiste, justement contre la démocratie bourgeoise. 

Selon le point de vue fasciste, la contradiction principale de la société se fait donc autour de la question de la Nation. Marine Le Pen a réussi à imposer cette vision fasciste dans le débat politique français, c’est pour cela qu’elle semble bouleverser à priori la vision classique de « droite » et « gauche ». 

Mais une fois cela dit, il apparaît bien que Marine Le Pen reste bien ancrée à droite, dans une tradition fasciste de droite bien réactionnaire.

Jean Luc Mélenchon travaille lui aussi – de fait – pour le fascisme, mais dans sa version de « gauche ». Il donne à la question nationale une importance primordiale en France aujourd’hui, mais il s’appuie pour cela sur des valeurs présentées comme progressistes (dans la tradition révisionniste du P«C»F).  C’est ce qu’il a fait dans son discours de Toulouse en mettant en avant un nationalisme agressif, mais qui se voudrait universel et progressiste (bien qu’il y niait honteusement l’antisémitisme à Toulouse même).

Il est en tout cas tout à fait logique que l’anticommunisme primaire de Marine Le Pen revienne sur le devant de la scène aujourd’hui et qu’elle critique Mélenchon comme un soi-disant bolchevik.  Elle a donc dénoncé la semaine passée à propos du pseudo engouement autour du Front de Gauche, une résurrection « du PC et son cortège de folie, de violence, d’anarchie » qui aurait fait « 100 000 000 morts dans l’histoire ».

Cela peut sembler assez surréaliste comme critique quand on voit cet appareil inoffensif qu’est « le PC », mais il faut bien voir que pour les réactionnaires, le Communisme représente l’ennemi absolu : ils comprennent bien que le Socialisme pour lequel se battent les communistes a une portée universelle qui abolira les frontières et débarrassera les Nations. 

Mais il faut bien remarquer aussi une chose ici, c’est que si Marine Le Pen a critiqué « le PC » c’était pour critiquer l’UMP de Sarkozy. Elle dénonçait en fait «ces gens (qui) sont si malhonnête qu’ils sont prêt à ressusciter le PC », après avoir attaquer « Monsieur Ciotti (UMP) censé être de la droite de la droite (qui) fait l’éloge de Monsieur Mélenchon ». 

Elle rajoutait ensuite, en toute logique fasciste : « Et bien merci de cet aveu. Je les remercie de montrer aux Français ce qu’ils sont réellement. Ils sont prêt à tout pour conserver le pouvoir ».

« Aveu », « qui ils sont vraiment »,… on est là en pleine vision fasciste d’un complot judéo-bolchevik. Surtout qu’elle rajoute juste après, à propos d’un sondage qui mettait Mélenchon devant elle : « tiens c’est drôle, c’est celui de Monsieur Bolloré, comme par hasard ». 

Tactiquement, le jeu de Marine Le Pen est assez simple : elle tente de déborder l'UMP sur la droite, en reprochant fondamentalement à Nicolas Sarkozy de ne pas être véritablement de droite. Dans sa conception, la droite libérale - atlantiste serait infiltrée, elle se servirait des valeurs de droites pour arriver à ses fins « mondialistes ». 

Cette interprétation est tout a fait conforme à la vision fasciste d'un complot judéo-bolchevik contre la Nation : selon les plus radicaux, Sarkozy serait alors le représentant de « l'Argent » et les communistes du cosmopolitisme... C'est une vision profondément antisémite.

D’ailleurs, à ce compte là, il est à noter que Marine Le Pen commence, comme cela était logiquement prévisible, à s'écarter de sa ligne soi-disamment pro-sioniste. Déjà à propos de Mohamed Merah, Marine Le Pen n’a pas hésité à nier l’antisémitisme présent dans l’extrême-droite française pour mieux renforcer sa haine anti-arabe, mais voilà encore que Florian Phillipot le directeur stratégique de sa campagne, se prononçait sur France Inter contre le port de la kippa dans les bus (justifiant que c’est un « service public » et que la laïcité doit s'y appliquer).

Voilà bien qui, à peine un mois après les massacres de Toulouse, présage d’une ambiance très réactionnaire en France. 

C'est à la fois comme produit et comme cause de cette ambiance réactionnaire que le FN se repositionne de plus en plus sur ses valeurs de droite maintenant. Mais une droite qui se prétend « anti-bourgeoise »... ou plutôt qui critique la bourgeoisie libérale et « démocrate » des grandes villes. Typiquement, elle dénonçait dimanche à Henin-Beaumont :

« ici pas de stars, pas de show biz, mais la vraie vie, les vrais gens. Ici ce ne sont pas les bobos en mal d'animation que l'on attire. Les bobos qui iront voire Nicolas à la Concorde après le Brunch, avant de filer en Vélib' à Vincennes pour voir si François à une cravate plus cool que celle de Nicolas. À moins que la séance de yoga n'oblige à écourter ces petites festivités parisiennes. » 

En disant cela elle s'adresse clairement à la France réactionnaire qui a horreur du progrès, elle veut convaincre les personnes de droite qui haïssent les « bobos » pour la raison qu'ils représentent à leurs yeux la modernité contre les traditions. Ici, la « séance de yoga » et le « vélib' » s’opposent aux modes de vie « traditionnels » des « terroirs ».

Il y a évidemment une dimension antisémite qui transparaît fortement dans son discours, cela va de pair : les  bourgeois « démocrates » seraient pour elle en fait une abstraction qui s'oppose à « la vrai vie » et aux « vrais gens ».

Le fond de sa démarche est de convaincre que la droite aurait été corrompue de l'intérieur par des « mondialistes ». Elle expliquait un peu plus tard :

« UMP, PS et leur partis satellites ont transféré à des autorités supra-nationales non élues non légitimes et aussi arrogantes qu'incompétentes l'essentiel de notre souveraineté. 

[...]

Cette folle dérive de l'Union Européenne est l'enfant de François Mitterrand. Au départ la droite, le RPR y a résisté un peu dans les années 80, avant de s'y rallier totalement avec le zèle des nouveaux convertis. »

Dans son discours de Palavas-les-flots, elle mettait encore largement l'accent sur son aspect soi-disant social. Mais déjà elle véhiculait ses valeurs réactionnaires comme « solutions » aux problèmes sociaux (Les élèves doivent se lever en classe devant le professeur, etc.) Aujourd’hui elle va plus à fond dans cette voie. 

Ainsi, le dernier tract de campagne du FN comporte 5 points : une mesure « sociale », la proposition démagogique d'augmentation de 200 euros des salaires qui est en fait une mesure protectionniste, mais les quatre autres mesures se trouvent directement sur le plan des « valeurs » réactionnaires : contre l'immigration, pour le protectionnisme économique, la souveraineté nationale et la tolérance zéro.

Dans la même veine, Marine Le Pen s'est rendue la semaine dernière dans une petite ville de l'Yonne pour y dénoncer la fermeture de la gendarmerie et critiquer au passage la « politique de la ville » envers « les banlieues », prétextant que ce serait soi-disant « toujours les même à qui on accorde la manne de la solidarité nationale ». 

Division des masses populaires, racisme latent et anticommunisme farouche, voici bien là des valeurs réactionnaires du Front National de Marine Le Pen. 

Et selon cette vision fasciste de plus en plus clairement antisémite, les communistes représentent avec les bourgeois cosmopolites des grandes villes l'ennemi « anti-national » par excellence. Pour Marine Le Pen, le Communisme ne représente pas tant un « totalitarisme » anti-bourgeois qu'une vision du monde universaliste porteuse de progrès et de modernité. 

Publié sur notre ancien média: 
Mots clés: 
Rubriques: