21 nov 2014

A propos de la loi sur la transition énergétique de Ségolène Royal

Submitted by Anonyme (non vérifié)

Le 14 octobre 2014 a été adoptée la « loi sur la transition énergétique pour la croissance verte ». Ce projet était porté par Ségolène Royal, l'actuelle ministre Ministre de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie.

Voyons en quoi consiste cette loi mettant en avant les économies d'énergie.

Du point de vue de Ségolène Royal, l'écologie en elle-même n'est pas quelque chose de « vendeur », d'intéressant politiquement. Elle n'a de cesse de répéter que « l'écologie ne doit pas être punitive » ; c'est que le Parti Socialiste ne voudrait surtout pas chambouler les habitudes de la France capitaliste.

La démarche de Ségolène Royal est donc la suivante : prétendre faire changer les choses petit-à-petit, avec comme argument pour les masses, « vous allez faire des économies d'argent ».

Ainsi deux mesures phares sont mises en avant. D'une part la création d'une prime conséquente pour le remplacement d'un véhicule diesel par un véhicule électrique (10 000€), d'autre part un crédit d'impôt pour les travaux de rénovation énergétique des habitations.

Il ne s'agit donc pas de prendre à bras le corps de manière planifiée et généralisée à l'échelle nationale ces problèmes majeurs que sont la pollution automobile et la déperdition thermique des bâtiments. Au contraire, l'idée est de compter sur la mobilisation individuelle, pour ainsi dire petite-bourgeoise, où chaque foyer se verra « incité » car intéressé pour faire des économies, en rénovant « sa » maison, en changeant « sa » voiture.

On voit bien là que le Parti Socialiste et Ségolène Royal ne veulent rien changer du tout et qu'ils ne le prétendent même pas. Dans une logique à mi-chemin entre le néo-socialisme et le libéralisme, il n'est plus ici question que de donner des « impulsions » positives censées amener à un changement « naturel » de l'économie capitaliste française.

Le but de cette loi est en fait d'impulser une modernisation capitaliste en France et de relancer son économie en crise depuis structurelle depuis 2008. La « croissance verte » est l'occasion d'encourager un renouvellement et une modernisation de l'appareil productif, de réorienter certain secteurs et de favoriser l'émergence de nouvelles industries. L'ambition est simple, et annoncée : « devenir une puissance écologique de premier plan ».

Une des orientations est le changement sur le plan de la production de déchets. L'industrie du recyclage doit être boostée afin d'améliorer la rotation du capital. Les déchets sont ainsi valorisés, c'est-à-dire que la plus-value doit être réalisée de manière plus efficace pour le capital.

Ce n'est pas quelque chose de nouveau, par exemple en France l'industrie du recyclage du verre est puissante, c'est la raison pour laquelle il n'y a plus ou presque de consignation des récipients, comme c'est le cas en Allemagne par exemple.

Si les économies d'énergies sont mises en avant, il ne faudrait pas penser pour autant que les monopoles du secteur que sont Total, EDF ou GDF Suez ne sont pas intégrés à cette démarche.

L'énergie est une marchandise particulière puisque ce qui est vendu ce n'est pas seulement un débit (une consommation d’énergie), mais toute une infrastructure permettant ce débit. L'enjeu pour les monopoles est d'opérer des gains de productivité massifs, et de pérenniser la dépendance des masses à leurs marchandises, dans le cadre de la crise généralisée du mode de production capitaliste.

La mise en avant des nouveaux compteurs électriques « Linky » et des compteurs de gaz « gazpar », censés aider à la réduction de la consommation, sont au cœur de cette démarche.

Par ailleurs, les monopoles du secteur sont directement intéressés par la réalisation de nouvelles infrastructures de production d’énergie. D'autant plus qu'il peut s'agir de grosses infrastructures, comme avec l'éolien offshore développé par le groupe Alstom.

Un autre enjeu mis en avant par cette loi, est celui de garantir « l'indépendance énergétique de la France ». Autrement dit, il s'agit de garantir le rapport de force de l'impérialisme français dans le cadre des contradictions inter-impérialistes. Dans le cadre de la raréfaction des énergies fossiles telles que le gaz ou le pétrole, l'impérialisme français cherche à s’extirper de la dépendance d'autres régions du monde.

C'est d'ailleurs une autre raison pour laquelle les monopoles de la production d'énergie ont en partie intérêt aux « économies d'énergies » : il s'agit pour eux d'avoir des quantités relativement moindres à gérer, et ainsi garder la main plus facilement sur la production, moins dépendre des importations extérieures.

Cela n'est cependant qu'un aspect car c'est une contradiction insoluble pour le capital, qui ne pourra que finir par s'effondrer sur lui-même.

La « loi sur la transition énergétique pour la croissance verte » prévoit des moyens importants pour impulser toute cette modernisation capitaliste. En plus des crédits à taux zéro et des « chèques » d'aide qui seront proposés, un fond de 5 milliards d'euros par le biais de la Caisse des Dépôts et Consignations permet de financer cela.

L’État se place également comme un moteur de cette réorientation capitaliste. Cette loi oblige maintenant les collectivités locales à ce qu'un véhicule sur deux remplacés le soit par un modèle dit « propre » et que les nouveaux bâtiments publics soient « à énergie positive ».

Ces mesures peuvent apparaître comme salutaires, allant « dans le bons sens », mais il faut bien voir que ce ne sont que des aménagements à la marge. Cela ne correspond pas aux exigences gigantesques de la biosphère qui nécessitent un bouleversement profond dans le rapport de l'humanité à la matière, et donc à l'énergie.

Comme son nom l'indique, cette loi est essentiellement portée sur l'idée de croissance verte. Il s'agit surtout d'une vaine tentative de sauver le capitalisme en crise, en misant sur un nouveau secteur de croissance de manière opportuniste. Le fait que cette loi soit présentée comme un symbole de la politique « verte » du quinquennat de François Hollande est absolument pathétique.

La France s'imagine pourtant à la pointe, à tel point que Ségolène Royal se croit légitime pour dire à propos de sa loi :

« C’est en étant exemplaires chez nous que nous pourrons peser pour réussir le Sommet mondial que la France accueillera en décembre 2015. »

Encore faudrait-il pour cela commencer par saisir la réalité, en particulier celle de la contradiction/ville campagne. La démarche de Ségolène Royale est justement à mille lieues de cela car elle entend s’appuyer sur la petite propriété individuelle et l'automobile individuelle pour réaliser sa « transition énergétique ».

C'est donc tout à fait logique que sa loi n'aborde même pas un sujet aussi crucial que celui de l'étalement urbain (et notamment des gaz d'échappement) ou même celui de l'abolition du nucléaire, pourtant au cœur de la question énergétique aujourd'hui en France.

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