21 aoû 2013

Du milieu des années 1970 à la fin des années 1980

Submitted by Anonyme (non vérifié)

Au tout début des années 1970, le « maoïsme » est déjà en crise. Il a existé vraiment entre 1969 et 1972 et sa démarche est déjà épuisée au bout de ces quelques années. La constellation maoïste est alors constitué de militants très radicaux, mais sur une base spontanéiste au nom de la tentative de générer des structures autonomes populaires.

Vive la révolution

La Gauche Prolétarienne n'a pas été la seule à être active : une éphémère organisation appelée Vive la révolution (VLR) eut un succès relatif également.

VLR était, comme la Gauche Prolétarienne, composé d'ex-UJC(ml) et d'activistes du mouvement du 22 mars, et aura également tenu peu de temps – de juillet 1969 à avril 1971.

VLR eut surtout le temps de produire une quinzaine de numéros du journal « Ce que nous voulons : TOUT ! », exprimant un mélange de critique du capitalisme préfigurant le mouvement autonome, d'une démarche pavant la voie au féminisme radical et aux revendications homosexuelles, et d'idéologies post-modernes délirantes (culte des drogues, du spontanéisme, populisme version « loubarde » d'un « Front de Libération des Jeunes », etc.).

Rien ne sortit de concret de VLR, à part une culture diffuse comme quoi la scène revendicative avait des thèmes bien plus vastes aux Etats-Unis.

Tentative de relance de la Cause du peuple

La dissolution de la Gauche Prolétarienne par sa direction provoqua une véritable dislocation de celle-ci. On assista ainsi, dans les années qui suivirent, à une vague de suicides. Les membres de la direction, quant à eux, se reconvertirent chacun à sa manière.

Ainsi, Serge July et la fraction ayant sorti Libération connurent une carrière dans la presse ; Alain Geismar retourna dans l'éducation nationale, puis fut membre de cabinet ministériel. Quant au dirigeant Benny Lévy, il devint le secrétaire de Sarte et se plongea dans le philosophe Lévinas, basculant dans la religion juive de manière orthodoxe.

De manière plus frappante, les intellectuels gravitant de manière très proche de la Gauche Prolétarienne, voire actifs dans sa presse, fondent le mouvement des « nouveaux philosophes », d'un anti-communisme viscéral et ouvertement pro-américain (André Glucksman, Christian Jambet, Bernard Henry-Lévy, etc.).

Une structure tenta cependant de refuser la dissolution, et organise en novembre 1972 un congrès des Comités de Lutte d'Ateliers, avec 72 délégués, donnant naissance à l'Union Nationale des Comités de Lutte d'Ateliers (UNCLA).

Ainsi est maintenu dès 1972 la structure de la Cause du Peuple, qui a un certain succès et prend comme nom Organisation Communiste Prolétarienne (OCP), parvenant à republier le journal en novembre 1974.

Cependant, il est simplement considéré que la direction a capitulé et qu'il faut prolonger le mouvement pour fonder le parti de la résistance. Il est certes considéré que les repères idéologiques ont été trop mis de côté et que cela a permis la dilution dans la liquidation au nom d'un mouvement populaire à venir.

Toutefois, l'idéologie est toujours considérée comme secondaire, qu'elle peut être un danger pour la pratique. Telle est également la ligne de l'Union des Communistes de France (marxiste-léniniste).

L'UCF (ml) prend la tête de l'activisme pour un temps

Fondée et dirigé par Alain Badiou, qui mène parallèlement une carrière de philosophe en revenant à Platon et aux mathématiques, l'UCF (ml) a alors une base activiste bien plus large, ayant généré des noyaux communistes avec un front : les Comités Populaires Anti-Capitalistes (CPAC).

L'activité commencée en 1969 se développe particulièrement à partir der 1972, lorsque la Gauche Prolétarienne cède la place. A partir de 1973 est publiée Le Marxiste-Léniniste, revue devenant mensuel en 1977.

L'UCF (ml) refusait le « gauchisme » de la Gauche Prolétarienne et menait une activité très organisée, avec une base idéologique très claire : le maoïsme comme dépassement du léninisme ; son document pour ses 10 ans témoigne d'une vision très stratégique et très organisée.

Ainsi, la position était même que la Gauche Prolétarienne, mais les positions idéologiques étaient affirmées très précisément dans nombre de documents, et l'organisation était très encadrée, voire totalement sectaire. A cela s'ajoute une base fondamentalement intellectuelle et petite-bourgeoise, propice à une continuité « militante » traditionnelle.

L'organisation bascula dans une sorte de ligne de masse millénariste, se refermant totalement sur elle-même et travaillant principalement en direction des sans papiers. En 1985, elle se transforma en « Organisation politique », pratiquant ouvertement une ligne de masse post-maoïste, pour disparaître à la fin des années 2000, au moment où Badiou devint une figure médiatique de la « philosophie ».

Échec de la Nouvelle Cause du peuple

Au milieu des années 1970, la Nouvelle Cause du peuple – Organisation Communiste Prolétarienne ne parvient donc pas à se développer, bloqué par sa position anti-idéologique, ce que compense alors l'UCF(ml) par un encadrement sectaire.

Sa tentative de recoller les morceaux de la Gauche Prolétarienne lors d'une grande réunion en février 1975 est un échec.

Est alors tentée une unification avec d'autres restes des organisations marxistes-léninistes et maoïstes. C'est cependant impossible devant la démarche purement immédiatiste de l'OCP, qui scissionne alors en 1976: la grande majorité bascule dans le post-maoïsme ouvert et rejoint le mouvement autonome qui naît, en tant que courant appelé « Autonomie Prolétaire ».

La minorité prend le nom d'Organisation Communiste Prolétarienne (marxiste-léniniste), liquide le maoïsme et passe avec armes et bagages dans le camp albanais, participant en 1979 à la fondation de l'organisation officiellement liée à l'Albanie d'Enver Hoxha : le Parti Communiste des Ouvriers de France.

Le mouvement autonome et Action Directe

Le mouvement autonome qui se lance principalement en 1977 et surtout à Paris, consiste en des jeunes ayant une démarche associant squats, braquages, affrontements violents dans les manifestations, contre les services d'ordre de la CGT et de la LCR ainsi que la police.

Il sera éphémère et sombrera extrêmement vite dans la criminalité et les drogues dures, mais aura cependant une frange organisée issue justement de la culture de la Gauche Prolétarienne.

De fait, des pans entiers de la Nouvelle Résistance Populaire ont maintenu clandestinement leur existence plusieurs années après la dissolution de la Gauche Prolétarienne, conservant des planques, des armes, des faux-papiers, etc.

Trois organisations armées apparaissent dans ce sillage (voir la « chronologie d'Action Directe » pour les actions menées par ces organisations) :

- les Brigades Internationales, qui commettent plusieurs exécutions et disposent à un moment même d'un groupe proche dans la sphère légale (« Vaincre et vivre ») ;

- proche de cette première organisation, on trouve les les Noyaux Armés pour l'Autonomie Populaire (NAPAP), qui commettent plusieurs attentats et exécutent le vigile de Renault ayant tué Pierre Overney ;

- enfin, Action Directe, qui mélange ex-activistes de la Gauche Prolétarienne, militants antifascistes des années 1960 et autonomes ; initialement mouvement armé lié au mouvement autonome et des squats, il devient totalement autonome à partir de 1981 et commet de très nombreux attentats.

Post-maoïsme

Le dénominateur commun de toutes ces structures est leur post-maoïsme : Mao Zedong remettrait en cause le schéma léniniste, et finalement même le maoïsme est dissous dans deux principes : prolétarisation et militarisation.

Ceux qui refusent cette démarche et veulent en rester à la culture de l'établissement rejoignent soit le Parti Communiste des Ouvriers de France lié à l'Albanie, soit l'Organisation Communiste Marxiste-léniniste Voie Prolétarienne, qui pratique un post-maoïsme se revendiquant encore de Mao Zedong justement comme dépassement du léninisme (Staline est rejeté, il est appelé à voter Mitterrand en 1981 puis systématiquement pour les trotskystes de Lutte Ouvrière, etc.).

A la fin des années 1970, il n'y a donc plus d'organisation assumant le maoïsme comme synthèse idéologique, et de fait à partir de 1979 il n'y a plus non plus de mouvement autonome organisé.

On parle alors des « totos » pour désigner les autonomes éparpillés, dont le dernier avatar lié historiquement en partie à la Gauche Prolétarienne est le groupe « Prolétaires pour le communisme », issu en partie de la Gauche Prolétarienne et actif à Paris entre 1986 et 1991, très présent dans la scène des squats et fondant notamment un Comité des Mal Logés extrêmement actif.

Le maoïsme est cependant inexistant jusqu'au début des années 1990, à part des individus éparpillés et des structures d'origine étrangère, en l'occurrence turque et péruvienne.