5 oct 2016

Alstom, «made in France» et social-chauvinisme

Submitted by Anonyme (non vérifié)

Les révolutionnaires doivent vraiment attirer l'attention sur l'intense propagande pour le « made in France » qui existe depuis un certain temps déjà bien sûr, mais qui prend des proportions toujours plus significatives.

La cause de la révolution est d'un côté mondiale, mais de l'autre côté elle se développe dans les conditions concrètes d'un pays. De par la nature de l'économie mondiale, les aspects dominants sont la crise générale du capitalisme et l'existence d'une concurrence mondiale entre capitalistes.

Cela laisse un espace pour la démagogie de la bourgeoisie qui utilise le « patriotisme économique », qui n'est rien d'autre qu'une forme de nationalisme, pour galvaniser l'entente entre les classes.

Le prolétariat tente d'échapper à la crise en acceptant des conditions de vie plus dures, en soutenant les initiatives bourgeoises nationales dont il espère profiter ensuite. Cette tendance a été très forte depuis les années 1960, mais elle était portée idéologiquement principalement par l'aristocratie ouvrière, au moyen de la CGT du PCF devenu révisionniste.

Or, aujourd'hui, cet esprit social-chauvin est très largement diffusé dans les masses. Il découle directement du « Non » au référendum sur la Constitution européenne de 2005, qui a ouvert la voie à cette manière de voir les choses et de s'opposer de manière « nationale » à la « mondialisation ».

Il est significatif que la gauche ait à l'époque soutenu de manière unilatérale le « Non » au référendum : cela révèle la nature sociale de sa base politique et de ses dirigeants. Il est évident qu'on a ici des gens acceptant le capitalisme et se considérant sur le même bateau que la bourgeoisie.

En ce sens, la décision de l’État d'acheter 15 TGV à Alstom, pour les faire fonctionner sur des lignes où les TGV devront rouler comme des trains normaux, relève totalement du populisme social-chauvinisme. Il s'agit simplement de montrer à l'opinion publique qu'une option social-chauvine est possible, préservant des emplois.

En l'occurrence, il s'agit de 400 emplois à Belfort, menacés de relocalisation dans le Bas-Rhin. Il est frappant de voir comment ces salariés ont vu leur situation confisquer par le discours syndical visant à participer aux décisions capitalistes, à appeler l’État à la rescousse.

Le fait que l'Etat détienne 20% des droits de vote d'Alstom a été ici déterminant. L'existence de ces droits de vote vient, en effet, d'un accord entre Arnaud Montebourg et Bouygues, qui est le second actionnaire, derrière l’État.

Et on sait qu'Arnaud Montebourg vient d'accepter de participer à la primaire organseé par le Parti Socialiste. Il y a ici un timing absolument parfait.

Et c'est un timing qu'il faut dénoncer, en rappelant que, à la fin du mois de juin, Alstom avait 29,7 milliards d'euros de commandes, représentant plus de quatre années de chiffre d'affaires. Ce n'était donc pas à l’État de payer, mais à Alstom.

Encore eut-il fallu pour cela que la bourgeoisie soit reconnue comme existante et comme étant le principal ennemi du prolétariat.

Seulement, comme on le sait, syndicalistes et extrême-gauche ne savent parler que des patrons. Ils raisonnent en termes de mouvements sociaux, en assumant plus ou moins ouvertement qu'il s'agit là d'une négation de la lutte des classes.

Comme si l'on pouvait éviter de parler de la bourgeoisie pour parler d'Alstom.

Car le directeur financier historique chez Bouygues a été Olivier Poupart-Lafarge. Celui-ci a négocié l'entrée de Bouygues au capital d'Alstom… avec son propre fils Henri Poupart-Lafarge, directeur financier d'Alstom.

Voilà qui en dit long sur la réalité des monopoles.

La trajectoire de Henri Poupart-Lafarge est d'ailleurs exemplaire : Polytechnique, Ponts et Chaussées, MIT américain, Banque mondiale, direction du Trésor, cadre puis dirigeant d'Alstom.

Voilà nos ennemis. Et la lutte de classes ne consiste pas à aider leurs plans, leurs projets, mais à leur arracher leurs richesses et leur pouvoir.

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