Le structuralisme - 1e partie : une émergence spécifique à une époque
Submitted by Anonyme (non vérifié)La France de la fin du 19e siècle et du début du 20e siècle a connu plusieurs approches majeures correspondant à l'esprit républicain : la science comme expérimentation avec le positivisme d'Auguste Comte, le roman expérimental du naturalisme d’Émile Zola, les expériences poétiques du Parnasse, la lecture expérimentale de l'histoire par Hippolyte Taine, la philosophie comme expérience intérieure temporelle avec Henri Bergson, l'expérience momentanée en peinture avec l'impressionnisme.
Cela reflète ici parfaitement le besoin de la bourgeoisie de se lier à la réalité d'un côté, avec l'expérience, mais d'en même temps faire prévaloir le subjectivisme et le refus d'une lecture de la réalité comme système.
Le temps l'emporte toujours davantage sur l'espace ; il commence à primer dans la compréhension de la réalité. Ce qu'on appelle structuralisme est la théorisation de cette lecture temporelle, une théorisation strictement parallèle à l'émergence du « nouveau roman », de l'art contemporain, du théâtre de l'absurde, de l'ultra-libéralisme comme vecteur des avancées sociétales.
Le processus de genèse du structuralisme est tout à fait similaire à celui de la fin du 19e siècle. C'était alors toute une période de transition, marquant le passage d'une bourgeoisie déjà sortie de son rôle révolutionnaire anti-féodal, mais pas encore établi en tant que classe dominante ayant développée son identité propre, son idéologie en propre, purifiée au maximum des éléments des stades précédents.
Cela souligne un aspect d'importance : celui de la fonction des couches intellectuelles dans la maturation et la mise en place des dispositifs idéologiques.
On ne sera donc nullement étonné qu'avec un capitalisme relancé dans un nouveau cycle après 1945 et l'établissement d'une nouvelle couche d'intellectuels s'appuyant sur des universités en pleine expansion, on ait un retour en force de ces approches modernisatrices, de manière évidemment adaptée aux conditions nouvelles.
C'est là le terrain d'émergence du structuralisme.
Ce dernier apparaît alors comme levier idéologique pour contourner la question de l'analyse de la réalité comme ensemble, comme totalité. De la même manière que la bourgeoisie profite des puissances de l'informatique, afin d'utiliser les statistiques comme moyen de contourner une analyse d'un phénomène dans sa substance, se focalisant sur les résultats au moyen de calculs sophistiqués, elle a cherché à interpréter la réalité, mais petits bouts par petits bouts, dans un souci fonctionnel.
Le structuralisme est ainsi, avant tout, un fonctionnalisme ; il est un outil intellectuel ayant une portée pratique, dans le sens d'une gestion d'une partie de la réalité. C'est un pseudo-matérialisme dans sa nature même.
Quelle est son approche ?
Ce qu'on appelle le structuralisme consiste en une méthode existant dans plusieurs domaine de pensée et visant à trouver une « structure » qui serait déterminante pour tel ou tel phénomène.
De telles structures n'ont ni contours définis, ni nature particulière ; cela peut être indifféremment un échange, la main gauche, la parenté, la croyance en le retour d'un prophète particulier, une arme particulière, l’État, le capital, les héritiers, la mer Méditerranée, un lieu particulier, un habitude, une démarche concrète, un rapport concret, une forme, un symbole, etc.
Le rôle du « scientifique » serait de constater de telles structures, ce que le commun des mortels ne pourraitt évidemment pas aux yeux des universitaires, et de les évaluer, de les contextualiser, ce qui attribue aux intellectuels un caractère central unilatéral.
Il s'agit ici de deux aspects essentiels de la méthode dite structuraliste. Tout d'abord, le structuralisme, dans ses exposés, ne cesse de souligner le caractère masqué de la structure, l'impossibilité qu'il y a lieu pour une personne simple, hors du circuit universitaire, à ne serait-ce qu'à l'imaginer, sans parler de la concevoir, la comprendre, etc.
Ensuite, le structuralisme est le vecteur du discours de la primauté de l'évaluateur : l'intellectuel, le journaliste, le philosophe, le sociologue, etc. C'est le culte du spécialiste qui interprète. C'est là son aspect fonctionnel.