Le nouveau chasse l'ancien : la pratique contre les traditions
Submitted by Anonyme (non vérifié)e nouveau chasse l'ancien. Tel est le point de vue marxiste qui correspond à la transformation de la matière éternelle. En effet, la loi de l'univers est que la matière ne cesse jamais de se transformer.
Il n'est donc pas possible d'arrêter la roue de l'histoire, d'essayer de la faire tourner en arrière et il est absurde de « raviver » les traditions ancestrales. Une pensée fondée dans le respect des traditions est inévitablement marquée par le romantisme et l'idéalisme, à l'opposé d'une démarche matérialiste conséquente.
D'ailleurs, au sens strict, il n'existe pas de traditions mais des pratiques de toutes sortes. Ces pratiques sont elles-mêmes des production de la matière en mouvement et du fait de ce mouvement tendent progressivement à se raréfier puis à disparaître complètement.
Mais quand une pratique a quasiment disparu, du fait du mouvement de la matière, il se trouve tout un tas de réactionnaires pour exalter les traditions et l'image folklorique d'une France qui tend à disparaître, rongée par une « modernité », perçue par les réactionnaires comme forcément menaçante.
La personne réactionnaire ne s'attache pas à savoir si une pratique existe ou non objectivement, elle porte mécaniquement un jugement positif sur toute pratique « d'autrefois ». Cette vision ne s'inscrit donc pas dans la constatation objective et scientifique de la réalité mais une aspiration romantique au « retour en arrière » pour retrouver un passé idéalisé.
« Idéalisé » car les traditions ne sont appelées comme telles qu'a posteriori, avec un regard moderne jeté sur le passé. A leur époque, les traditions ne sont pas des traditions mais des pratiques du quotidien. Les « traditions » se conçoivent pas elles-mêmes comme « traditions » à leur époque et deviennent traditions quand elles représentent une forme ancienne.
'attachement idéaliste aux traditions est particulièrement vrai en France car, comme l'a expliqué Karl Marx dans Le 18 brumaire de Louis-Napoléon Bonaparte, la France est le pays de la petite propriété parcellaire. En France, la petite bourgeoisie a historiquement un poids idéologique très fort que l'on ressent fortement dans le côté réfractaire à la modernité qui caractérise notre pays.
En France, le journal de 13 heures de TF1 qui décline chaque jour des traditions du « terroir » fait même figure de véritable institution. Là encore, une pratique en perdition est valorisée précisément parce qu'elle est en voie de disparition, ce qui lui donnerait un « charme » surannée et susciterait la « nostalgie ».
La méfiance envers la modernité et l'exaltation du passé sont des attitudes typiques de la petite bourgeoisie qui, surtout en période de crise, craint sa prolétarisation et essaie à tout prix de sauver sa peau. Pour ce faire, la petite bourgeoisie désire s'ancrer dans un passé où son existence n'était pas menacée.
Le fascisme est ainsi un mouvement largement portée par la petite bourgeoisie que la bourgeoisie impérialiste entend remorquer en soulignant justement les valeurs traditionnelles comme l'attachement à la Nation, la place « singulière » de la France dans le monde (qui se veut résistante face à l'impérialisme US), les traditions, le culte du « terroir » et de l'artisanat. Quant au prolétariat le moins avancé et le plus paniqué par la crise (qui réside souvent dans le périurbain lointain), il tend aussi à rejoindre le mouvement.
L'affiche des « jeunes avec Marine » montre, dans sa partie droite, ainsi un petit village paisible, avec sa place de marché, sa verte vallée et son clocher au loin. Cette France d'antan est sous la menace, à gauche de l'affiche, de la France urbanisée des cités où brûlent des voitures.
ais cette imagerie est justement le produit typique des habitants de zones périurbaines qui fuient la ville et fantasment sur une vie à la campagne pour se retrouver finalement dans des faubourgs montés de toute pièce qui empiète sur la nature.
Les fascistes n'entendent pas résoudre la contradiction entre la ville et les campagnes mais à exalter le folklore et les traditions ce qui revient dialectiquement à détruire la nature et faire triompher la ville.
En effet, l'exaltation du folklore et des traditions a soutenu l'étalement des villes dans des espaces périurbains construits à la va-vite. Ces zones de périurbain, qui sont de faux village mais des ersatz de banlieues pavillonnaires, témoignent du recul de la nature face à une ville qui s'étale, même sous une forme désurbanisée.
En outre, le culte des traditions, notamment dans le domaine de l'alimentation, conduit très précisément à surproduire et, pour ce faire, à moderniser les abattoirs au mépris de la vie d'êtres vivants. Cette industrialisation massive de l'agro-business, qui se cache derrière la défense du terroir, est en grande partie responsable de la destruction des paysages naturel et de la pollution des cours d'eau surchargés en nitrates. Et une tradition barbare comme le foie gras est incontestablement une trace du monde ancien et ne pourra perdurer dans le socialisme. Tout cela se déroule dans le cadre d'une guerre contre la nature qui est loin d'être apaisé.
La vie paisible à laquelle aspirent les masses populaires n'est justement possible qu'en menant la révolution socialiste qui fera reculer les villes pour laisser respirer la nature. Les marxistes ne sont pas sujets à la nostalgie ou à la mélancolie, ne se complaisent pas dans la contemplation idéaliste des traditions, la pratique est le seul critère.
Voilà pourquoi Voie Lactée publie une liste des cosmétiques non testés sur les animaux, boycotte l'huile de palme, met à disposition des recettes de cuisine, encourage l'activité sportive, tout cela étant autant de pratiques au quotidien, le seul critère qui vaille !
C'est dans la pratique qu'il faut que l'homme prouve la vérité, c'est-à-dire la réalité, et la puissance de sa pensée, dans ce monde et pour notre temps.
Toute vie sociale est essentiellement pratique. Tous les mystères qui détournent la théorie vers le mysticisme trouvent leur solution rationnelle dans la pratique humaine et dans la compréhension de cette pratique.
(Karl Marx, Friedrich Engels, Thèses sur Feuerbach)