1 aoû 2014

Jean Jaurès, ennemi historique de la social-démocratie authentique

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Le centenaire de l'assassinat de Jean Jaurès rappelle un événement historique marqué par de très nombreuses contradictions, permettant à tout le monde de se revendiquer de cette figure socialiste, et cela de l'extrême-gauche à l'extrême-droite. Il y a lieu de souligner l'importance de ce phénomène, fruit de l'histoire de notre pays.

Pourquoi Nicolas Sarkozy, le Front National, François Hollande, le Parti « Communiste » français... peuvent-ils se prétendre représenter l'esprit de Jean Jaurès ?

Le coeur de la contradiction se révèle dans un fait apparemment absurde : l'assassinat de Jean Jaurès aurait dû provoquer une activité révolutionnaire intense, des indignations et le refus de la guerre impérialiste, et au lieu de cela il a permis le soulèvement général en faveur de l'Union sacrée.

L'enterrement de Jean Jaurès a d'ailleurs directement été utilisé en faveur de la première guerre mondiale impérialiste. Léon Jouhaux, anarchiste secrétaire général de la C.G.T. et anticommuniste forcené, conclura son discours aux obsèques en expliquant que :

« Jean Jaurès a été notre réconfort dans notre action passionnée pour la paix. Ce n'est pas sa faute, ni la nôtre, si la paix n'a pas triomphé. Avant d'aller vers le grand massacre, au nom des travailleurs qui sont partis, au nom de ceux qui vont partir, dont je suis, je crie devant ce cercueil toute notre haine de l'impérialisme et du militarisme sauvage qui déchaînent l'horrible crime.

Cette guerre, nous ne l'avons pas voulue, ceux qui l'ont déchaînée, despotes aux visées sanguinaires, aux rêves d'hégémonie criminelle, devront en payer le châtiment.

Acculés à la lutte, nous nous levons pour repousser l'envahisseur, pour sauvegarder le patrimoine de la civilisation et d'idéologie généreuse que nous a légué l'histoire. Nous ne voulons pas que sombrent les quelques libertés si péniblement arrachées aux forces mauvaises. Notre volonté fut toujours d'agrandir les droits populaires, d'élargir le champ des libertés. C'est en harmonie avec cette volonté que nous répondons " présent " à l'ordre de mobilisation. »

La raison de tout cela tient à l'éclectisme profond de Jean Jaurès, à son républicanisme bourgeois profondément marqué par l'anti-marxisme, cela étant associé aux très profondes faiblesses historiques du mouvement ouvrier sur le plan idéologique et culturel. Jean Jaurès était le chef de file d'une « social-démocratie » ne consistant qu'en du réformisme socialisant ayant provoqué en réaction l'émergence d'un très fort « syndicalisme révolutionnaire », variante économiste de l'ultra-gauchisme anarchiste.

Jean Jaurès a été le maître d'oeuvre du rejet du matérialisme dialectique en France. Son idéologie était totalement éclectique, mélangeant réformisme, esprit social chrétien, soutien complet aux institutions, et bien entendu antisémitisme, comme dynamique anticapitaliste romantique.

Jean Jaurès est en quelque sorte un Eugen Dühring français ; alors qu'en Allemagne, en Autriche, en Bohême, la social-démocratie se forge dans le marxisme et dans le rejet des éclectiques à la Dühring, en France Jean Jaurès est l'expression du refus du matérialisme dialectique.

Jean Jaurès a une vision du monde qui correspond à celle de Eugen Dühring : il rejette la dialectique de la nature, il a une conception idéaliste du capitalisme, d'où l'antisémitisme suintant nécessairement. Ainsi, pour Jean Jaurès, la figure du « juif » comme expression la plus capitaliste est présente de manière inévitable :

« Il [le libre-échange] sacrifie les producteurs aux échangeurs, aux transporteurs, aux manieurs d’argent, à la banque cosmopolite. Il livre aux frelons juifs le miel des abeilles françaises »
(Programme économique, La Dépêche, 1er septembre 1889)

« Nous savons bien que la race juive, concentrée, passionnée, subtile, toujours dévorée par une sorte de fièvre du gain quand ce n'est pas par la force du prophétisme, nous savons bien qu'elle manie avec une particulière habileté le mécanisme capitaliste, mécanisme de rapine, de mensonge, de corset, d'extorsion. »
(Discours du Tivoli Vaux-Hall, 7 juin 1898)

C'est avec l'affaire Dreyfus que Jean Jaurès abandonnera son antisémitisme, tout simplement également parce qu'il était devenu un réformiste ouvert et qu'il n'avait plus besoin de l'anti-capitalisme romantique. De toutes manières, les socialistes français avaient réussi: le matérialisme dialectique n'avait pas pénétré en France.

Jean Jaurès devint alors une figure idéologique du républicanisme. D'un côté, en 1919, l'assassin de Jean Jaurès, Raoul Villain, fut acquitté et la veuve de Jean Jaurès dut payer le procès. De l'autre, en 1924 la dépouille de Jean Jaurès est amené au Panthéon, en grande pompe, alors que le Parti Communiste français, exclu de la cérémonie, manifestait de son côté en protestant contre une récupération en fait logique.

Jean Jaurès n'avait pas de contenu idéologique, et il ne représente rien à part le refus du matérialisme dialectique, d'ailleurs en 2011 le « Café du croissant » à Paris, où il avait été assassiné, s'est permis de changer de nom, devenant la « Taverne du croissant ».

Pour qui veut lutter pour le socialisme, il n'y a rien à attendre de « ce M. Jean Jaurès, ce professeur doctrinaire, mais ignorant, surtout en économie politique, talent essentiellement superficiel, abuse de sa faconde pour se forcer dans la première place et poser comme le porte-voix du socialisme qu¹il ne comprend même pas. » (Friedrich Engels, Lettre à Lafargue, 6 mars 1894)

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Le centenaire de l'assassinat de Jean Jaurès rappelle un événement historique marqué par de très nombreuses contradictions, permettant à tout le monde de se revendiquer de cette figure socialiste...