7 oct 2018

La peinture naturaliste belge - 10e partie : Léon Frédéric et le réalisme de l’espoir

Submitted by Anonyme (non vérifié)

La tendance à l’impressionnisme en lieu et place du naturalisme se combine historiquement avec une tendance au symbolisme. Le parcours du peintre Léon Frédéric (1856-1940) est ici tout à fait significatif.

Si c’est un peintre symboliste belge majeur, il part initialement du naturalisme, dans une optique sociale allant jusqu’à l’engagement, voire une vraie perspective réaliste. C’est indéniablement un artiste incontournable de la Belgique.

Voici Les âges de l’ouvrier, datant de 1895-1897, formant un triptyque rappelant les œuvres religieuses flamandes ayant très apprécié cette forme. On remarquera, dans le tableau du milieu, un cortège funéraire s’éloignant à l’arrière-plan, le drapeau rouge présent témoignant qu’il s’agit d’un rassemblement ouvrier en l’honneur d’une victime de la répression ayant frappé le mouvement pour le suffrage universel en 1893. Il y a également une petite fille habillée en rouge au premier plan.

On notera aussi dans le tableau de droite qu’est présent le palais de justice surplombant le quartier populaire bruxellois des Marolles, on peut aussi voir la cathédrale Saints-Michel-et-Gudule.

Dans celui de gauche, il y a d’ailleurs la prison de Saint-Gilles.

Le tableau central montre également l’hôpital Saint-Pierre – un lieu de passage pour les ouvriers – et la tour de l’Hôtel de Ville, symbole du pouvoir municipal, haut lieu de lutte, et symbole historique de la ville, de la bourgeoisie, par rapport à l’aristocratie.

Voici le tableau Le peuple, un jour, verra le soleil, de 1890-1891, ainsi que L’âge d’or, tous deux dans le même esprit d’une lecture sociale pleine d’espoir.

Le repas des funérailles, de 1886, est de facture plus classiquement naturaliste. On retrouve l’approche sobre d’un côté, mais également misérabiliste de l’autre, avec une touche de romantisme national de par la visibilité de la vie quotidienne.

On a la même approche pour ’S zondags vóór de mis (Le dimanche avant la messe) ou encore Boerenmaaltijd (Le repas des paysans).

Léon Frédéric a également fait une série très intéressante de portraits, qui tendant à une certaine représentation synthétique, avec Les Âges du paysan.

On a ici Les vieillards, Les époux, Les promis, Les fillettes, Les garçons.

Un autre triptyque est véritablement intéressant : Les marchands de craie (Volet gauche : Le matin. Centre : Midi. Volet droit : Le soir).

Voici également La femme à loques (les ramasseuses d’escarbilles), Repas de Noël à l’hospice, L’enterrement d’un paysan, Le paysan mort, Le retour de la procession, Rhododendron en fleur, Les trois sœurs.

Le prolongement de cette approche marquée par le misérabilisme finit par aboutir tout droit à l’idéalisme mystique. Léon Frédéric rejoignit le Salon d’art idéaliste, l’équivalent belge du mouvement symboliste Rose Croix de Péladan en France.

Il y a en même temps une sensibilité sociale, en même temps un esprit d’engagement incapable de saisir la réalité et basculant dans l’espoir religieux.

Le triptyque Le ruisseau (Volet gauche : Le glacier - le torrent. Centre : Le ruisseau. Volet droit : L’eau - l’eau dormante), dédié à Beethoven, est un bon exemple de cela.

Que dire également du triptyque Tout meurt mais connaîtra la résurrection par l’amour de Dieu ?

Léon Frédéric, qui venait d’une famille aisée, a connu un succès certain. Bruxelles lui commanda une grande fresque, Le départ des conscrits, pour la salle des milices de l’Hôtel de ville. Il obtint également une médaille d’or à l’Exposition universelle de 1889, ainsi qu’à celle de 1898.