L’épisode de pollution atmosphérique dont nous avons déjà parlé continue et s’amplifie en Vallée de l’Arve en Haute-Savoie.

Depuis plus d’un mois le niveau d’alerte est élevé dans cette vallée menant au Mont-Blanc. Une aggravation a même été constatée ce week-end de réveillon pour la nouvelle année. Lundi 3 janvier, on pouvait encore constater que Passy, au milieu de la vallée, était la ville la plus polluée de France avec un relevé de particules fines PM 2,5 à 179, ce qui est gigantesque. Il s'agit donc d'une catastrophe sanitaire de grande ampleur, avec des conséquences immenses pour la santé des 155 000 habitants, surtout les enfants. Mais elle n’est pas prise au sérieux par les autorités qui ne font pour ainsi dire rien.

Cela n’a pourtant pas empêché Pierre Lambert, le Préfet de Haute-Savoie, de figurer dans la liste des promus du 1er janvier 2017 dans l’ordre de la Légion d’Honneur. Ce Préfet s’était illustré par son mépris des habitants de la vallée en décembre à propos du pic de pollution, comme nous l’avions relevé.

Dans un autre genre, mais tout aussi méprisant, il y a eu la semaine dernières les propos du maire de Saint-Gervais Jean-Marc Peillex dans Libération :

«C’est de la désinformation, c’est faux de dire que toutes les communes de l’Arve sont touchées. Saint-Gervais n’est quasiment pas concerné par la pollution, contrairement à Passy».

Le nuage de pollution ne s’arrête pourtant pas à la frontière de sa commune, attenante à Passy, bien qu'elle soit, il est vrai, un peu plus en altitude.

Mais c'est que selon lui :

« Il n’y a pas de pic dans la vallée de l’Arve, il y en a partout en France, mais tout le monde ne se trouve pas au pied du mont Blanc, alors on en parle moins ».

Seulement cela est absolument faux, le pic de pollution de la vallée de l’Arve est tout à fait exceptionnel de part sa durée, d’autant plus que les conditions météorologiques ne semblent pas laisser espérer une amélioration de la situation d’ici les prochaines semaines. Cela devrait déjà faire la Une des journaux en France depuis plusieurs semaines, mais ce n'est pas le cas.

Cet épisode n’est de toute façon pas un phénomène isolé mais l’expression exacerbée d’une pollution atmosphérique générale toute l’année en vallée de l’Arve, mais aussi dans la quasi totalité des zones urbaines. C’est ainsi qu’une ville comme Nantes a pu connaître en cette fin d’année 2016 un épisode terrifiant de « neige urbaine », ou neige artificielle, directement lié à la pollution aux particules fines, alors même que la métropole Nantaise est l’une des moins polluée de France par rapport à sa taille, de par sa situation géographique exposée favorablement aux vents d’ouest.

Depuis plusieurs semaines déjà, le pic de pollution en vallée de l’Arve (qui n’est d’ailleurs plus véritablement un « pic » tellement il dure) aurait dû justifier des mesures d’urgence, drastiques et à effet immédiat.

Le chauffage au bois est, d’après les organismes locaux de surveillance de la qualité de l’air, la principale source de pollution. Cela n’est pas une fatalité, il est tout à fait possible d’agir rapidement.

La préfecture devrait alors dans un premier temps acheter et fournir des filtres pour les conduits, avec obligation de les installer immédiatement pour les particuliers, avec un prix dégressif suivant le revenu afin de soutenir les masses les plus pauvres.

Dans le cadre du PPA (Plan de Protection de l'Atmosphère), l’État subventionne à hauteur de 1 000€ la modernisation des installations de chauffage les plus anciennes et les plus polluantes dans la région. Cela n’est pas suffisant car ces travaux peuvent coûter plusieurs milliers d’euros, voir dépasser les 10 000€ dans certains cas. Là aussi il faut une mesure d’obligation de modernisation immédiate des installations, avec l’appui de l’État en fonction des revenus, etc.

Il faut également un recensement précis des installations les plus polluantes. D’après un membre associatif local s'adressant à la presse, il y aurait 18 000 foyers concernés dans la vallée. Cela ne représente pas une charge insurmontable, un État véritablement au service des masses aurait déjà pu depuis longtemps prendre les mesures adéquates. Les moyens de production, les ressources, la force de travail pour cela, existent.

Par ailleurs, il a été constaté par les organismes de surveillance de la qualité de l’air que l’augmentation récente de la concentration en polluants ayant pour origine le chauffage domestique est liée à l’arrivée de personnes dans des résidences secondaires du fait des fêtes de fin d’année. La question de l’accès aux résidences secondaires doit alors être posée.

Les masses de la vallée de l’Arve, victimes de la pollution toute l’année, doivent pouvoir choisir si elles accordent ou non l’accès aux résidences secondaires lors d’un tel épisode de pollution, d’autant plus que les résidences secondaires sont souvent des chalets anciens, donc mal isolés et avec des foyers de cheminée ouverts ( pour faire plus « authentique ») qui sont extrêmement polluants.

La transport est considéré comme étant la seconde source pollution. Là aussi il faut des mesures de régulation importantes et une réduction drastique du trafic, particulièrement en ce qui concerne le fret international transitant via le tunnel du Mont-Blanc. Il est inconcevable que ces camions continuent à rouler et donc polluer alors que les enfants des écoles et des clubs de sports de la vallée de l'Arve sont privés de récréation et d'activité physique tellement l'air est dangereux pour leur santé.

À plus long terme, il doit être mis en place un plan national pour le ferroutage et le fret ferroviaire, avec localement un réseau de transport collectif efficace pour les masses, en complément des trains et tramways existants mais concernant surtout le tourisme et l'accès en altitude.

En ce qui concerne le tourisme justement, étant donné qu'il s'agit là d'une source supplémentaire de pollution atmosphérique, ainsi que de destruction des espaces naturels en montagne et de perturbations des animaux, un plan économique structurel industriel, agricole et culturel est indispensable, rapidement, afin de contrecarrer les politiques ayant mise le tissus économique sous dépendance du tourisme.

Des mesures anti-pollution de grande ampleur doivent également être prises en ce qui concerne l'industrie et le traitement des déchets.

Cela ne saurait cependant être possible et réaliste sans un changement culturel en profondeur dans les masses. Rien ne sera possible tant que seront majoritaires les comportements décadents et nihilistes tels que le non respect des restrictions de la vitesse automobile liées à la pollution ou le tir de feu d'artifices, interdits car polluants.

Selon un recensement de l'INSEE publié ce lundi 3 janvier 2017, la population du Pays du Mont-Blanc a déjà perdu 1 200 habitants. Rien n'indique que cela soit uniquement du fait de la pollution, mais cela est forcément une cause tellement la situation est difficilement supportable. Mais la fuite n'est pas une solution, et de toute façon beaucoup n'ont pas cette possibilité.

Les masses, déjà soumises à l'appauvrissement du fait de la pression des monopoles et de la crise du mode production capitaliste, sont en plus victime de la pollution.