Ce mardi 13 décembre ont eu lieu deux tueries, l'une perpétrée en Belgique, à Liège, par Nordine Amrani, l'autre à Florence par Gianluca Casseri. Dans les deux cas, le tireur s'est suicidé après avoir tué quatre personnes à Liège, dont un bébé d'un an et demi (le bilan pourrait encore s'alourdir) et deux à Florence. 125 personnes ont été blessées à Liège, deux à Florence.

De ces deux tueries, la presse bourgeoise n'a retenu que celle de Liège, commise par une personne au nom à consonance arabe, les deux évènements sont pourtant très proches sur le plan idéologique. Cela, le PCMLM est la seule organisation en France à pouvoir le comprendre car seul le PCMLM à analyser le fascisme comme révolte romantique contre le capitalisme et le monde moderne, comme l'a également enseigné Zeev Sternhell.

Car il est indéniable que ces deux actes sont emplis de notre époque qui est celle de la progression du fascisme, trait marquant du capitalisme en crise.

A Liège comme à Florence, Nordine Amrani et Gianluca Casseri, produits de la compétition individualiste du capitalisme, se sont vus comme des personnes capables de réaliser un « coup d'éclat », tout en étant habité par un profond nihilisme, comme le montre leur choix de se suicider. On retrouve là toute la perception fasciste de la vie irrémédiablement nihiliste : ne pas vivre mais éprouver la vie, se sentir vivre en commettant un geste extrême... mais ne rien espérer de la vie et préférer la mort.

Nordine Amrani comme Gianluca Casseri étaient des pélerins du néant, en révolte contre tout et rien, fétichisant l'autodéfense et les armes. Dans les deux cas, on perçoit l'individualisme forcené des fascistes qui affrontent la vie, s'imaginent en « incompris magnifiques » (qui doivent accomplir un destin) et en retirent une haine de l'existence, une misanthropie chevillée au corps.

La dimension romantique de la révolte individualiste est flagrante dans les deux cas.

D'une part, Nordine Amrani avait déjà été condamné pour détention d'armes, de stupéfiants et des faits de mœurs, sans que la presse bourgeoise ne livre plus de précisions sur ce dernier point pour l'instant. Il n'avait effectué que trois ans de détention sur sa condamnation à cinq ans de prison pour ces faits. Pourtant, il possédait chez lui un AK47, un lance-roquette ou encore un fusil à lunette. Au cours de la tuerie de Liège, il a lancé plusieurs grenades sur la place Saint-Lambert.

On constate à quel point la justice bourgeoise a failli. C'est tout l'Etat bourgeois qui se délitte au point de laisser un homme détenir un véritable arsenal militaire au prétexte qu'il semblait « calme », « posé » et paraissait ne souffrir d'« aucun déséquilibre »... Amrani se disait harcelé par la justice qui le poursuivait pour une nouvelle affaire de mœurs. Sa révolte est de type romantique, c'est-à-dire déboussolée, contre tout le monde et toute chose, contre ce « monde pourri » qui ne le « comprend pas ». Et le geste de ce pèlerin du néant est celui d'un fasciste voulant se sentir tout puissant, et justifier la terreur par une référence à l'amour conçu de manière patriarcal comme un sentiment violent, unilatéral et irrationnel ne pouvant aboutir à rien. Amrani avait ainsi viré la veille de l'argent sur le compte de sa femme en accompagnant la transaction du message suivant : « Je t'aime, mon amour. Bonne chance ».

D'autre part, Gianluca Casseri était un militant fasciste de l'organisation Casa Pound. Ce mardi 13 décembre, il a tué deux vendeurs ambulants sénégalais. La motivation raciste est bien entendu évidente mais, à travers les quelques détails de sa vie fournis par la presse bourgeoise, c'est surtout la dimension romantique de Gianluca Casseri, dimension typiquement fasciste, qui saute aux yeux.

En effet, Casseri était le fondateur d'un magazine entièrement consacrée à l'oeuvre maîtresse de JRR Tolkien, « Le Seigneur des anneaux ». La fascination de Casseri pour ce livre archi connu est en soi un paramètre intéressant car « Le Seigneur des anneaux » constitue une sorte de condensé de la révolte contre le monde moderne éprouvée par les fascistes. JRR Tolkien y décrit minutieusement la vie des Hobbits, un peuple de gens de petite taille vivant paisiblement en s'étant préservé de l'extérieur et de toute modernité. Les Hobbits perpétuent les traditions ancestrales et leur propre folklore, sont de « bons vivants » attachés au « terroir » et aux travaux des champs. Dans une conception fasciste, leur bonheur est celui de la roue de l'histoire qui se serait arrêter de tourner pour figer la culture d'autrefois abritée du modernisme.

L'oeuvre de Tolkien est ainsi empreinte d'une très forte culture sociale-féodale en adéquation avec la religion catholique de l'auteur. Cette forme de nostalgie idéaliste de l'ordre d'antan, considéré comme « égalitaire » et « pur » est un des ferments du fascisme qui se traduit notamment par une valorisation constante des petits patrons et des petits artisans du « terroir » comme on le voit souvent en France.

En outre, le magazine de Casseri s'appelait « La Soglia », traduction italienne de « The Beginning Place » (« Le commencement de nulle part » dans sa version française), d'Ursula K. Le Guin.

Ce roman d'heroic fantasy dépeint l'histoire de deux personnages qui s'ennuient dans leur vie banlieusarde et découvrent un monde parallèle merveilleux où le temps s'écoule plus lentement. A l'opposé de la science-fiction matérialiste d'un Asimov, il existe un courant de la littérature fantastique qui inventent des mondes imaginaires habités par des « valeurs » issues de la chevalerie. Dans ce roman d'Ursula K. Le Guin, le monde actuel, terne et ennuyeux, ne peut soutenir la comparaison face à un monde fantasmagorique peuplé de princes, princesses et qui exaltent l'héroïsme. Tout l'imaginaire fasciste, qui était aussi celui de Gianluca Casseri, est résumé ici.

Si le fascisme était un temps de conjugaison, il serait le futur antérieur, c'est-à-dire une conception de l'avenir tourné vers un passé fantasmé et idéalisé. Il faut d'ailleurs noter que l'héroic fantasy adopte souvent un style rétro-futuriste, où les histoires sont ancrées dans le futur mais avec un look vintage.

Les tueries barbares perpétrées par les deux pélerins du néant que sont Nourdine Amrani et Gianluca Casseri se rejoignent dans leur dimension romantique, incontournable à l'époque du capitalisme qui, en se désagreant, génère une forme de révolte antimatérialiste : le fascisme. Ils apparaissent ainsi comme des répliques du massacre d'Utoya d'Anders Behring Breivik, autre pèlerin du néant, figure du fascisme de cette phase historique.  

Le nihilisme, le néant, la révolte romantique, voilà qui est à l'opposé de la discipline de Parti, de la connaissance du monde par le matérialisme dialectique, de la construction plannifiée du socialisme pour correspondre à l'avenir de la planète !