Émigration et immigration - 8e partie : les transferts de fond au service des rapports semi-coloniaux
Submitted by Anonyme (non vérifié)La vague d'émigration des éléments éduqués des pays semi-coloniaux semi-féodaux a, de manière dialectique, un aspect en retour particulièrement néfaste. En effet, émigrant dans un esprit capitaliste, ces émigrants devenus immigrés accumulent du capital qu'ils réinvestissent dans leurs pays d'origine, renforçant la nature semi-féodale semi-coloniale de celui-ci.
Les transferts de fond consistent soit en un soutien financier familial, soit en des investissements, des placements, des prêts ; dans tous les cas, cela ne va jamais dans le sens d'une modification de la base économique locale, mais bien au renforcement des tendances existantes.
Il n'y a en effet aucune accumulation à l'échelle nationale gérée de manière planifiée, mais des aides à la survie de familles rurales qui alors consomment sans que soit modifié le cadre semi-féodal, ou bien des investissements renforçant le cadre semi-colonial.
Ces transferts de fond sont très importants ; ils sont plus importants que les « aides au développement » et équivalent au 2/3 des investissements des entreprises des pays capitalistes - impérialistes dans les pays semi-coloniaux semi-féodaux.
En 2013, les transferts de fond envoyés par les immigrés dans leur pays d'origine a atteint le chiffre de 410 milliards de dollars, et il augmente d'environ entre 5 et 10 % chaque année.
La part de ces transferts de fond dans le PIB de certains pays témoigne d'une dépendance fondamentale : 42 % pour le Tadjikistan, 29 % pour le Népal, 25 % pour la Moldavie, 21 % pour l'Arménie, 19 % pour le Sénégal.
60 % des infrastructures du Mali ont comme origine les transferts de fond, quasiment totalement depuis la France.
La Banque Mondiale constate dans l'un de ses documents :
« Les envois de fonds demeurent l’une des principales sources de ressources extérieures pour les pays en développement, excédant de loin l’aide publique au développement et étant beaucoup plus stables que la dette privée et les investissements de portefeuille.
Pour de nombreux pays en développement, les envois de fonds sont une importante source de devises – leur montant excède les recettes tirées des principales exportations et couvre une grande partie du coût des importations.
Au Népal, par exemple, les envois de fonds représentent près du double des recettes d’exportation de biens et services, tandis qu’au Sri Lanka et aux Philippines, ils représentent plus de 50 % et 38 % respectivement. En Inde, les envois de fonds se sont chiffrés à 70 milliards de dollars en 2013, soit plus que les 65 milliards de dollars générés par les exportations de services logiciels, le secteur phare du pays. En Ouganda, les envois de fonds sont deux fois élevés que les recettes tirées de la principale culture d’exportation, le café. »
Le développement inégal est également la règle des investissements.
L'Europe a quasiment 10 % de la population mondiale, 20 % des immigrés du monde pour 25 % des transferts de fond d'immigrés ; toutefois, 42 % de ces transferts de fond depuis l'Europe vont à une poignée de pays : le Nigéria (7,4 milliards de dollars), la Chine (6,3 milliards), le Maroc (6,2 milliards), l'Inde (5,7 milliards) et l'Ouzbekistan (5,6 milliards).
A l'échelle mondiale, on a le même développement inégal, les pays où sont envoyés la partie la plus significative des fonds sont la Chine, l'Inde, le Mexique et les Philippines.
Depuis les pays capitalistes-impérialistes d'Europe, les transferts de fond atteignent 109,4 milliards de dollars, pour 50,4 millions d'immigrés.
6,2 milliards sont envoyés dans leur pays d'origine par 3,8 millions d'immigrés d'Amérique latine et des Caraïbes, 23,1 milliards sont envoyés dans leur pays d'origine par 8,7 millions d'immigrés d'Afrique, 8,7 milliards sont envoyés dans leur pays d'origine par 5,7 millions d'immigrés du Proche-Orient et du Caucase, 34,9 milliards sont envoyés dans leur pays d'origine par 12,8 millions d'immigrés d'Asie et du Pacifique, 36,4 milliards sont envoyés dans leur pays d'origine par 19,4 millions d'immigrés d'Europe de l'Est.
Un autre aspect impérialiste important est le prix de ces envois, consistant en la commission d'environ 12 % (au minimum) exigé par les organismes financiers, notamment Western Union et Money Gram qui sont les deux monopoles du secteur, réalisant environ 65% des opérations.
Les commissions varient énormément selon les pays : le chiffre est de 2,5 % depuis la Russie, 10,7 % depuis la France, 14,5 % depuis la Suisse.
A côté de cela existent des réseaux semi-féodaux, pratiquant des transferts de fond de manière clandestine (fei ch’ien – la « monnaie volante » - en Chine, hawala – le « transfert » au Pakistan et au Bangladesh, hundi - « collecter » en Inde), notamment dans le cadre de l'immigration clandestine.
De fait, l'immigration clandestine va souvent de pair avec un système mafieux généralisé, né dans le terreau fertile du semi-féodalisme, avec son patriarcat, son chantage communautaire et sa fascination pour le capitalisme sauvage.
Le désir d'accumuler à tout prix du capital pour vivre tel un « colon » dans son propre pays d'origine amène également parfois une précipitation dans la criminalité, notamment le trafic de drogues ; les nombreuses entreprises de restauration rapide n'ont pas d'autres buts, tablant sur l'utilisation massive de produits d'origine animale pour obtenir le meilleur taux de profit possible.