8 mar 2014

Elisabeth Vigée-Lebrun, peintre portraitiste

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Le 8 mars, c'est la journée internationale de la femme à la suite de l'appel de Lénine en 1921. Et il y a lieu de rappeler dans quelle mesure la libération des femmes passe par leur intégration dans le processus révolutionnaire de notre époque, notamment pour la défense de l'héritage, face à la barbarie capitaliste et son nihilisme.

Les femmes ont été mises à l'écart par l'esclavagisme et le féodalisme ; ce n'est que la bourgeoisie à ses débuts qui a affirmé la négation progressive du sexisme, tout comme du racisme. Le capital s'appuie sur des capitalistes, et peu importe qu'il s'agisse d'un homme ou d'une femme.

Les œuvres de Molière défendent ainsi les femmes, leur droit à l'amour, à la sexualité, à la connaissance ; c'est un moment essentiel de l'histoire de notre pays.

Il n'y a, cependant, jamais eu de bourgeoisie « pure » et de démocratie « pure », à part les cas à part des démocraties populaires dans les pays de l'Est européen et en Chine, où c'est le prolétariat qui a réalisé ces tâches anti-féodales.

Les femmes doivent donc, encore et encore, dépasser leurs arriérations culturelles, leur mise en « minorité » intellectuelle. La libération de la femme est une tâche démocratique, qui cependant s'intègre à la lutte pour le socialisme.

Il y a lieu, dans ce processus, de connaître et de la valoriser les femmes s'affirmant dans ce processus démocratique. C'est le cas d'Elisabeth Vigée-Lebrun (1755-1842), peintre qui a vécu à la même époque, et dans la même ligne portraitiste, que Jean-Baptiste Greuze.

Ce dernier l'a également soutenu et son talent fut vite affirmé ; Elisabeth Vigée-Lebrun a eu accès aux collections d'art des aristocrates, se forgeant une culture artistique solide.

Comme elle le raconte dans ses souvenirs:

« Dès que j'entrais dans une de ces riches galeries, on pouvait exactement me comparer à l'abeille, tant j'y récoltais de connaissances et de souvenirs utiles à mon art tout en m'enivrant de jouissances dans la contemplation des grandi maîtres.

En outre, pour me fortifier, je copiais quelques tableaux de Rubens, quelques tètes de Rembrant, de Wandik, et plusieurs tètes de jeunes filles de Greuze, parce que ces dernières m'expliquaient fortement les semi-tons qui se trouvent dans les carnations délicates; Wandik les explique aussi, mais plus finement.

Je dois à ce travail l'étude si importante de la dégradation des lumières sur les parties saillantes d'une tête, dégradation que j'ai tant admirée dans les têtes de Raphaël, qui réunissent, il est vrai, tout es les perfections.

Aussi est-ce à Rome seulement, et sous le beau ciel de l'Italie, qu'on peut tout-à-fait juger Raphaël. Lorsque plus tard j'ai pu voir ceux de ses chefs-d'œuvre qui n'ont point quitté leur patrie, j'ai trouvé Raphaël au-dessus de son immense renommée. »

Elisabeth Vigée-Lebrun a donc été une femme au cœur du processus culturel permis par la bourgeoisie. Ce qui a fait qu'elle n'est pas connue ne vient pas du fait qu'elle soit un femme, mais que, de par sa position historique, elle a été au service de l'aristocratie.

La révolution française a donc considéré ce peintre comme une ennemie, et de fait elle se réfugia longtemps en Russie tsariste, qui l'apprécia beaucoup.

De fait, sa manière d'élaborer des portraits, notamment de femmes, va dans le sens du réalisme, de la reconnaissance de la dignité du réel. Le caractère naturel de ses portraits est frappant. C'est l'immense qualité de la peinture d'Elisabeth Vigée-Lebrun.

Les aristocrates, alors, formaient une sorte de caste coupée de la société ; leur niveau culturel était cependant élevé, puisqu'ils captaient toutes les initiatives artistiques. Elisabeth Vigée-Lebrun note ainsi dans ses souvenirs :

« J'ai été dîner plusieurs fois à Saint-Ouen, chez le duc de Nivernais, qui avait là une fort belle habitation, et qui réunissait chez lui la plus aimable société qu'on puisse voir.

Le duc de Nivernais, que l'on a toujours cité pour la grâce et la finesse de son esprit, avait des mamères nobles et douces sans aucune afféterie, il se distinguait surtout par son extrême galanterie avec les femmes de tout âge. 

Sous ces rapports, je pourrais en parler comme d'un modèle dont je n'aurais point trouvé de copie si je n'avais pas connu le comte de Vaudreuil, qui, beaucoup plus jeune que M. de Nivernais, joignait à une galanterie recherchée une politesse d'autant plus flatteuse qu'elle partait du cœur.

Au reste, il est devenu fort difficile aujourd'hui de donner une idée de l'urbanité, de la gracieuse aisance, en un mot des manières aimables qui faisaient, il y a quarante ans, le charme de la société à Paris. Cette galanterie dont je vous parle, par exemple, a totalement disparu.

Les femmes régnaient alors, la révolution les a détrônées. »

Elisabeth Vigée-Lebrun fut ainsi protégée par la reine Marie-Antoinette, elle fut même nommée membre de l'Académie royale de peinture et de sculpture. Mais elle développa son œuvre sans comprendre qu'elle était une bourgeoise s'étant mise au service de l'aristocratie.

Ce décalage lui valut une farouche inimité, en plus de la jalousie pour son travail, et elle fut la cible de vagues entières de calomnies sexistes particulièrement brutales.

Elisabeth Vigée-Lebrun est donc une figure de l'histoire de notre pays ; elle appartient à ces artistes produit par la bourgeoisie, qui affirment le réalisme, et soutiennent la cause des femmes.

Elisabeth Vigée-Lebrun est donc à ajouter à la liste des combattants progressistes d'alors : les Molière, Marivaux, Beaumarchais !

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