18 mai 2009

« De la servitude moderne » : un exemple de critique romantique du capitalisme

Submitted by Anonyme (non vérifié)

Un documentaire, consistant en un montage d’images découpé en 20 chapitres, intitulé « De la servitude moderne », écrit et réalisé par Jean-François Brient, tourne en ce moment sur le net. Il s’agit d’un film à la Koyaanisqatsi, premier grand classique du genre: des images se succèdent, montrant certains aspects du monde, de la société, etc.

Sauf que là on a droit à un commentaire hyper théâtral avec des effets d’écho absolument insupportable. Un commentaire bien évidemment romantique, propre à notre époque, avec évidemment les mêmes défauts: d’un côté l’envie de changer le monde, de l’autre le mépris pour le peuple considéré comme un ramassis d’ »esclaves » qui consent à sa propre servitude.

L’auteur du documentaire se place donc dans la position du donneur de leçon méprisant qui conspue l’obéissance servile des masses, perçues comme des « esclaves » incapables de se révolter à part dans d’épisodiques émeutes.

On est dans l’esthétique, et d’ailleurs le document est dans la droite ligne du situationnisme, ce phénomène de révolutionnaire grand bourgeois apparu autour de mai 1968.

Avec une telle vision aristocratique, trait caractéristique du fascisme, on ne s’étonnera pas que les philosophe ultra-réactionnaires Nietzsche et Schopenhauer, soient cités, ni que le site précise bien qu’il ne cautionnera en rien la reprise du film par l’extrême-droite.

Celle-ci ne pourrait qu’être tentée (et elle l’est d’ailleurs), car qu’est-ce sinon du romantisme, que de critiquer l’industrie de la viande comme digne d’Auschwitz (comme cela est dit dans le film) sans pour autant ne proposer aucune alternative concrète?

Tout le romantisme se montre bien dans l’absence de pratique, à part l’émeute stylisée à la fin sur la musique de Rage Against The Machine. Car de quoi les masses sont-elles esclaves? Du capitalisme? Non, le documentaire « De la servitude moderne » parle de « système totalitaire marchand » qui est le concept central de tout le film.

Or, ce concept n’est évidemment ni neutre ni nouveau, il existe depuis la critique romantique du capitalisme apparu à la victoire de la révolution bourgeoise de 1789. Une critique romantique qui est née dans les forces féodales (Chateaubriand en France, Novalis en Allemagne) et qui a sa continuité dans la contestation fasciste du capitalisme, considéré comme un monde décadent, perverti par la marchandise.

La marchandise est dans le documentaire comprise comme le pilier de l’asservissement « volontaire » des « esclaves » : « Et c’est dans ce logis étroit et lugubre qu’il [l' "esclave"] entasse les nouvelles marchandises qui devraient, selon les messages publicitaires omniprésents, lui apporter le bonheur et la plénitude. Mais plus il accumule des marchandises et plus la possibilité d’accéder un jour au bonheur s’éloigne de lui ».

Ce n’est pas sans rappeler le slogan romantique fasciste « Naître, consommer, mourir », qui contestait la « société de consommation ». En fait, comme pour les fascistes, la révolte idéaliste contre la marchandise débouche logiquement sur une révolte contre le monde moderne : « C’est ainsi que de manière périodique, de nouveaux besoins sont créés qui sont vite considérés comme des besoins vitaux par l’immense majorité de la population : ce fut d’abord la radio, puis la voiture, la télévision, l’ordinateur et maintenant le téléphone portable ».

Ce documentaire est donc une occasion pour l’auteur de montrer sa « supériorité »: Brient, en intellectuel bourgeois, se considère comme « au-dessus ».

« Au-dessus » du peuple, « au-dessus » de la servitude. « Au-dessus » de tout. Et donc aussi de la révolution, qui ne peut que tomber du ciel, tel Dieu permettant au romantique de vivre son vrai amour: « A mesure que l’oppression s’étend à tous les secteurs de la vie, la révolte prend l’allure d’une guerre sociale. Les émeutes renaissent et annoncent la révolution à venir ».

A ce niveau, reprenons justement l’aspect mis en avant dans le chapitre « alimentation », où des images horribles d’exploitation industrielle des animaux sont montrées sans que cela ne débouche sur un commentaire précis concernant les monopoles de l’agro-business dans le capitalisme, responsables de l’apparition des épisodes épidémiques comme la vache folle, la grippe aviaire ou à présent la grippe porcine.

Là encore, « De la servitude moderne » préfère les faux-fuyants et la critique fasciste de la vie facile et passive de l’ « esclave moderne » qui « erre dans les supermarchés à la recherche des ersatz que la société de la fausse abondance consent à lui donner ».

Les animaux ne sont d’ailleurs jamais mentionnés dans le texte, car l’intellectuel bourgeois, limité par son anti-communisme, ne peut envisager une rupture révolutionnaire dans la vie quotidienne. Une telle critique de la « modernité » – critique abstraite, romantique, sans conséquence sur le quotidien, est une critique sur le mode fasciste.

Le fait est que la petite-bourgeoisie en prend plein la gueule avec les capitalistes monopolistes, mais n’est pas prête du tout à assumer une discipline révolutionnaire, allant jusqu’au quotidien. La critique est toujours romantique, idéaliste. Elle n’est pas à l’école des masses.

Nous, communistes, sommes par contre à l’école des masses. Ce sont les masses qui font l’histoire et montrent tous les jours leur besoin de révolution et de communisme. Seul le marxisme-léninisme-maoïsme incarne la rupture révolutionnaire avec le capitalisme qui, dans sa phase de pourrissement actuelle, produit des délires romantiques d’intellectuels bourgeois comme ceux de Jean-François Brient.  

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