18 juil 2012

La Tunisie passe sous le giron de l'impérialisme US devant un ex-PCOT impuissant

Submitted by Anonyme (non vérifié)

Le président tunisien Moncef Marzouki a rencontré hier le président français François Hollande.

Marzouki connaît bien la France : il y a fait des études de médecine, ses enfants ont fait des hautes études ici (école normale supérieur, sciences po...) ; il soutient une ligne « démocratique » à la française : il a été le président de la Ligue tunisienne des droits de l'homme de 1989 à 1994, puis a fondé le Congrès pour la République.

Cependant, la Tunisie que préside Marzouki n'est plus principalement dépendante de la France, comme sous Ben Ali. Il y a eu entre-temps la « révolution de Jasmin. »

Lorsqu'il y a une révolution ou un changement de régime, il faut voir la nature du nouvel Etat, afin de savoir qui profite de la nouvelle situation. Si la révolution est socialiste, alors un semi-Etat, l'Etat des soviets, des conseils et comités populaires, se forme et dirige le pays.

Bien évidemment, cela n'a pas été le cas pour les « révolutions » dans le monde arabe. Comme déjà expliqué – et à l'opposé des anarchistes, des trotskystes et des pseudos maoïstes – il n'y a pas eu de « révolution », mais un changement de rapports de forces entre différentes fractions de la bourgeoisie bureaucratique.

Un simple regard sur les rapports impérialistes qui existent sont révélateurs. Il y a quelques jours, l'impérialisme US a annoncé garantir les emprunts de la Tunisie, à la hauteur de 485 millions de dollars. Cela signifie que si la Tunisie ne rembourse pas l'emprunt et les intérêts, alors ce sont les USA qui paieront !

Cet emprunt de la Tunisie va durer sept ans, et un tel emprunt n'avait pas été fait depuis 2007. Le taux d'intérêt est de 1,686%, ce qui est faible sur le marché et permis par le soutien US.

Ce que cela signifie est facile à comprendre : la Tunisie est passée dans l'orbite de l'impérialisme US, après avoir été sous la domination indirecte de l'impérialisme français.

Tel est le sens de la pseudo « révolution » tunisienne, qui a viré Ben Ali, pour donner le pouvoir aux islamistes d'Ennahda, qui sont en plus appuyés par les salafistes. L'islamisme, loin d'être révolutionnaire, n'est qu'une idéologie mobilisatrice d'une fraction de la bourgeoisie bureaucratique.

La laïcité de Ben Ali était le pendant de cet islamisme ; son « modernisme » ne visait qu'à ré-impulser le capitalisme bureaucratique. La pression populaire a été un moyen pour une autre fraction bureaucratique de conquérir le pouvoir.

 

Nulle « révolution », par conséquent, mais simplement un changement de pouvoir typique des pays dominés par l'impérialisme. Ben Ali, au pouvoir 23 ans, a été mis de côté, mais la nature du pays ne change pas.

Il est intéressant de noter également un fait très parlant : le parti communiste des ouvriers de Tunisie (PCOT) qui devient « Parti des Travailleurs Tunisiens ». Le PCOT a un parti de grande résistance face à la dictature, mais il n'a récolté qu'un score très faible aux élections (3 sièges sur 217).

Membre de la Conférence internationale des partis et organisations marxistes-léninistes (une structure internationale hoxhaïste), il évolue par conséquent conformément à son idéologie révisionniste, tentant de diluer l'idéologie dans une sorte de populisme oeuvrant à un front électoral.

C'est en fait la stratégie hoxhaïste traditionnelle, le plus grand succès étant en Équateur ou plus relativement en Turquie (où le TDKP s'était fondu sans se fondre dans un « parti des travailleurs »). En France, le PCOF (Parti Communiste des Ouvriers de France) tente de faire de même en participant au Front de Gauche de Mélenchon.

Voici comment Hamma Hammami, dirigeant historique du PCOT et secrétaire général du nouveau parti, justifie le changement de nom, à l'occasion de débats dans son organisation il y a quinze jours :

« Il est à préciser que ces débats qui ont commencé bien avant le congrès ne portent pas sur le fond, il n’est aucunement question pour nous de faire plaisir à l’opinion publique ou bien de nous départir de notre idéologie.

L’idée de changer l’appellation du Parti nous a été inspirée par l’amalgame ancré dans certains esprits entre communisme et athéisme, cela leur est inculqué par des parties malintentionnées qui, pour gagner leur confiance et surtout leurs voix, font usage de moyens malsains.

Ils essayent de  déformer le communisme et le présenter sous la forme d’un monstre en occultant délibérément son aspect purement humain : le communisme respecte profondément les croyances des gens qu’il considère comme relevant de la sphère privée, il ne s’intéresse qu’aux questions économiques, sociales, politiques, culturelles…, tout ce qui concerne la vie de l’homme en société, son seul souci c’est son bonheur, il oeuvre à l’émanciper, à mettre fin à l’exploitation de l’homme par l’homme.

Faute d’arguments, ses ennemis usent de la carte religieuse et lui collent l’étiquette de l’athéisme, ils ne sont pas capables de l’affronter sur les autres terrains, en fait, il s’agit là d’une vieille méthode qu’utilisait le colonialisme au siècle précédent. »

La contradiction saute aux yeux : d'un côté, il ne s'agit pas de « faire plaisir à l'opinion publique », de l'autre côté il est expliqué qu'il s'agit d'échapper à l'accusation d'athéisme.

En fait, incapable de réaliser une analyse matérialiste dialectique de la Tunisie, l'ex-PCOT est obligé de tenter de surfer sur la « révolution », qu'il considère comme un mouvement authentique, voire « pur » sur le plan populaire.

Cela aboutit à un populisme catastrophique, qui est une liquidation idéologique. Au lieu de préserver le parti et de construire un front, on assiste à la liquidation du parti révolutionnaire au nom d'une tentative de profiter de l'élan d'une révolution qui n'en est pas une.

C'est une démarche typique du hoxhaïsme, et c'est du populisme qui se met à la remorque finalement de la bourgeoisie nationale. Il ne peut y exister de révolution « populaire »; la révolution est démocratique, ou bien socialiste. La conception comme quoi un débordement serait possible est du spontanéisme, qui amène à la remorque de forces profitant des déséquilibres propres à une société (en l'occurrence, une société semi-coloniale semi-féodale).

La fin du PCOT est celle d'une série de luttes et de batailles face au fascisme; le Parti des Travailleurs Tunisiens est lui déjà à la remorque d'une ré-impulsion du capitalisme bureaucratique,cette fois par une bourgeoisie bureaucratique au service principalement de l'impérialisme US. 

 

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